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Description

Dans cette vidéo, Arnaud Diemer discute de l'évolution nécessaire des modes de production et de consommation dans une perspective de développement durable. Il présente pour chacun de ces deux volets, intimement liés, quelques voies de transformation des pratiques actuelles.

Objectifs d'apprentissage :
- Comprendre l’importance de l’évolution des modes de production et de consommation pour un développement durable
- Appréhender quelques voies de transformation des modes de production et de consommation actuels.
 

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Thèmes
  • Éthique et responsabilité environnementale
Types
  • Grain audiovisuel
Développement durable : simple concept ou nouveau modèle ?
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La décroissance ou les limites du développement durable
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L'économie écologique
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Sustainability Science : de quoi s'agit-il ?
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L'économie sociale et solidaire
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Les monnaies locales
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Contributeurs

DIEMER Arnaud

UCA - Université Clermont Auvergne

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Arnaud DIEMER, Maître de Conférences – Université Blaise Pascal Clermont Ferrand 

Si le développement durable est très souvent présenté comme un concept ou un modèle socio-économique, il faut rappeler que la plupart du temps on tente de le rendre opérationnel.

Savoir comment, dans la vie de tous les jours, on peut réfléchir sur nos manières de produire, nos manières de consommer. 

Pour certains, on parle de consommation et de production durables. 

L'Europe a joué un rôle très important, la Commission Européenne depuis quelque temps parle de stratégie européenne du développement durable et de modes de production durables et de consommation durable, mais il faut rappeler également que la conférence des Nations Unies de Rio et Rio + 20, donc 92 et 2012, a réitéré son message d'aller vers un modèle où on penserait ces futurs modes de production et de consommation dans leur durabilité.

Alors, on peut s'interroger sur la véritable signification d'une telle approche, voire d'un tel modèle et comment effectivement développer sur ce modèle cette capacité à penser la durabilité.

•    Premier phénomène, c'est de concevoir que si nos sociétés s'installent dans une forme de croissance économique, dans un développement à préciser, il faut être capable de briser ce cercle vicieux entre croissance et effets négatifs de la croissance, à la fois sur les conséquences sociales - je pense à la pauvreté mais également aux inégalités¬ -, et puis sur ce cercle vicieux qui est environnemental, comment effectivement éviter une forme d'inégalité environnementale.

On s'aperçoit - on évoquait le climat -, mais qu'effectivement les changements climatiques créent aujourd'hui une catégorie nouvelle : les réfugiés climatiques, et que forcément le lien entre croissance et conséquences négatives devient l'objet de débats, l’objet de réflexions.

•    Et puis, deuxième type de questionnement, c'est qu'à travers cette recherche de nouvelles formes de production, de nouvelles formes de consommation, on cherche à comprendre la charge potentiellement viable de la planète.

 Autrement dit, que peut-on réellement produire, que peut-on réellement consommer et que peut supporter aujourd'hui la planète Terre dans ses modes de vie en société ?

Alors, il est clair que dès qu'on débat sur le mode de production le plus viable, la référence dépasse le cadre même de la production puisqu'il, vraiment, déclenche une série de questionnements sur : c'est quoi effectivement produire mais c'est quoi également travailler, c'est quoi capitaliser, à travers ce travail mais également à travers la technicité que prend notre société et une première dimension serait le questionnement de la relation au travail. 

•    Nos sociétés sont bâties sur la productivité et rappelez-vous que la France est le pays où la productivité horaire est la plus importante. 

Imaginez que renouveler ce type de productivité de manière régulière, chaque année, crée effectivement une forme de stress au travail. On a découvert aujourd'hui ce qu'on appelle les RPS (les risques psychosociaux) et on voit bien que les cadences de production interpellent sur le modèle de vie en société, le modèle de relation au travail. 

Donc comment reconsidérer ce modèle et comment redéfinir la sphère de la productivité ?
 
•    Même chose sur la question du déchet : comment recycler nos déchets dans le système de production et le débat sur l'économie circulaire.

Autrement dit, comment rompre le chaînon très horizontal où la matière rentre dans l'entreprise et ressort avec le produit défectueux ou le produit à recycler ? 

Comment penser à la base des produits qui seront recyclés à 100 % voire des produits qui pourraient copier en partie ce que l'on retrouve dans l'environnement.

On voit bien qu’ici, le lien que l'on pourrait faire entre l'économie circulaire et l'écologie industrielle : produire un autrement est une chose importante mais produire à partir des flux d'énergie et de matières qui intègrent la production et que l'on rejette vers l'extérieur est une notion importante. 

On a tous en tête qu’en physique, il y a ce qu'on appelle l'entropie, cette capacité dans la production à réchauffer l'atmosphère, à laisser partir une partie de la chaleur et on sait que cette partie-là joue un rôle important sur les gaz à effet de serre.

Donc comment réduire l'entropie qui apparaît à travers le phénomène de production ?

L'élément aussi important c'est de savoir notre nation à la matérialisation : nos sociétés se sont bâties sur une consommation de produits matériels. Comment fait-on effectivement pour se désintoxiquer de cette logique et rentrer dans un côté un petit peu immatériel ? 

•    La question des services joue un rôle important. Si vous regardez bien, un grand nombre de produits aujourd'hui sont vendus non pas sur leurs produits physiques : vous achetez un pneu non pas pour sa capacité à vous faire rouler mais parce que Michelin vous assure un service, celui de crever, d’être bien sûr réparé très rapidement. 

Donc le service peut devenir un enjeu extrêmement important dans le mode de production et bien sûr, dès que cet enjeu de dématérialisation joue un rôle important, il modifie la relation à la production.

•    C'est la même chose pour l'éco conception où on estime qu'on peut, à la base, en définissant le type de matière qui rentre dans le produit, la forme de recyclage potentielle, on peut arriver à une production entièrement recyclable, voire une production qui va effectivement reposer sur des matériaux qui sont abondants ou des matériaux qui ne reposent pas sur des conflits ouverts ou des guerres ethniques qu'on retrouve dans la plupart des pays en développement, qui sont abondants en matières premières.

•    Cette question de la production durable, vous la retrouvez également sur la consommation durable. 
 
Le débat que l'on a aujourd'hui, c'est la relation bien sûr dans ce qu'on appelle la consommation, au sens réel du terme. 

Je vous rappelle que l'INSEE aujourd'hui comptabilise la consommation comme une consommation finale, elle peut être privée ou collective. 

Ce qui signifie que lorsqu'elle est privée, elle renvoie à un lien de propriété : je consomme un bien parce que j'en suis propriétaire. 

On pourrait imaginer une consommation à partir des valeurs d'usage : je consomme le bien uniquement parce que j'en ai l'utilité, j'en ai l'usage. 

Et avoir une voiture ne serait plus posséder une voiture mais l’utiliser pour l'usage que j'en fais.

Donc la consommation peut être radicalement différente. 

Ce qu'on voit pour le Vélib d'aujourd'hui, pourrait se retrouver dans un grand nombre de produits et donc modifier la consommation.

Mais, on voit bien que cette question de réflexion sur le matériel doit être dépassée. D'autres dimensions sont fortes.

Le gaspillage (je rappelle que dans l'alimentation aujourd'hui, en France, nous gaspillons pratiquement 10 millions de tonnes par an de déchets alimentaires). On peut imaginer l'intérêt ici de faire extrêmement attention, d’être vigilant sur sa consommation, d'éviter les produits périmés, d'éviter le grand stockage que l'on fait aujourd'hui dans les réfrigérateurs, les congélateurs. 

On voit bien que le comportement des individus va jouer un rôle important. Comment modifier ce comportement ?

Et puis, si on va encore plus loin, la consommation n'est pas un acte individuel, elle devient un acte social, un acte collectif. 

Les cantines collectives, la consommation alimentaire à base effectivement de partage, de lien social.

On pourrait évoquer ici les AMAP, qui jouent un rôle très important sur la manière de refonder un lien social, dans le choix des produits, dans le choix et l'origine du producteur, voir dans le lien que l'on va établir à travers le panier que l'on va acheter, tout ceci marque bien une dimension sociale très forte et donc une forme de durabilité.

Et puis, si on pousse encore plus loin le raisonnement, on pourrait s'interroger sur l’effet saisons. 

Pourquoi consommer des produits qui ne correspondent pas à l'effet de saisonnalité ? 

Consommer effectivement des fraises en hiver, c’est intéressant si elles viennent de l'hémisphère sud, mais le temps de transport, le coût de transport est un coût qui joue énormément sur l'environnement et qui n'est pas comptabilisé. 

Or, il faudrait bien sûr jouer sur cet élément pour tout comptabiliser dans la manière de concevoir les choses et les consommer.

Enfin, peut-être deux éléments qui aujourd'hui font débat :

•    L'aspect local de sa consommation : comment jouer sur la proximité ? 

On a tous cette relation aux détaillants, au commerce de détail. 

On voit bien ici sa responsabilité : le consommateur peut faire vivre un quartier, un épicier, on va dire une maison d'alimentation locale et en tant que consommateur responsable, on peut avoir effectivement cette démarche vers cette proximité.

•    Également la santé publique : débat important puisque l'on parle d'obésité dans beaucoup de pays et donc une réflexion sur la manière de concevoir nos modes de consommation, notre rapport à la consommation, rapport bien sûr purement alimentaire et nutritionnel.

Finalement, repenser ces questions de production, voire de consommation durable, nous amène à une réflexion un peu plus large, celle de concevoir ce qu'on appellerait le producteur responsable ou le consommateur responsable.

On voit ici la difficulté, tous les paramètres qui rentrent en jeu dans cette configuration.

Imaginer effectivement un producteur responsable, ce serait imaginer une forme d'éthique des affaires. 

Qu'est-ce qu'une entreprise responsable ? Est-ce que c'est celle qui regarde ses fournisseurs, qui regarde également la place qu'occupent ses fournisseurs dans la manière de penser la production ? 

Est-ce que c'est également une logique un peu différente qui serait de réfléchir sur les valeurs, les grands principes que l'on met en place dans l’acte de produire ?

Rappelez-vous ce qui s'est passé pour la Coupe du monde 98 en France où on s'est aperçu que Nike faisait produire des ballons de football dans des lieux où on faisait travailler des enfants.

Et donc forcément ces critères éthiques jouent un rôle important à la fois en tant que consommateur et à la fois en tant que producteur.

Autre élément important, c'est le consommateur : faut-il qu'il soit partie prenante dans les débats ? Doit-il jouer un rôle important et quel rôle ? Peut-il effectivement interférer dans l'acte de consommation, peut-il jouer sur la manière de percevoir la consommation ? 

On voit bien qu'ici on rentre dans une question plus ardue, plus complexe : c'est la question d'éducation.

L'éducation au développement durable doit jouer un rôle important, elle doit modifier nos comportements. 

C'est vers ce statut que l'on doit tendre effectivement une future consommation et production durable.