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Description

Gilles Boeuf, professeur à Sorbonne Université, présente dans cette vidéo le biomimétisme, qui consiste à s'inspirer de la nature pour faire beaucoup mieux sur le plan de l'efficacité de nos technologies. Il retrace les étapes de ce courant et de ce champ de recherche, et donne de nombreux exemples d'animaux ayant été à l'origine d'innovations technologiques.

Objectif d'apprentissage :

- Comprendre ce qu'est le biomimétisme et connaître les animaux ayant été à l'origine d'innovations technologiques.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
  • Paternité
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Objectifs de Développement Durable
  • 9. Industrie, innovation et infrastructure
Thèmes
  • Enjeux Climat/Biodiversité
  • Les solutions
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
biodiversitébiomimétisme
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Contributeurs

BOEUF Gilles

Sorbonne Université

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Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC UVED «Vivre avec les autres animaux ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.

S'inspirer du vivant

Gilles Boeuf, Professeur à Sorbonne Université

Nous allons rester dans ces questions de biodiversité et d'interaction animal-humain vivant dans un sens plus large, avec un sujet particulier qui a été mis au goût du jour il y a à peu près une vingtaine d'années, par un livre sorti aux États-Unis qui s'appelait S'inspirer de la nature. Comment va-t-on aller chercher dans ce système vivant une inspiration pour faire en matière de technologie beaucoup mieux que ce qu'on fait aujourd'hui ?

1. La situation

On est aujourd'hui dans une situation plus que préoccupante. On rappelle les deux grandes questions actuelles : l'accélération du changement climatique, accélération beaucoup plus grande que ce que les scientifiques avaient imaginé il y a encore quelques années d'un côté ; et de l'autre l'effondrement du vivant. Je n'aime pas parler d'extinction. On n'est pas en train de vivre une extinction à l'heure actuelle. On vit un effondrement du nombre des individus dans les populations sauvages naturelles à l'heure actuelle. Ça peut se terminer par des extinctions.

Comment peut-on prévoir ce qui va se passer demain ? Comment peut-on imaginer quelque chose en matière de climat, d'accès à l'eau, de gestion des déchets, de stockage de CO2, de l'évolution du vivant... ? Quel mode de gouvernance pour avancer là-dessus ? C'est la question absolument essentielle à l'heure actuelle.

2. Le modèle

Le modèle a été mis en valeur il y a une quarantaine d'années par une approche de la physique et de la biologie du système terre qu'on appelait la bionique. La bionique consistait à aller chercher des éléments dans la nature dont on allait tirer parti pour faire mieux en matière de technologie. Ça a beaucoup intéressé les militaires au début. On n'a pas trop d'informations sur ce qui a été fait, et ça continue à intéresser beaucoup les militaires.

Cette bionique se mue, avec l'ouvrage de Janine Benyus en 1997, en cette bio-inspiration. On emploie aussi le terme de "biomimétisme". Le Muséum d'Histoire naturelle, en France, était un peu moteur parce qu'il avait les collections nationales. Il a lancé des colloques dans les années 70 et 80. Puis on a fait un colloque, un peu fondateur du mouvement français actuel, le 10 décembre 2012 à Paris, organisé entre le CGDD, le Commissariat général au Développement durable du ministère de l'Environnement, et le Muséum National d'Histoire naturelle sur une thématique qu'on appelait à l'époque, "Recherches bio-inspirées".

Ceci a amené à la création du CEEBIOS, Centre d'Études européennes tourné vers le Biomimétisme et la bio-inspiration. Ca sortait en même temps qu'un livre écrit par deux amis qu'on aimait beaucoup dans la communauté de la biodiversité, Robert Barbault, un écologue, et Jacques Weber, un économiste très intéressé dans ces questions-là et qui avait créé aussi un Institut français pour la Biodiversité. Ce livre s'appelle La Vie, quelle entreprise !

Finalement, la R&D d'un système vivant qui vit depuis presque 4 000 millions d'années est géniale. S'inspirer des formes, des mécanismes, des matériaux, des relations durables établies, cela va nécessiter une très grande interdisciplinarité. Il nous fallait de la recherche fondamentale et beaucoup de sciences de l'ingénieur.

3. Les exemples

Vous avez sur l'image ci-dessous quelques exemples de bio-inspiration.

Vous avez l'inspiration du Shinkansen japonais, ce train rapide, à partir de la tête et du bec du martin-pêcheur, par exemple. Mais ce train, s'il allait vite, faisait du bruit. On a donc fait une double bio-inspiration : on est allé chercher les accrochages des plumes du hibou, qui s'il fait du bruit ne mange pas parce que sa proie est partie bien avant qu'il ne puisse l'attraper. Cette double bio-inspiration est un système efficace, pour un train rapide et silencieux.

Vous avez d'autres exemples. Les winglets d'avion ont permis à Boeing, il y a déjà maintenant une bonne trentaine d'années, de gagner du carburant. Moins d'énergie à gaspiller induit aussi moins de pollution. Il y a aussi ces trains espagnols inspirés de têtes de rapaces, ou encore cet escargot qui a été un joli modèle de bio-inspiration. C'était le symbole de ce colloque de l'année décembre 2012.

Il y a l'exemple d'une petite éponge de Méditerranée qui sait faire du béton armé beaucoup plus léger que le nôtre, beaucoup plus résistant, et qui s'ajuste. Ce qui veut dire qu'un bâtiment qui tombe, suite à un tremblement de terre, écrase tout le monde sous les débris de béton et de ferraille. Là non, ça se déforme, mais ça reprend la position initiale. C'est beaucoup plus léger que le béton que l'on fait, et à la fin de l'usage du bâtiment, ça se composte. C'est magique, ça fait rêver.

Un autre exemple est celui d'un ténébrionide, petit coléoptère du désert du Namib, qui est capable tous les jours de faire l'eau dont il a besoin, en fonction de la mise en place du point de rosée. Tout ça va nous servir à réfléchir à un meilleur usage du système.

En exemple tout particulièrement intéressant est celui de la libellule. Ce qu'elle sait faire est incroyable et ça marche depuis 345 millions d'années : elle a neuf techniques de vol, elle peut voler à 90 kilomètres par heure, elle voit à 360 degrés, elle peut encaisser 300 images par seconde, elle a une capacité d'accélération incroyable, elle encaisse 30 G soit 30 fois l'accélération terrestre (un pilote, à 6 G, n'est pas très bien...)… Tout ça pour vous montrer qu’un être vivant qui pèse quelques grammes et qui vole à cette vitesse-là, avec quelques watts, est exceptionnel. Or qu'est-ce qu'on fait ? On a asséché les mares, on les a détruites, on les a polluées, on a fait des parkings par-dessus.

Garder ce vivant avec nous nous permet de pouvoir comprendre comment il fonctionne et s'en inspirer pour faire mieux. C'est comme ça qu'est né justement le CEEBIOS.

4. Les applications

La bio-inspiration peut servir partout (figure ci-dessous) : en énergie, en dynamique des fluides, en gestion des surfaces, en robotiques, en intelligence artificielle, aux capteurs, aux structures liées à la lumière et même en organisation du management d'entreprise et en éducation.

5. Conclusion

Quels sont les avantages du vivant par rapport à nos industries aujourd'hui ? Le vivant innove constamment, depuis la nuit des temps, depuis qu'il existe. L'innovation peut être utilisée par tous. Le vivant fait tout avec une grande parcimonie d'énergie, c'est-à-dire une extraordinaire capacité à ne pas utiliser beaucoup d'énergie. La nature ne fait jamais un produit qu'elle ne sait pas dégrader. Elle peut faire des poisons extrêmement violents, mais elle sait les dégrader. Nous avons pour notre part inventé 100 000 molécules dont on ne sait que faire aujourd'hui. Enfin, le vivant ne maximise jamais, il optimise en permanence.

Il faut stopper l'économie actuelle qui consiste à faire des sous et du profit en détruisant ou en surexploitant la nature et les vivants. Si on y parvient, ça marchera mieux.