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Description

Florence Burgat, directrice de recherche à l'INRAE, propose dans cette vidéo une réflexion philosophique sur notre relation aux autres animaux. S'appuyant sur ce que nous ont appris les travaux de recherche de ces dernières décennies sur les animaux, elle questionne le droit que nous nous donnons à ranger ces animaux parmi les choses ou encore la possibilité légale de les faire souffrir. Enfin, elle pose la question fondamentale de savoir de quoi serions-nous privés aujourd'hui si nous cessions de mettre à mort des animaux.

Objectif d'apprentissage :

- Avoir une réflexion philosophique sur notre relation aux autres animaux et se poser la question de savoir de quoi serions-nous privés aujourd'hui si nous cessions de mettre à mort des animaux.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
  • Paternité
Mentions Licence
  • Philosophie
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Thèmes
  • Ecosystèmes et biodiversité
  • Éthique et responsabilité environnementale
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
éthiqueProtection des espèces animalesrelation homme-animal
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Contributeurs

Burgat Florence

INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement

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Florence Burgat, Directrice de recherche à l'INRAE

Parler des autres, de nous, et des autres animaux, implique que l'homme est inclus dans la série animale. Il ne s'agit pas, en disant cela, de rabaisser son statut, ni d'abaisser le statut des animaux, mais de nous interroger sur le critère qui permet de penser cette communauté des humains et des animaux. Il s'agit de la sensibilité. À cet égard, j'aimerais citer une phrase très importante de Jean-Jacques Rousseau. En 1755, il écrit : "Il semble, en effet, que si je suis obligé de ne faire aucun mal à mon semblable, c'est moins parce qu'il est un être de raison que parce qu'il est un être sensible ; qualité qui, étant commune à la bête et à l'homme, doit au moins donner à l'une le droit de ne pas être inutilement maltraitée par l'autre".

Il ne s'agit pas ici de nier les singularités de chaque espèce. L'humain possède des singularités, mais au même titre que chaque espèce animale. Ces singularités peuvent être naturelles, anatomiques dans les façons de vivre ; elles sont aussi culturelles. Ces spécificités culturelles ne concernent pas simplement l'espèce humaine, les éthologues ont montré, depuis les années 60, qu'il y avait des comportements culturels chez les espèces animales, en particulier lorsque les individus sont marqués, par rapport aux sociétés d'insectes par exemple. Les animaux ont des comportements individués, ils ont des personnalités, ils ont une vie psychique donc un vécu, une biographie propre ; ils ne sont pas identiques les uns aux autres.

Tous ces éléments sont évidemment très importants, concernant la question de savoir comment nous devons les traiter, quelles relations nous devons entretenir avec eux. Parmi les spécificités humaines, il y a, bien sûr, le pouvoir scientifique et technique que l'humanité a développé au long de son histoire, et qui lui permet aujourd'hui d'exploiter les ressources naturelles, et les animaux. Est-ce qu'il ne s'agit pas tout simplement d'un droit du plus fort ? Qu'est-ce qui nous donne cette supériorité meurtrière sur le reste du monde vivant ?

Le problème le plus important que nous devons affronter est celui-ci : le droit à ranger les animaux parmi les choses, donc nous les traitons comme s'ils étaient des choses. Nous les réduisons en effet à l'état de choses, ce sont des matières premières, des ressources. Or, nous savons pertinemment, et nous n'avons pas eu besoin pour cela d'attendre les confirmations des sciences, nous savons pertinemment que les animaux ne sont pas des choses. L'expérience ordinaire que nous avons des animaux nous indique qu'en effet, ils ont des émotions, qu'ils tiennent à leur vie, qu'ils sont capables de souffrir, d'être heureux, d'avoir des liens d'affection, de mourir de chagrin. Nous savons quelle proximité il y a entre nous, et un très grand nombre d'espèces animales.

La question qui nous est posée ne concerne pas le passé. Dans son histoire, l'humanité a dû, pour survivre, recourir à la chasse, pour se nourrir, pour se vêtir ; recourir à la traction animale pour se déplacer, pour travailler la terre, pour différents usages. La donne est aujourd'hui radicalement différente. Nos capacités, précisément scientifiques et techniques, nous permettent de nous passer de toutes ces ressources animales, et nous invitent, pour des raisons écologiques, environnementales, de justice sociale, à nous passer de chair animale dans notre consommation. Les progrès de la nutrition nous permettent aussi de composer des régimes très librement. L'humanité n'a jamais été aussi libre qu'aujourd'hui de se passer des animaux en tant que ressource.

On peut aussi s'interroger sur la coexistence, dans nos sociétés, d'une éthique, d'une morale, qui nous encourage à traiter avec respect nos semblables, à éviter les actes de violence qui sont d'ailleurs réprimés par la loi, et dans le même temps, la banalisation, la normalisation, voire l'encouragement, à la mise à mort des animaux que la loi rend licite. Comment ces deux choses peuvent - elles cohabiter ? Aujourd'hui, lorsque nous nous livrons à des actes de violence ou de cruauté envers les animaux, ce sont pour des motifs futiles : "je mange de la viande ou du poisson parce que c'est bon", "je chasse ou je pêche pour me détendre", "je porte de la fourrure parce que je trouve cela joli", etc.

La question qui nous est posée aujourd'hui est celle-ci : "De quoi serions-nous véritablement privés si nous cessions de mettre à mort les animaux ? " L'évolution nous enseigne que les animaux sont sur Terre au même titre que nous, qu'ils sont eux aussi bien sûr attachés à leur vie, qu'ils ont des intérêts en propre, qu'ils souhaitent vivre d'une certaine manière, ne pas être enfermés, ne pas être mutilés, ne pas être tués. Tout cela est une sorte de destin commun dont nous devrions tenir compte.

Il semble que tous les éléments soient réunis pour que nous nous défassions de cette relation malade, qui traite les animaux comme des choses, alors que nous savons qu'ils ne sont pas des choses. Parmi les propositions que nous pourrions faire, il y aurait celle qui consiste à proposer de mettre un terme à la chasse et la pêche de loisir, à la captivité, et au dressage des animaux ; et aussi une invitation, pour le bien-être de tous et pour des raisons écologiques, à végétaliser notre alimentation