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Description

Les découvertes scientifiques de ces dernières décennies ont changé notre regard sur les autres animaux. Il en découle des questionnements sur nos relations avec eux, aujourd'hui et demain. Ce parcours vous apporte des repères pour vous permettre de vous situer sur ces questions de plus en plus discutées et débattues.

Mobilisant une grande diversité d'experts, issus d'horizons variés, il est organisé autour de trois axes :

  • Les animaux : approches des sciences biologiques, humaines et sociales
  • Des animaux et des humains : représentations d'hier et d'aujourd'hui
  • Vivre demain avec les animaux

Deux niveaux de difficulté sont proposés selon les contenus de ce parcours : le niveau "Débutant" s'adresse aux apprenants de niveau Bac à Bac+3 (Licence), tandis que le niveau "Approfondi" est plutôt destiné aux apprenants de niveau Master et +.

Objectifs d'apprentissage : 

- Savoir ce qu'est un animal.
- Situer l’humain par rapport aux autres animaux.
- Comprendre l'évolution de notre regard sur les autres animaux.
- Mieux appréhender la relation des humains aux autres animaux.
- Mieux comprendre ce dont les autres animaux sont capables : pensée, empathie, intelligence, communication,...
- Situer vos connaissances par rapport à un sujet de société complexe et controversé.
- Avoir un point de vue et des éléments de compréhension pour pouvoir mieux orienter vos réflexions et vos échanges.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
  • Paternité
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
  • Bac+4
Thèmes
  • Ecosystèmes et biodiversité
Types
  • Parcours thématique
Mots-clés
anthropologieéthologierelation homme-animalbien-être animal
  • Préserver la biodiversité demain
  • Biodiversité et santé, amies ou ennemies
  • One Health, une nouveauté ?
  • Retour sur une expertise en sciences humaines et sociales sur le retour du loup en France (2017)
  • S'inspirer du vivant
  • Introduction à l'éthique animale
  • Introduction au droit animal
  • Bien-être animal : les associations comme acteurs du changement politique
  • Vivre demain avec les autres animaux : le témoignage d'un député français
  • Les relations humains-prédateurs en France
  • Quelle valeur donner aux animaux vivants ?
  • Intégrer l’animal et l’éthique animale à l’école
  • Éducation à et conservation de la biodiversité : le rôle des parcs zoologiques
  • Nous et les autres animaux demain : approche philosophique
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Christophe Degueurce, Directeur de l’École nationale vétérinaire d'Alfort

Aujourd'hui, on parle beaucoup de santé globale. On dit en anglais "one health" : une seule santé. Santé humaine, santé animale, santé environnementale, ce qui comprend les végétaux.

La question c'est de savoir si c'est vraiment nouveau.

Existe-t-il un vrai concept "one health", novateur, ou cette idée prend-elle ses racines plus profondément ? On va essayer de répondre à ces deux questions, l'origine, et ensuite pourquoi, finalement, on en est arrivé à potentiellement remobiliser un concept ancien.

D'abord, la première certitude qu'on peut avoir est que c'est presque aussi vieux que l'humanité. Les cultures humaines ont l'habitude de penser du point de vue de l'analogie : elles mettent en relation les choses entre elles, des choses très différentes. Un exemple type, c'est le rouge et le cœur, le feu et la colère, toutes ces choses-là. Et finalement, l'humanité a pris l'habitude, historiquement, de raisonner par analogie, et même de placer de la logique dedans, d'enchaîner des faits. Un exemple extrêmement marqué est l'histoire de la médecine vétérinaire.

Pour évoquer ce concept "one health" et les idées anciennes, il faut revenir aux fondamentaux, mobiliser les noms des praticiens, des grands théoriciens de l'Antiquité, par exemple Hippocrate, Aristote, ou encore Galien. Ces gens-là pensaient le monde complètement différemment, et ils ont eu une influence majeure sur notre société. À la Renaissance, au siècle de l'humanisme, ils ont été les mentors, les maîtres à penser, des révolutions scientifiques et culturelles qui ont marqué cette époque. Comment voyaient-ils les corps ? Pour eux, chaque corps était composé d'éléments : ce sont, disaient-ils, des atomes d'essence, des particules d'environnement, de l'air, de l'eau, du feu, de la terre.

Et ces éléments qui constituaient les corps, quels qu'ils soient, vivants et non vivants, avaient des qualités : ils étaient chauds ou froids, ils étaient secs ou humides. Et ces qualités, lorsqu'on les assemblait, formaient des composés que l'on appelait des humeurs. Par exemple, typiquement, le feu, c'est assez logique, était chaud et sec. Donc quand on assemblait ces éléments, on formait quatre humeurs.

Et ces humeurs sont restées dans notre parole quotidienne. Par exemple, on connaissait le sang, on connaissait la bile, qu'on appelait la colère, et vous connaissez ce terme : il est de tempérament bilieux, de tempérament colérique. Ou alors on pouvait être atrabilaire, ou mélancolique, c'est des synonymes. On pouvait être pituiteux, ou flegmatique, donc vous voyez que ces termes de flegme, de mélancolie, de colère, sont restés, ou de feu, de sanguin, pardon, sont restés dans nos expressions classiques. Et donc finalement, on parle aujourd'hui encore, c'est une réminiscence de la plus haute Antiquité, de tempérament bilieux, de tempérament mélancolique.

Alors typiquement, les anciens, à la Renaissance, mais durant l'Antiquité également, pensaient l'homme en fonction de cette prédisposition. Un homme flegmatique avait une face blanche, des cheveux décolorés, un corps adipeux, mou. Évidemment, cet homme, qui tenait du flegme, c'est-à-dire du froid et de l'humide, était marqué du point de vue de la pathologie par une tendance à avoir des œdèmes et des tumeurs.

Mais chez les animaux, c'était pareil. Le cheval pouvait être flegmatique : il était gris laiteux, comme l'homme était blond et pâle de peau. Il était gras et sans entrain, c'était un cheval qu'on ne voulait pas acquérir. En somme, les hommes et les animaux étaient de même nature.

Avec une différence quand même : au XVIe siècle, qui était un siècle croyant, un siècle chrétien, l'homme était fait à l'image de Dieu, donc il était forcément d'un accomplissement supérieur aux animaux. Je reprends ici cette phrase d'Ambroise Paré : "L'homme tout seul a en soi tout ce qui peut être excellent entre tous les autres animaux", les autres animaux, donc l'homme est dans les animaux, "et plus parfait que nul d'eux, puisqu'il a été fait à l'image de Dieu son créateur".

Alors on peut se poser la question : est-ce que les plantes également étaient douées de ces qualités, est-ce qu'elles étaient faites des mêmes composés que les animaux ?

Et la réponse est oui : on avait des plantes flegmatiques, typiquement toutes les plantes qui contenaient de l'eau, les pêches, les champignons comestibles, qui rendaient beaucoup d'eau, les melons, le concombre... Tout ça relevait du flegme.

Il est évident qu'un homme flegmatique ne devait surtout pas consommer des aliments qui allaient renforcer cette complexion. On peut, juste pour frapper les esprits, opposer ça par exemple au tempérament de feu, typiquement à l'ail et au poivre, qui brûlent.

Donc l'homme, les animaux, ou les animaux non humains, les plantes, étaient vus selon une seule vision : ils étaient faits de particules d'environnement. Et il y avait donc une interdépendance de tous les corps vivants avec l'environnement. En gros, on disait cette phrase, qui était très classique : le macrocosme, c'est-à-dire l'univers, interagit avec le microcosme, c'est-à-dire l'individu. Ce que je veux vous dire, c'était que tout était lié, et que ces choses avaient des résonnances dans la vie quotidienne des gens.

Par exemple, si on prend le grand architecte-ingénieur Vitruve, qui a publié "De architectura" juste au tournant de notre ère, et bien il utilisait les animaux pour les placer sur des pâtures. S'ils ne tombaient pas malades, alors le site était propice à la construction d'une ville, ou d'un camp militaire, et donc on utilisait cette idée que tout était dans tout.

Finalement, ce qui a marqué une rupture forte, c'est le développement des sciences, des approches scientifiques. La découverte de l'anatomie, pourtant, s'est faite en grande partie chez les animaux, pour Vésale. La découverte de la physiologie, avec Albrecht von Haller, avec tous les grands physiologistes du XVIIIe puis du XIXe siècles, la physiologie expérimentale de Claude Bernard, de François Magendie, les travaux de Pasteur, chimiste, associé à Émile Roux, médecin, et à Edmond Nocard, vétérinaire, témoignent de cette coalescence des savoirs et de l'idée qu'on se faisait du monde vivant.

Finalement, ce que j'ai voulu vous dire, c'est que ce concept "one health" est tout sauf nouveau. Finalement, pourquoi en est-on arrivé à s'interroger, à le pousser du point de vue de la communication et de la politique ? Il y a plein d'hypothèses, mais la plus vraisemblable est qu'autrefois, au siècle d'Érasme, un homme pouvait emporter à peu près toutes les connaissances de son temps : il pouvait être naturaliste, philologue, philosophe, théologien. Aujourd'hui ce n'est plus possible, et finalement, l'hyperspécialité, liée à la profondeur des connaissances, a fabriqué des fonctionnements en silo : tel spécialiste approfondit énormément telle notion. Et finalement, ces spécialistes, l'enjeu, c'est de les faire parler non pas entre eux, ça c'est une tendance naturelle, mais de faire parler les spécialités entre elles. Et le concept "one health", c'est simplement dire tout est dans tout, comme on le sait depuis la plus haute Antiquité, et il faut que les gens se parlent.
 

Contributeurs

BOEUF Gilles

Sorbonne Université

Dumez Richard

MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle

Krief Sabrina

MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle

Huchard Elise

CNRS - Centre National de la Recherche Scientifique

Saint-Jalme Michel

MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle

Sueur Cédric

Université de Strasbourg (UNISTRA)

Lecointre Guillaume

professeur , MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle

Brunois-Pasina Florence

CNRS - Centre National de la Recherche Scientifique

Roulot Justine

Ministère de la transition écologique

Tavernier-Dumax Nathalie

Université de Haute-Alsace (UHA)

Burgat Florence

INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement

Lesur Joséphine

MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle

Baratay Eric

Université Jean Moulin Lyon 3

Salines Georges

Dardenne Emilie

Université de Rennes 2

Béata Claude

Trinquier Jean

Ecole Normale Supérieure (ENS/PSL)

Césard Nicolas

MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle

Dufour Valérie

CNRS - Centre National de la Recherche Scientifique

Beauchaud Marilyn

Université jean Monnet Saint-Etienne

Delahaye Pauline

Société française de zoosémiotique

Meunier Joël

CNRS - Centre National de la Recherche Scientifique

Laffitte Béatrice

Boivin Xavier

INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement

Grandgeorge Marine

Université de Rennes

Dugnoille Julien

Université d'Exeter

Moutou François

Anses - Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

Degueurce Christophe

EnvA - Ecole Nationale Vétérinaire d'Alfort

Espinosa Romain

CNRS - Centre National de la Recherche Scientifique

Laprade Marie-Laure

Éducation Éthique Animale