En ligne depuis le 19/11/2015
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Description
Dans cette vidéo, Sebastian Weissenberger discute de l'impact de l'élévation du niveau des mers pour les sociétés humaines situées en zone côtière. Il distingue et illustre plusieurs stratégies d'adaptation de ces populations, et évoque leurs intérêts et leurs limites.
Objectifs d’apprentissage :
- Appréhender l'impact de l'élévation du niveau des mers pour les sociétés humaines situées en zone côtière
- Comprendre les intérêts et les limites des stratégies d'adaptation de ces populations.
État
- Labellisé
Langues
- Français
Niveau
- Bac+1
- Bac+2
Objectifs de Développement Durable
- 9. Industrie, innovation et infrastructure
Thèmes
- Atténuation, Adaptation & Résilience
- Les adaptations
Types
- Grain audiovisuel
Contributeurs
Weissenberger Sebastian
Professeur/chercheur associé , Université de Moncton (Canada)
Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC « Causes et enjeux du changement climatique ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.
Adaptation aux changements climatiques en zone côtière
Sebastian WEISSENBERGER
Professeur – Université de Moncton
L’augmentation du niveau de la mer représente une des conséquences les plus redoutables des changements climatiques surtout bien sûr pour les zones côtières.
1. Elévation du niveau marin
Alors pourquoi le niveau de la mer augmente-t-il ? Il y a principalement deux raisons à cela. La première est l'expansion thermique de l'océan, c'est-à-dire qu'au fur et à mesure que l'eau se réchauffe dans l'océan, elle prend un peu plus d’expansion ce qui fait augmenter le niveau de la mer. L'autre raison est la fonte des glaciers continentaux, que ce soit dans les Alpes, l’Himalaya, les glaciers des Andes ou d'Afrique, ainsi que les grandes calottes glaciaires du Groenland et de l'Antarctique ouest, qui contribue à l'augmentation du niveau de la mer. Depuis le début de l'ère industrielle, le niveau de la mer a augmenté d'environ 20 cm. On s'attend que d'ici à la fin du XXIe siècle le niveau de la mer augmente - selon les prévisions du GIEC -, d’encore 30 ou 98 cm, jusqu'à 1 m (certaines prévisions basées sur d'autres modèles avancent des chiffres un peu plus élevés jusqu'à 1 m 40).
En fin de compte, cela reste une question d'échelle de temps (figure ci-dessus), puisque l'augmentation due au réchauffement des eaux va se poursuivre pendant environ un millénaire, ce qui correspond au temps de mélange thermique des océans avec la circulation thermohaline, tandis ce que ce que la fonte des glaciers et surtout des calottes glaciaires au Groenland et en l'Antarctique ouest comprend beaucoup de phénomènes de seuils, de dynamiques non linéaires et une fois enclenchée pourrait être irréversible et se poursuivre pendant plusieurs millénaires. Donc, de toutes façons, le chiffre de 1 m va très certainement être dépassé, peut-être pas au cours de notre siècle mais des siècles à venir, il va être dépassé de loin.
2. Impacts
Qu'est-ce que cela veut dire pour les zones côtières et les communautés qui y vivent ? On observe déjà une augmentation des taux d'érosion sur beaucoup de côtes dans le monde. Sur tous les continents, on observe une augmentation de la fréquence et de l'ampleur des inondations dues à des phénomènes météorologiques extrêmes qui eux aussi ont tendance à augmenter dans beaucoup de régions du monde, notamment en mer du Nord ou dans le golfe du Saint-Laurent. Cela a plusieurs impacts. On observe aussi une submersion de plus en plus fréquente des écosystèmes côtiers comme par exemple les mangroves ou les marais salants qui se trouvent en bord de mer. C’est d'autant plus dommageable pour ces écosystèmes que le territoire côtier devient de plus en plus occupé de nos jours et cela ne laisse plus de place de recul pour les écosystèmes pour éviter l'impact des submersions. Du point de vue des communautés, il y a des endommagements d'infrastructures, comme des maisons qui sont plus fréquemment inondées et qui souffrent de l'effet du sel sur l'intérieur et l'extérieur. On observe en endommagement de routes qui doivent être réparées à grands frais voire même déplacées complètement à l'intérieur des terres. Il y aussi la question de l'intrusion d'eau salée dans les puits, dans les aquifères mais aussi sur les sols agricoles qui sont souvent situés en zone côtière. C’est ce qu'on voit par exemple au Sénégal mais aussi au Bangladesh ou dans le delta du Nil. Cela touche à la sécurité alimentaire et aussi au pouvoir d'achat ou au pouvoir économique des communautés côtières.
3. Adaptation
Qu’est-ce que les communautés côtières peuvent faire pour s'adapter à ces changements ? Il existe plusieurs stratégies que l'on regroupe normalement en trois grandes stratégies d'adaptation qui sont la protection, l’accommodement et le retrait. A ces trois, on peut ajouter un quatrième principe qui est le principe de précaution.
3.1. Protection
La protection, que ce soit à l’aide de digues, de murs, d'enrochements, est souvent le premier réflexe qu’ont les communautés côtières pour se prévenir des assauts de la mer. On voit beaucoup de côtes dans le monde, autant dans des pays industrialisés comme le Canada que dans des pays en développement comme le Sénégal, qui sont de plus en plus protégés par des enrochements. Pour certains environnements comme des grandes villes par exemple où sont concentrées des fortes populations et des biens immobiliers très importants, la protection est la seule - du moins à court terme -, la seule stratégie possible pour se protéger de la mer. Dans des villes comme New York, Londres, Venise ou des grandes villes asiatiques, on construit à coups de milliards de dollars ou d’euros ou de yens par exemple des protections côtières, des grandes digues, des barrages amovibles etc. Par contre, les protections côtières ont des limites. Beaucoup de structures qui sont construites ne sont pas vraiment adaptées aux risques en présence. Souvent, les protections côtières n'empêchent pas les inondations. Elles sont elles-mêmes inondées lors d'événements importants et peuvent aussi être endommagées lors d'événements extrêmes. On voit des murs qui tout simplement tombent sur la plage lorsque l'eau gruge la fondation de ces murs. Les protections côtières ont aussi des impacts importants sur les écosystèmes comme l'érosion des plages en aval des protections côtières. Elle est souvent nettement accélérée et on aboutit à un littoral complètement artificialisé, qui ne sert plus d'habitat aux poissons, aux oiseaux et toutes les espèces qui l’utilisaient avant. L’impact sur le paysage est aussi très important.
3.2. Accommodement
L'accommodement regroupe beaucoup de différents types d’interventions comme par exemple des changements au niveau de l'agriculture au Bangladesh où on remplace beaucoup la riziculture par de la creveticulture qui est moins susceptible à l'intrusion de l'eau salée. Au Bangladesh, on a réussi à réduire de plusieurs centaines de milliers de morts jusqu'à quelques millions de morts les dommages suite à des typhons extrêmes comme on a durant la saison des pluies, entre les années 1970 et les années 2000. On a encore le désenclavement de territoires insulaires ou péninsulaires avec le rehaussement de ponts par exemple, qui permettent de circuler entre des territoires inondés et non inondés.
3.3. Retrait
La dernière solution, qui est toujours la moins souhaitée par les populations, est bien sûr le retrait. Beaucoup d'endroits au monde, que ce soit dans le delta du Saloum, au Sénégal, sur la côte du Bénin, dans des petits états insulaires, des populations ont dû fuir la zone côtière parce qu’elle n’était tout simplement plus habitable. Par contre, il y a aussi des situations comme aux Pays-Bas où le retrait est planifié. Aux Pays-Bas, certains polders situés sous le niveau de la mer ont été zonés comme zone purement agricole ou pastorale et tous les habitants ont reçu des aides, des subventions pour aller se relocaliser dans d'autres parties du territoire moins affectées par l'augmentation du niveau de la mer et les inondations. Mais pourtant, partout dans le monde - on a vu ça à la Nouvelle-Orléans par exemple où tous les quartiers nouvellement construits au cours du XXe siècle ont été inondés tandis ce que le vieux quartier français du XVIIIe et XIXe siècle a été épargné -, on construit de plus en plus dans des zones inondables que ce soit des marais asséchés en bord de mer, des plages ou des zones de très faible élévation. C’est donc un type d'adaptation qui bien sûr n'est pas en mesure de conjuguer avec les effets attendus des changements climatiques. A ce niveau-là, il faut que les communautés côtières changent de perspectives et planifient le développement à beaucoup plus long terme pour pouvoir prévoir l'augmentation du niveau de la mer d'ici 30 à 50 ans et établir des plans d'aménagement du territoire qui en tiennent compte et ainsi agir de manière plus précautionneuse.