En ligne depuis le 28/02/2025
0/5 (0)

Description
Sterenn Lucas, Maître de Conférences à l'Institut Agro Rennes-Angers, discute dans cette vidéo de l'information, pour les consommateurs, relative aux produits de la mer. Elle définit tout d'abord la notion d'attribut en économie, et situe les labels sur les produits de la pêche et de l'aquaculture par rapport à ce cadre-là. Puis elle analyse les arbitrages que font les consommateurs par rapport aux multiples informations dont ils disposent.
Objectifs d'apprentissage :
- Définir ce que sont les attributs, en économie, lorsqu’on parle de consommation
- Identifier les principaux labels qui portent sur les produits de la pêche et de l’aquaculture
- Expliquer les arbitrages qui sous-tendent, du côté des consommateurs, l’achat de produits de la pêche et de l’aquaculture plus durables
État
- Labellisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Partage des conditions à l'identique
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
Mentions Licence
- Economie
Nature pédagogique
- Cours
Niveau
- Bac+2
- Bac+3
Objectifs de Développement Durable
- 12. Consommation et production responsables
- 14. Vie aquatique
Thèmes
- Alimentation
- Ecosystèmes et biodiversité
Types
- Grain audiovisuel
Mots-clés
Contributeurs
Lucas Sterenn
Maître de Conférences , Institut agro Rennes Angers
Ce document est la transcription révisée, chapitrée et illustrée, d’une vidéo du MOOC UVED « L’Océan au cœur de l’Humanité ». Ce n’est pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots et l'articulation des idées sont propres aux interventions orales des auteurs.
Produits de la mer durables : quel rôle de l'information ?
Sterenn Lucas, Maître de Conférences à l'Institut Agro Rennes-Angers
1. Contexte
Les produits de la pêche et de l'aquaculture commercialisés avec des allégations de durabilité, c'est-à-dire avec une information sur leur dimension environnementale, sont en augmentation en Europe, avec une tendance plus marquée dans les pays d'Europe du Nord. Il y a des contenus hétérogènes vis-à-vis de cette dimension environnementale avec des différences entre les espèces.
La mise en avant de cette dimension de durabilité via l'utilisation de labels, par exemple, place les questions environnementales en concurrence avec d'autres attributs pris en compte par les consommateurs tels que le prix, la santé ou les attributs intrinsèques du produit, c'est-à-dire les attributs qui sont spécifiques à lui-même en tant que tel comme le filet, pavé, surgelé, ou bien l'espèce.
2. La notion d’attribut
Dans le cadre des produits de la pêche, les dimensions environnementales ne peuvent pas être évaluées par le consommateur. En l'absence d'informations, le consommateur ne pourra pas faire la différence entre un poisson issu d'un stock géré durablement et un poisson issu d'un stock non géré de manière durable, ou encore déterminer l'engin de pêche qui a été utilisé. Un consommateur ne pourra pas déterminer les aliments qui sont rentrés en compte dans l'élevage d'un poisson issu de l'aquaculture. En économie, on appelle cela un attribut de confiance.
Un attribut est l'ensemble des dimensions qui composent un produit : l'espèce, le conditionnement, la couleur, le prix, la quantité, etc. Quand on parle d'information au regard des attributs, on distingue trois types d'attributs : les attributs de recherche, les attributs d'expérience et les attributs de confiance.
Les attributs de recherche sont des attributs que le consommateur pourra valoriser dans son choix avant l'achat. C'est le cas du prix ou de l'espèce. Le consommateur achète un produit en connaissant ces attributs. Pas de surprise.
Pour les attributs d'expérience, le consommateur devra acheter le produit pour évaluer cette information. Pour les produits alimentaires, c'est le goût, l'odeur, la texture. Sans information supplémentaire, le consommateur ne pourra pas évaluer ces éléments avant l'achat, mais il pourra les évaluer après.
Le troisième type d'attribut sont les attributs de confiance. Pour ces attributs, le consommateur ne pourra pas les évaluer, que ce soit avant ou après achat. Par exemple, la zone de pêche est un attribut de confiance. En l'absence d'information, le consommateur ne pourra pas évaluer cet attribut, que cela soit avant ou après l'achat du produit.
Les labels sont une manière d'informer le consommateur en transformant un attribut de confiance en un attribut de recherche que le consommateur pourra valoriser avant l'achat. Il faut garder en tête que les attributs mis en avant par les labels restent des attributs de confiance et que cette notion de confiance reste importante pour que les consommateurs les valorisent.
3. Les labels
Les labels durables ont pour objectif d'aider le consommateur à consommer des produits de la pêche respectueux de l'environnement en lui permettant de prendre en compte cet attribut dans ses choix, car un consommateur ne peut pas prendre en compte une dimension qu'il ignore.
Pour les produits de la pêche et de l'aquaculture, il existe différents labels qui informent le consommateur sur l'impact environnemental du produit. Les plus importants sur le marché en volumes de produits certifiés sont les produits certifiés MSC, Marine Stewardship Council, pour les produits sauvages, et les produits certifiés ASC, Aquaculture Stewardship Council, pour les produits aquacoles. Ces deux initiatives sont des labels privés. Il existe également des labels publics, comme le label Agriculture biologique, qui peut être utilisé pour des produits issus de l'aquaculture, très développés sur le marché, ainsi que le label pour la pêche de l'État français, Pêche durable, même s'il concerne encore très peu de volumes certifiés. Ces labels sont des labels dits tripartites : ils sont portés par un organisme en charge de la définition du cahier des charges, que cet organisme soit privé ou public, un autre organisme est en charge de la certification en tant que telle et, enfin, un troisième organisme de pêche ou d'élevage va être, lui, certifié.
D'autres manières que les labels peuvent être utilisées pour informer le consommateur, comme par exemple des guides de consommation, qui donnent des informations sur la saisonnalité des espèces ou sur des listes d'espèces qu'il faut favoriser ou, à l'inverse, dont il faut limiter la consommation. Néanmoins, ces guides ne permettent pas d'avoir l'information au moment de l'achat, il faut s'être renseigné en amont. Un label, à l'inverse, permet d'avoir une information sur l'impact environnemental du produit au moment où le consommateur fait son choix. En effet, c'est au moment de prendre une décision d'achat que les consommateurs évaluent les attributs des produits pour orienter leur décision en analysant l'importance de chacun.
4. Quelles stratégies de consommation ?
Les consommateurs ont besoin d'être informés par rapport à ces différents attributs. Ils cherchent ainsi une combinaison optimale de caractéristiques qui va maximiser leur satisfaction tout en prenant en compte le prix des produits sur le marché. Ainsi, les attributs rentrent en concurrence dans le processus décisionnel et les consommateurs sont amenés à faire des compromis entre tel ou tel attribut. Ces compromis incluent notamment que l'attention portée aux questions environnementales va rentrer en balance avec d'autres dimensions du produit.
Les motivations qui influencent ces choix dépendent de la nature de chaque attribut. Certains reposent davantage sur des motivations égoïstes, comme les aspects de praticité, les aspects nutritionnels ou le prix. Ces dimensions vont directement impacter la satisfaction du consommateur. À l'inverse, d'autres dimensions, comme le commerce équitable ou certaines dimensions environnementales sont liées au degré d'altruisme des individus. Si un dommage environnemental ne m'impacte pas directement, comme par exemple l'état d'un stock de poissons, je vais devoir faire preuve d'altruisme, c'est-à-dire faire un choix désintéressé, pour prendre en compte cette dimension dans mon choix de consommation.
5. Perspectives
Un élément fondamental pour la prise en compte de ces dimensions, c'est que le consommateur doit être informé de l'impact environnemental de sa consommation. Il ne peut pas prendre en compte quelque chose qu'il ignore. Il faut donc l'informer, mais la multiplication de l'information peut complexifier la prise de décision et, finalement, être contreproductive.
Nous avons aujourd'hui une multiplication des labels ou des sources d'information sur les dimensions environnementales, mais également sur d'autres dimensions, comme la dimension santé, avec le Nutri-Score, ou bien encore sur des aspects économiques. Tout cela va complexifier la prise de décision, et comme ces dimensions sont des attributs de confiance, nous allons, en plus, avoir la question de confiance vis-à-vis de l'organisme de certification qui rentre en compte.
Si je ne comprends pas l'enjeu environnemental et que cette information m'est donnée en plus d'autres informations que je vais considérer également comme importantes, et que je ne connais pas bien ou que je n'ai pas de confiance vis-à-vis du label, il y a peu de chances que j'utilise cette information dans mon processus d'achat.
Il est donc fondamental, bien avant que le consommateur arrive en poissonnerie ou en magasin, d'augmenter les connaissances globales sur les enjeux environnementaux liés aux produits de la pêche et de l'aquaculture, pour permettre au consommateur de plus facilement prendre en compte ces dimensions.
Il faut également simplifier cette information en limitant la multiplication des labels qui portent sur la même dimension. La question d'un label unique agrégeant plusieurs dimensions, environnement, santé, économie, se pose d'un point de vue du consommateur, même si elle pose des questions complexes dans sa mise en place effective.
Enfin, au-delà de l'information environnementale au niveau d'une espèce se pose la question de la diversification des sources de protéines marines. Aujourd'hui, la consommation française de produits de la pêche repose sur quelques espèces phares. Il est important de diversifier ces espèces consommées et d'augmenter leur nombre, aller également sur des espèces moins connues mais pour lesquelles, par exemple, la pression sur les stocks est moindre. Il faut également aller vers des niveaux trophiques plus bas, comme avec des nouvelles sources de protéines marines comme l'holothurie, le concombre de mer, qui est consommé dans d'autres régions du monde, mais pas encore valorisé sur le marché français.