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Description

François Moutou, ancien épidémiologiste à l'ANSES, s'intéresse dans cette vidéo aux risques sanitaires liés à la proximité entre les humains et les animaux sauvages. Il montre que ce risque est lié à plusieurs facteurs, comme par exemple la présence d'animaux domestiques qui jouent souvent un rôle d'intermédiaire dans les transmissions, l'équilibre entre proies et prédateurs dans les écosystèmes concernés, et la mobilité des personnes qui peut être à l'origine d'une propagation rapide et à grande échelle de maladies.

Objectifs d'apprentissage :
- Appréhender la place des animaux d'élevage dans la transmission de micro-organismes aux humains
- Comprendre le rôle joué par les animaux dans la maladie de Lyme et la grippe
- Comprendre le rôle joué par les humains dans l'émergence de certaines maladies.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
Mentions Licence
  • Sciences sanitaires et sociales
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+3
Objectifs de Développement Durable
  • 3. Bonne santé et bien-être
Thèmes
  • Environnement - Santé
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
biodiversitésantémaladiesanimaux sauvagesrisques sanitaireszoonoses
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Contributeurs

Moutou François

Anses - Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

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Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC UVED «Vivre avec les autres animaux ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.

Biodiversité et santé, amies ou ennemies ?

François Moutou, ancien épidémiologiste à l'ANSES

Je vais évoquer avec vous la question des relations qui peuvent exister entre biodiversité et santé. Si on pose la question simplement : puisque les microorganismes, agents de maladies, font partie de la biodiversité, quel regard doit-on avoir sur cette biodiversité ? D'un côté, il faut la conserver, mais en même temps, si elle contient les microbes, comment conserver, parfois, des organismes qui nous posent quelques soucis ?

1. Microorganismes et mammifères

Pour bien situer les choses, l’image ci-dessous montre les différents types de microorganismes, certains d'ailleurs étant des macroorganismes qui peuvent parasiter et contaminer les mammifères. Il s’agit de virus, de prions, de bactéries, de champignons et de différents modèles de parasites.

Ci-dessous, vous avez l’image d’un troupeau domestique avec plusieurs espèces. Certainement, tous les animaux qui sont sur cette image hébergent des champignons, des parasites, et différents microbes.

Comment tout ça se passe-t-il ? Comment est-ce que nous cohabitons et comment est-ce qu'on peut encourager une cohabitation entre cette diversité sans pour autant mettre notre santé et celles des animaux d'élevage en péril ?

En ce qui concerne la biodiversité sauvage, vous avez ci-dessous quelques images de mammifères, chacun appartenant à un ordre différent : dermoptères, Scandantia, Macroscélides... Tous ces animaux hébergent également leurs virus, leurs bactéries et leurs parasites, et on ne les connaît pas tous. Mais apparemment, ils vivent très bien ensemble.

2. Importance des animaux domestiques

Le schéma ci-dessous met en relation les microbes, la faune sauvage, les animaux domestiques comme le porc et la poule, l'homme et la planète. Le mot domestique veut dire "qui vivent dans la maison de l'homme" et c'est quelque chose qui n'est pas sans conséquence au niveau sanitaire.

Tout le monde, depuis quelques décennies et quelques siècles, bouge beaucoup et il y a un certain nombre de conséquences à ces mouvements. Mais la partie importante dans ce schéma-là est celle des animaux domestiques qui font le lien entre ce qui se passait avant dans la sphère sauvage et ce qui se passe aujourd'hui avec nous. Probablement, leur proximité avec les humains pourrait expliquer une partie des mauvaises surprises sanitaires comme celle dont nous parlons tant depuis 2020.

3. Exemples

Le premier exemple est celui d'une maladie à vecteur, qui n'est donc pas transmise directement de malade à malade. Il y a dans ce cas-là une tique qui fait le lien entre des personnes ou des êtres vivants, des mammifères et des oiseaux, surtout des mammifères, sains, et des êtres vivants malades. Une bactérie est la responsable de la maladie de Lyme. C'est une borréliose. Le schéma ci-dessous explique avec les flèches le cycle naturel de la maladie sans intervention, sans participation et sans contamination des êtres humains. Ca se passe finalement entre les tiques avec les œufs, les larves, les nymphes, et les adultes. Les tiques ont trois stades de développement et chaque stade a un seul repas sanguin. Les larves se nourrissent une fois, elles tombent, elles muent, puis elles deviennent nymphe avec un repas, et enfin pareil pour les adultes. Les humains sont en dérivation anecdotique sur le schéma. Le seul problème, c'est que comme c'est nous et que ça nous concerne, on essaie d'empêcher cela. Le réservoir de ces bactéries sont les tiques.

Les tiques se nourrissent sur un certain nombre de mammifères et en fonction de la densité de ces mammifères autour de la sphère dans laquelle habitent les humains, on aura ou pas une amplification et donc une augmentation des risques de transmission depuis le réservoir que sont les tiques vers les humains. On sait que les rongeurs, par exemple, sont très propices pour l'alimentation des larves et des nymphes de tique, que les cervidés sont également extrêmement propices pour l'alimentation des nymphes et des adultes de tique. En fonction des densités de ces différentes espèces, on pourra avoir plus ou moins de risques de contamination des humains. Si on veut maîtriser et diminuer le nombre de cas qui apparaissent chez les humains, il faudra jouer sur l'aménagement du territoire et le rendre plus ou moins favorable d'abord aux tiques et également aux ongulés et aux rongeurs. Par exemple, des études montrent que plus les carnivores sont présents, plus la pression de prédation sur les rongeurs est grande, plus le risque de transmission de la maladie aux humains est faible.

Un autre exemple porte sur une maladie que tout le monde connaît. C’est la grippe qui est liée à des virus influenza. Sur la figure ci-dessous, vous avez le cycle avec les oiseaux sauvages qui est le cycle ancestral dans lequel se trouvent tous les virus connus influenza. Vous voyez qu'entre les oiseaux sauvages et les humains, vous trouvez les animaux domestiques. A nouveau, ce qui fait le lien entre les réservoirs sauvages et la faune sauvage au sens large, y compris les microorganismes qu'elle héberge, ce sont nos animaux de compagnie ou d'élevage qui sont à côté de nous. C’est là que se trouvent les probabilités de transmission entre l'extérieur, le sauvage, et l'humain. Ce ne sont pas les animaux sauvages en tant que tels qui représentent un risque pour les êtres humains. Le plus souvent, l'intermédiaire et le danger est lié à la présence et à la proximité avec les animaux d'élevage.

Pour les gens qui s'intéressent à la virologie des virus influenza, c'est un virus ARN chez lequel l'ARN est coupé en 8 segments indépendants. Il se peut qu'un animal soit contaminé par plusieurs souches de virus différentes et dans la multiplication virale du virus dans les cellules de cet animal, il peut y avoir des recombinaisons. Le virus qui va sortir peut être un virus dont l'ARN mélange plusieurs segments de plusieurs souches virales. C'est ce qui explique, à chaque année, à chaque saison, que le virus de la grippe soit différent des précédents. Il peut évoluer naturellement par mutation, mais également par recombinaison. Ce qui explique la difficulté d'avoir, pour l'instant, un vaccin universel. Il faut refaire en permanence, tous les ans, des nouvelles souches de virus.

4. Conclusion

Si on a beaucoup parlé des microbes, j'aimerais quand même rappeler que l'espèce humaine, dans toutes ces histoires-là, n'est pas simplement victime. Ce n'est pas "On n'a pas de chance", "C'est la fatalité", "On a été attaqués par des méchants microbes qui nous veulent du mal". Nous sommes parfois malades, et c'est très désagréable. Mais en même temps, nous sommes acteurs dans l'histoire de ces maladies. Imaginez qu'au début de l'année 2020, avant qu'on parle de Covid, il venait toutes les semaines 90 vols commerciaux d'avions, 200-300 passagers, depuis les différents aéroports de Chine jusqu'à Paris-Charles-de-Gaulle. C'est quand même assez considérable. En 2019, dernière année « normale », on estime que les avions, sur Terre, ont transporté, autour de la Terre, 4 milliards de passagers alors que la population humaine totale est d'à peu près 7,5 ou 7,6 milliards d'individus. Comment pouvez-vous imaginer que dans ces conditions-là, on n'offre pas la planète à n'importe quel microbe qui débarque chez quelqu'un. A Wuhan, vous avez le fameux marché où on vend sans doute des animaux un peu bizarres de différentes régions du monde, et vous aviez un aéroport international. Dans la même journée, une personne pouvait traverser le marché, croiser un animal et donc un virus, prendre l'avion et être quelques heures plus tard à l'autre bout du monde. C'est tout ce qu'il faut pour les virus pour, à partir d'une émergence qui est vraiment l'accident, l'étincelle, devenir un incendie. Cet incendie, c'est nous qui avons créé les conditions de son développement. Le virus fait au départ l'étincelle. Mais si on n'est pas capables de le repérer et de l'éteindre tout de suite, avec nos avions, avec nos moyens de transport, avec nos échanges, la planète est aux virus.