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Description

Yann Laurans, directeur "Biodiversité" à l'Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), discute dans cette vidéo des scénarios de biodiversité d'ici la fin du siècle. S'appuyant notamment sur le rapport 2019 de l'IPBES, il met en lumière les conséquences de 6 scénarios de développement sur les services que nous apportent les écosystèmes.

Objectifs d’apprentissage :
- Comprendre que le futur de la biodiversité n’est pas certain, et qu’il doit être appréhendé par des scénarios.
- Découvrir les 6 scénarios de l’IPBES (2019) de biodiversité et d’évolution des services écosystémiques.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
  • Paternité
Mentions Licence
  • Sciences de la vie
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+3
  • Bac+4
Thèmes
  • Ecosystèmes et biodiversité
  • Enjeux Climat/Biodiversité
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
biodiversitéécosystèmesagricultureagroécosystèmescénario
Définition de la biodiversité
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Les grandes crises de la biodiversité
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L'évaluation globale de la biodiversité et des services écosystémiques de l'IPBES (2019)
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La flexibilité du vivant dans les scénarios de biodiversité
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Outils et cultures chez les autres animaux
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L'Humain dans la Biodiversité
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Outils juridiques et économiques de gestion de la biodiversité
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Adaptation aux changements globaux et conventions internationales
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Les banques de développement face à l'enjeu "biodiversité"
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Les acteurs économiques et les acteurs de l'innovation face à l'enjeu "biodiversité"
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Les acteurs de l'énergie et de l'agriculture face à l'enjeu "biodiversité"
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Huile de palme, les clés d'un approvisionnement durable
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Associations, mobilisations et biodiversité : entre institutionnalisation et nouvelles formes de contestations
Associations, mobilisations et biodiversité : entre institutionnalisation et nouvelles formes de…
Les mobilisations urbaines environnementales
Les mobilisations urbaines environnementales
Les acteurs de l'adaptation aux changements globaux
Les acteurs de l'adaptation aux changements globaux
La modélisation d'accompagnement pour accompagner la dynamique de biodiversité
La modélisation d'accompagnement pour accompagner la dynamique de biodiversité
La mise en discussion des enjeux de la biodiversité
La mise en discussion des enjeux de la biodiversité
Contributeurs

Laurans Yann

IDDRI (Institut du développement durable et des relations internationales)

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Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC UVED «Biodiversité et changements globaux ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.

Les avenirs possibles de la biodiversité

Yann Laurans
Directeur "Biodiversité" à l'IDDRI

Le problème majeur qui se pose à la biodiversité est le changement d'occupation des sols planétaires associé à la surexploitation des ressources naturelles comme par exemple le poisson, les minerais ou le bois. Du coup, pour réfléchir à l'avenir de la biodiversité, les scénarios pertinents sont des scénarios qui portent sur ces sujets, en particulier sur l'expansion agricole. Comment est-ce que l'agriculture va prendre de la place dans les décennies et le siècle qui viennent ? Comment les prélèvements vont s'accentuer ? Il faudra prendre en compte les facteurs dont j'ai parlé mais aussi la pollution, le changement climatique, etc.

1. Le scénario tendanciel

On va examiner pour commencer les scénarios d'évolution tendancielle de l'occupation de la planète par l'agriculture avec, ici, une recherche qui synthétise des publications et des scénarios qui globalisent six grands scénarios mondiaux. Ils disent d'une part : "Voilà quelle est l'extension de l'agriculture en 2000, à peu près. Selon ces modèles, on va simuler l'évolution de l'agriculture d'ici la fin du siècle, selon six scénarios et dix décennies." Ca va donner la carte ci-dessous, qui donne la manière dont, en théorie, à la fin du siècle, la planète sera occupée par l'agriculture si rien ne change. On voit que, de manière tendancielle si rien ne change, à la fin du siècle, il ne restera quasiment plus de grands espaces forestiers en particulier. Vous voyez que, même en Amazonie, il restera des espaces mais qui seront assez faibles. Le bassin du Congo sera entièrement agricole, lui aussi, ainsi que toute l'Asie, y compris l'Asie du Sud-Est et son grand massif forestier.

Ça, c'est le scénario tendanciel qui explique, d'ailleurs, la prédiction qu'ont retenu les titres des journaux de l'IPBES qui disaient qu'on pourrait avoir jusqu'à un million d'espèces menacées d'ici la fin du siècle, ou peut-être même avant, du fait, en particulier, de cette croissance un peu business as usual de l'évolution de l'agriculture.

2. Les 6 scénarios alternatifs

Ce n'est pas sûr que la planète va rester à l'avenir comme elle est aujourd'hui et que les tendances vont se prolonger sans changement. On est à-peu-près certains que demain ne sera pas comme aujourd'hui mais selon quelles variations et quelles possibilités ? C'est quelque chose qui a été étudié par le même rapport de l'IPBES sur lequel je vais m'appuyer pour vous présenter une recherche en particulier qui fait la synthèse de grandes visions de l'avenir possible. Il y a six visions de mondes possibles, à l'avenir, selon six grandes hypothèses de changement.

  • La première vision est une sorte de vision de référence, le business as usual, c'est-à-dire la situation tendancielle avec juste l'augmentation de la démographie. Mais on ne change rien au système actuel.
  • La deuxième vision est appelée l'optimisme économique ou technologique. Elle suppose qu'on résout nos problèmes grâce à l'évolution de la technologie, de la productivité agricole, en particulier, et de tout ce qui la permet.
  • La troisième vision est appelée la durabilité mondiale. C'est l'idée qu'on mettrait en place une sorte de gouvernement mondial, qu’on renforcerait le multilatéralisme, les institutions internationales, de façon à créer une sorte de régulation mondiale de nos problèmes, et d'essayer d'arriver à les régler.
  • La quatrième vision est appelée le réformisme économique. C'est une vision alternative, avec la réforme du marché, des financements, de la finance, des règles concurrentielles, des règles du commerce.
  • La cinquième vision est appelée la compétition régionale. C'est en fait le protectionnisme, et l'idée que les grandes régions du monde, la Chine, les États-Unis, peut-être un jour l'Europe, ou l'Union africaine, se referment aux échanges, et aux influences.
  • La sixième vision est appelée la durabilité régionale. C'est l'idée que c'est à l'échelle des régions du monde qu'on va organiser la durabilité, les solutions, les changements de mode de vie, etc.

3. Scénarios alternatifs et avenir de la biodiversité

Comment ces différents scénarios vont-ils jouer sur l'avenir de la biodiversité ? Trois grandes dimensions de la biodiversité sont prises en compte.

  • La dimension matérielle, c'est-à-dire, en gros, la nourriture et l'eau.
  • La dimension immatérielle, c'est-à-dire, en gros, tout le reste comme sa beauté, sa diversité, sa richesse, etc.
  • Les services collectifs comme la prévention des inondations, des sécheresses, la résilience des communautés locales à l'égard des grands événements climatiques, la disponibilité en eau d'irrigation, etc.

Selon ces six scénarios, on va regarder comment la littérature pense que ces trois grandes dimensions de la biodiversité vont s'en sortir (figure ci-dessous).

On peut dire qu’en gros, dans le scénario business as usual, on aura à la fin une nature, des services écosystémiques et une biodiversité qui ne seront utilisés quasiment que pour produire la nourriture et l'eau. Mais tout le reste en pâtit, c'est-à-dire qu'on n'a plus de service immatériel. Toute la nature, en gros, est utilisée pour produire le soubassement matériel de l'humanité, sa nourriture, et en particulier sa viande. On fait disparaître l'ensemble de la diversité biologique et les services collectifs, aussi, pâtissent beaucoup.

L'autre scénario qui permet un certain maintien de la situation, au moins sous l'angle matériel et sous l'angle aussi de la régulation est le scénario d'optimisme économique. Il suppose en effet que la productivité permet de concentrer la production sur une partie de l'espace, ce qu'on appelle le land sparing. On partage l'espace, on le spécialise, et, du coup, on laisse de la place pour la biodiversité, pour exister à côté. Du point de vue des services immatériels de la diversité, dans ce scénario-là, on suppose qu'on peut, globalement, conserver une certaine richesse.

Le seul autre scénario qui permettrait, selon la littérature, d'obtenir un progrès, ou en tout cas une moindre dégradation sur l'ensemble des dimensions, en particulier matérielles, est le scénario de durabilité régionale. Ce scénario suppose qu'on fait évoluer nos modes de vie, nos modes de consommation, qu’on transforme notre alimentation par des actions qui sont discutées, une gouvernance discutée, à l'échelle régionale, locale. C'est le localisme.

4. Conclusion

Sur quoi va reposer l'avenir de la biodiversité ? Soit, en tendanciel, sur une poursuite de l'appauvrissement général de la biodiversité, dans l'indifférence presque totale, à moins que des conséquences matérielles se manifestent et fassent que nous réagissions, ce qui n'est pas, pour l'instant, le cas. Soit, sur une réaction qu'on pourrait appeler techniciste, à base d'amélioration technique et économique, et d'un partage net entre l'espace réservé pour l'alimentation, et celui qu'on garde pour la nature. Ou alors, troisième possibilité, vers un retour à la gouvernance et aux solutions pensées localement, régionalement, revenant sur les ressources, quelque part, locales, qu'apporte chacun des territoires.