En ligne depuis le 19/11/2015
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Description
Dans cette vidéo, Christelle Barthe explique ce que sont les cyclones et discute des tendances passées, actuelles et à venir en lien avec le changement climatique. Elle focalise sa présentation sur le bassin indien Sud-Est et évoque les stratégies d'adaptation des populations exposées au risque cyclonique.
Objectifs d’apprentissage :
- Savoir ce qu'est un cyclone
- Appréhender les tendances passées, actuelles et à venir en lien avec le changement climatique
- Connaître les stratégies d'adaptation des populations du bassin indien Sud-Est exposées au risque cyclonique.
État
- Labellisé
Langues
- Français
Niveau
- Bac+2
- Bac+3
Types
- Grain audiovisuel
Contributeurs
Barthe Christelle
Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC « Causes et enjeux du changement climatique ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.
Cyclones tropicaux : causes, conséquences et enjeux
Christelle BARTHE
Chargée de recherche – Laboratoire de l’Atmosphère et des Cyclones
Les cyclones tropicaux, aussi appelés ouragans ou typhons, sont l'un des phénomènes atmosphériques les plus dévastateurs.
1. Formation et conséquences des cyclones
Ils se forment si les conditions nécessaires sur la température de l'océan, la stabilité, l’humidité et le vent dans la troposphère, la préexistence d'une perturbation pluvio-orageuse et un éloignement suffisant de l'Équateur sont réunies. Ils ne peuvent donc se développer que sur certains bassins océaniques pendant les étés de chaque hémisphère. Dans chacun des bassins cycloniques, l'organisation météorologique mondiale a désigné un centre météorologique régional spécialisé. Par exemple, pour le bassin indien Sud-Ouest, c'est Météo France à la Réunion qui est en charge de la veille cyclonique.
Les cyclones tropicaux peuvent être à l'origine de dégâts considérables en raison des actions parfois conjuguées du vent, de la pluie et de la mer. Les vents forts sont relativement concentrés autour du mur de l'œil et entraînent des dommages sur les bâtiments, les infrastructures et les réseaux. Les pluies torrentielles sont, elles, localisées à la fois dans le mur de l'œil et les bandes précipitantes. Ces pluies augmentent le niveau des rivières et déclenchent glissements de terrain et inondations. Quant aux basses pressions et vents forts, ils induisent des marées de tempête et de fortes vagues sur la côte qui peuvent modifier radicalement le trait de côte et les systèmes littoraux. Les bilans humains, économiques et environnementaux peuvent donc être dramatiques pour une région touchée par un cyclone. Il faut toutefois noter que les pluies cycloniques sont, pour certaines régions, une ressource en eau indispensable.
2. Activité cyclonique du passé
Dans un contexte de changement climatique, il est important d'évaluer l'évolution passée et future des conditions de formation des cyclones tropicaux et des risques associés. L'activité cyclonique est naturellement variable puisqu'elle est largement modulée par les courants atmosphériques et par des modes de variabilité climatique comme El Nino. Mais elle est aussi potentiellement impactée par le réchauffement global et les activités humaines. La détection de changements dans le comportement des cyclones tropicaux passés se heurte à la disponibilité et à l'homogénéité des bases de données. En raison des différentes techniques employées pour détecter les cyclones tropicaux, il est difficile de remonter au-delà d'une trentaine d'années soit au-delà de l’ère satellitaire. Une exception toutefois pour l'Atlantique Nord où des vols de reconnaissance avions sont opérés dans les cyclones depuis 1945. Ainsi, au-delà de 50 ans, les incertitudes liées aux changements dans les capacités d'observation ne permettent pas d'obtenir des tendances robustes. Par contre, sur les 30 dernières années, les études scientifiques ont mis à jour des tendances relativement fiables.
Par exemple, à l'échelle globale, le nombre de cyclones tropicaux est constant avec 90 systèmes par an. D'autre part, la position où le système atteint son intensité maximale serait déplacée vers les pôles. Cette tendance pourrait être liée à l'expansion des tropiques en lien avec le changement climatique. Dans le bassin Atlantique Nord, la fréquence des systèmes les plus intenses aurait augmenté et serait liée en partie à des forçages régionaux par les gaz à effet de serre et les aérosols. Dans le bassin indien Sud-Ouest (figure ci-dessous), on n’observe aucune tendance pour le nombre de tempête, le nombre de cyclones ou l'ensemble des systèmes par saison depuis les années 80. L'anomalie normalisée de l'énergie cyclonique cumulée sur la saison qui prend en compte à la fois le nombre, la force et la durée de vie des systèmes n’affiche, elle non plus aucune tendance sur ce bassin.
3. Activité cyclonique du futur
Pour appréhender l'évolution future de l'activité cyclonique dans un contexte de réchauffement climatique, on se base sur des résultats de simulations climatiques utilisant différents modèles pour différents scénarios d'émissions de gaz à effet de serre. Comme la résolution des modèles de climat est trop basse pour interpréter des changements dans les trajectoires et les caractéristiques des cyclones, ce sont les tendances dans des indices de cyclogenèse qui sont analysés. Ci-dessous, l’indice CYGP est basé sur des paramètres de grande échelle comme le cisaillement de vents, la vorticité et les précipitations convectives qui interviennent plus ou moins directement dans la formation des cyclones.
Un nombre de cyclones équivalents par point de grille est ensuite déduit de cet indice et représenté ci-dessous. Sur ces bases, le cinquième rapport du GIEC conclut que globalement, le nombre de cyclones tropicaux va probablement baisser ou rester inchangé mais le vent maximum et les précipitations cycloniques devraient croître. Par contre, vraisemblablement, l’impact du changement climatique sur les cyclones tropicaux variera selon les régions. Si on prend l'exemple du sud-ouest de l'océan Indien, à l’horizon 2080, la moyenne du vent zonal réalisé à partir de 13 modèles montre une anomalie positive du vent zonal aux tropiques, synonyme d'un ralentissement des alizés. L'anomalie positive du vent Méridien au nord du canal du Mozambique est, elle, synonyme d'un ralentissement du flux de mousson. La combinaison de ces deux tendances pourrait affecter la position et l'intensité de la zone de convergence intertropicale et donc de l'activité cyclonique.
4. Adaptation des territoires
Si les questions générales sur la fréquence, l’intensité et les trajectoires des cyclones sont encore ouvertes, à l'échelle des territoires cette problématique se fait plus concrète. Un certain nombre de questions vont conditionner les politiques régionales sur les prochaines années et décennies. En particulier, l'urbanisation croissante au niveau des côtes augmentera-t-elle le coût des dégâts liés aux cyclones ? Le réchauffement et l'acidification des océans couplés à une augmentation du niveau de la mer mettront-ils à mal le rôle protecteur du récif corallien face aux houles cycloniques ? Et dans un contexte où les sécheresses en hiver austral seraient accrues, les pluies cycloniques seraient-elles suffisantes pour équilibrer le bilan hydrique de ces régions ? Les territoires impactés par les cyclones tropicaux vont ainsi devoir s'adapter, c'est-à-dire passer d'un territoire adapté à notre climat actuel à un territoire adapté au climat futur.
Comme une part importante des conséquences projetées du changement climatique ne sont qu'une amplification des problèmes déjà existants, une première étape efficace consiste à gérer au mieux la situation actuelle. La gestion du risque cyclonique reposant sur trois phases : prévention, gestion du risque et indemnisation, il est important de mettre l'accent sur la prévention, à savoir veiller au respect des règles de construction para-cycloniques et poursuivre la maîtrise de l'urbanisation notamment au niveau des zones exposées aux crues, glissements de terrain et submersions. Un autre point clé de la prévention est la surveillance cyclonique qui s'appuie à la fois sur des observations et sur des modèles. C'est en augmentant la densité des observations dans des bassins océaniques pauvres en observations conventionnelles et en améliorant la résolution et la qualité des modèles numériques de prévision que l'on pourra anticiper plus en amont et de façon plus fiable la trajectoire, l’intensité et les conséquences associées aux cyclones et en limiter les coûts directs et indirects. Quoi qu'il en soit, pour mieux gérer l'adaptation des territoires affectés par les cyclones tropicaux au changement climatique, la communauté scientifique doit se structurer autour de projets de recherche intégrés et se rapprocher des acteurs industriels et politiques locaux. L'objectif est de prévoir les caractéristiques des cyclones futurs avec une meilleure fiabilité afin de traduire leurs impacts sur les populations, les infrastructures, l'économie et l'environnement. Les résultats de ces études seront un outil d'aide à la décision pour les acteurs locaux afin qu'ils mettent en place une politique d'aménagement adaptée au risque des territoires en optimisant le coût économique. La réduction de la vulnérabilité et l'adaptation seront propres à chaque territoire compte-tenu des différents risques liés à la géographie, l’urbanisation, l’économie et l'écologie des sites.