En ligne depuis le 09/06/2018
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Description
Question-clé à Romain Julliard, Professeur d'Ecologie au MNHN, pour la série vidéo "SocioEcoSystèmes - Ecosystèmes et sociétés, un futur partagé"
(Réduire les pressions humaines sur les écosystèmes et la biosphère - Quelles pistes pour la transition écologique?)
Conception et réalisation de cette série vidéo : Anne Teyssèdre
État
- Valorisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Partage des conditions à l'identique
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
Mentions Licence
- Sciences de la vie
Nature pédagogique
- Entretiens et témoignages
Objectifs de Développement Durable
- 14. Vie aquatique
Thèmes
- Ecosystèmes et biodiversité
Types
- Grain audiovisuel
Mots-clés
Contributeurs
Julliard Romain
MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle
Romain Julliard, professeur d’Ecologie au MNHN
Question-clé transcrite et éditée par Anne Teyssèdre
Quels indicateurs de biodiversité ? Selon quels principes de construction ?
Comment construire des mesures de biodiversité, des indicateurs, qui permettent de bien mettre en relation ces pressions qui s’exercent sur la biodiversité et son état, de telle sorte qu’on puisse vraiment parler d’un ‘bon état’ de la biodiversité, ou d’un état qui s’améliore ou se détériore ? Une des pistes est de s’appuyer sur la théorie de l’information, sur la théorie écologique : c’est de tenir compte du fait que les espèces ont des traits écologiques qui résultent de l’évolution, et que ces traits leurs permettent de s’adapter en quelque sorte à leur environnement, et que si cet environnement change, les espèces qui y sont adaptées vont modifier leur abondance, leur distribuon, leur présence. Et donc en regardant dans un cortège d’espèces, non seulement la richesse spécifique (ou d’autres mesures de diversité), mais aussi la distribution des traits écologiques, on peut construire des indicateurs qu’on peut mettre de manière beaucoup plus explicite en relation avec ces pressions.
Par exemple, en milieu marin, on peut qualifier chaque espèce de poisson par son niveau dans la chaîne alimentaire, entre les superprédateurs, les prédateurs secondaires et les poissons herbivores, ordonner comme ça les espèces de poissons le long de cette chaîne alimentaire, et calculer la composion moyenne en espèces de poissons par rapport à ce trait écologique qu’est le régime alimentaire. C’est comme ça qu’on a déterminé un indicateur très intéressant, qui s’appelle le « Marine Trophic Index », l’indicateur du niveau trophique moyen dans un assemblage d’espèces de poissons, qu’on peut mettre directement en relation avec les pressions de pêche qui s’exercent sur ces communautés de poissons dans la mesure ou les humains préfèrent très nettement pêcher des poissons prédateurs plutôt qu’herbivores.
Et donc avec cet indicateur, on peut très facilement mesurer – il suffit d’avoir une mesure d’assemblage d’espèces et les traits écologiques qui sont relavement bien connus pour ces espèces – on peut instantanément mesurer un état de cette biodiversité qu’on peut mettre en
relation avec les pressions de pêche.
Un autre indicateur basé sur la composition en traits écologiques des espèces, c’est celui qu’on a construit pour mesurer la réponse des communautés d’oiseaux au réchauffement climaque, en qualifiant chaque espèce d’oiseau comme plus ou moins « chaude » ou « froide » en fonction de son aire de distribuon observée, les espèces méditerranéennes étant ‘chaudes’ et les espèces plutôt à affinités boréales, des espèces froides. On a un indice quantitatif pour chaque espèce et à chaque endroit, pour chaque moment ; on peut donc mesurer à partir de l’assemblage d’espèces observées un indice de « température » d’une communauté d’oiseaux, qui représente la composion en espèces « chaudes » ou « froides » de ces populations.
Ce qui est intéressant, c’est que cet indice évolue dans le temps, de manière directionnelle, vers un « réchauffement » de ces communautés d’oiseaux, qui traduit en fait une recomposition de ces communautés en faveur des espèces qui bénéficient du réchauffement climaque et au détriment de celles qui en souffrent.
Alors ce qui est intéressant, c’est de mesurer l’intensité de cette réponse et de pouvoir comparer cette intensité en foncon de l’endroit où l’on est, de comparer différentes régions ou différents types d’habitats. Par exemple, on a montré que plus l’habitat était préservé, plus les populations étaient résilientes aux effets de ce réchauffement climaque.
Pour qu’un indicateur de bon état de la biodiversité soit utile, il faut qu’on puisse le mettre en relation avec des indicateurs de pressions, par exemple l’augmentaon de la température ou les changements d’occupation du sol ; éventuellement aussi avec des indicateurs de réponses : comment les poliques sont mises en place pour contrecarrer les effets néfastes de ces pressions sur la biodiversité. Donc ça, c’est une des condions – c’est qu’on les mettent en relation. Une autre condition, c’est qu’il y ait des données disponibles. Et ça, c’est un facteur limitant aussi pour ce qui concerne la biodiversité – c’est l’accès aux données et à l’information qui permettent de produire ces indices, ces métriques et in fine ces indicateurs de biodiversité.