En ligne depuis le 19/11/2014
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Description
Serge Bahuchet montre que la nature fait l'objet de différents regards et perceptions. Il retrace les grands courants scientifiques qui se sont intéressés à cela (anthropologie de la nature, ethnoécologie, etc.) et présente les principaux chercheurs s'étant penchés sur ces questions : Max Sorre, Philippe Descola, ou encore Claude Lévi-Strauss.
Objectifs d'apprentissage :
- Comprendre les différents regards et perceptions portés sur la nature
- Connaître les grands courants scientifiques et les principaux chercheurs en anthropologie de la nature en ethnoécologie
État
- Labellisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
- Paternité
Mentions Licence
- Sciences de l’Homme, Anthropologie, Ethnologie
Nature pédagogique
- Cours
Niveau
- Bac+2
- Bac+3
Types
- Grain audiovisuel
Contributeurs
BAHUCHET Serge
MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle
Ce document est la transcription révisée et chapitrée d’une vidéo du MOOC UVED « Biodiversité ». Ce n’est pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots et l'articulation des idées sont propres aux interventions orales des auteurs.
Une nature ou des natures ? Introduction à l’anthropologie de l’environnement et à l’ethnoécologie
Serge BAHUCHET, Professeur du MNHN
L'idée de nature est-elle naturelle ? Est-ce que toutes les sociétés du monde on les mêmes conceptions de la nature ?
1. Différentes manières de voir la nature
La majorité des plantes et des animaux sont des espèces qui sont apparues à la surface de la Terre longtemps avant l'espèce humaine. On peut donc considérer qu'elles sont naturelles. Elles ont une existence intrinsèque qui ne doit rien à l'existence de l'homme. La majorité des forêts aussi, du moins en apparence car leur structure doit beaucoup aux activités des hommes qui coupent des bois et qui replantent des jeunes arbres. C’est le cas aussi de nombreux paysages qui résultent de l'action d'innombrables générations de paysans qui ont transformé la végétation, qui ont introduit des espèces, qui l’on déplacée et qui ont donc façonné ces écosystèmes. Pour ces paysans, ces espaces sont naturels. Au contraire, pour l’écologue, qui n'y prêtera qu'un intérêt distant, ils sont presque artificiels. Pour l’ethnoécologue, enfin, ces espaces qu'il va appeler des agroécosystèmes sont l'objet même de son travail quotidien. On voit donc que dans une communauté, différents acteurs vont avoir différentes perceptions, différentes compréhensions de l'espace naturel.
2. L’ethnoécologie
C'est une vieille interrogation, depuis l'Antiquité, que celle qui consiste à se demander si le climat influence les sociétés humaines, les civilisations. Plus proche de nous, les géographes ont posé les bases de notre réflexion, tel Vidal de la Blache qui insiste sur les possibilités que l'écologique et le milieu naturel offrent aux sociétés humaines, ou Max Sorre qui en détaillant les contraintes du milieu en termes d'approvisionnements alimentaires ou en termes de maladies va concevoir l'idée d'une écologie de l'homme.
Mais, dans le domaine de l'ethnologie, ce sont les anthropologues américains qui ont un apport décisif en examinant plus précisément les relations entre différents types de sociétés dans leurs écosystèmes, avec leurs techniques et leurs modes de production. On doit à l'anthropologue américain Conklin qui travaille aux Philippines, d'avoir inventé le mot ethnoécologie, désignant ainsi une forme d’analyse des sociétés qui prend en compte leurs pratiques, leurs pensées et leur vocabulaire et leur classification.
En France, au Muséum d’Histoire Naturelle, des agronomes botanistes développent l’ethnobotanique en insistant sur le fait qu'à travers l'étude des relations des hommes avec les plantes, ce que l'on recherche c’est les relations des hommes entre eux. Jacques Barrau introduit l’ethnoécologie telle qu'elle est développée par Conklin, nous l’apporte et développe donc une recherche des sociétés humaines, de leurs pratiques en prenant en compte leurs connaissances sur le milieu naturel.
Parallèlement, au Collège de France, l'inventeur de l'anthropologie structurale, Claude Lévi-Strauss va diffuser la notion de science du concret qui caractérise les sociétés à tradition orale. Son successeur, Philippe Descola, développe une anthropologie de la nature qui analyse les discontinuités entre l'homme et les autres êtres vivants et qui cherche à mettre en évidence les grands types de pensée, qui sont communes à travers l'humanité représentant les relations entre l'homme et l'environnement qui l'entoure.
3. Conclusion
On voit donc que chaque société humaine a sa propre conception de la nature. D'une part, la nature et l'environnement sont interprétés, pensés, et donnent lieu à des représentations : c'est l'objet de l'anthropologie de l'environnement. En même temps la biodiversité ordinaire qui est le support de l'existence des sociétés humaines est l'objet des recherches de l’ethnoécologie qui étudie la nature telle qu’elle est pensée et telle qu'elle est vécue par les sociétés humaines.