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Description

Dans cette vidéo, Henry Dicks s'intéresse aux valeurs qui peuvent être associées au développement durable. Il se focalise sur trois d'entre elles : la reconnaissance, la réflexivité, la participation citoyenne, puis interroge la relation entre démocratie et développement durable.

Objectifs d'apprentissage :
- Appréhender 3 valeurs qui sont au cœur du développement durable : le reconnaissance, la réflexivité et la participation
- Faire le lien entre démocratie et développement durable.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Niveau
  • Bac+1
  • Bac+2
Objectifs de Développement Durable
  • Les 17 ODD
Types
  • Grain audiovisuel
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Contributeurs

DICKS Henry

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Henry DICKS, Chercheur postdoctorant – Université Jean Moulin Lyon 3 

On peut, en principe, distinguer les valeurs constitutives du développement durable, des valeurs associées au développement durable.

Pour ce qui concerne la sphère économique, les valeurs constitutives comprendraient par exemple la productivité, l'emploi ou bien la rentabilité.

Pour la sphère écologique, ce serait plutôt la protection de la biodiversité ou la lutte contre le changement climatique.

On peut également inclure dans la catégorie des valeurs constitutives du développement durable des valeurs qui se trouvent dans une position intermédiaire entre deux sphères comme c'est le cas chez la justice environnementale qui est à cheval entre les sphères sociales et écologiques.

Mais qu'en est-il donc des valeurs associées au développement durable ?
Le développement durable est un concept complexe et ambitieux qui vise à fournir une sorte de feuille de route pour le monde dans son ensemble d'où le fait par ailleurs qu'on en parle autant aux Nations Unies.
Compte-tenu de l'envergure du concept, comment peut-on ajouter aux valeurs constitutives des valeurs associées au développement durable sans produire une liste infinie ?

Pour répondre à cette question, je vais vous parler maintenant de quelques valeurs qui me semblent nécessaires pour l'existence et le bon fonctionnement du développement durable mais qui ne sont pas forcément présentes dans les schémas explicatifs classiques du développement durable.

•    La première de ces valeurs est la reconnaissance.

Certains discours sur le développement durable peuvent prendre une allure un peu idéaliste comme s’il pouvait y avoir un développement complètement harmonieux du monde et donc une absence de tout conflit que ce soit entre les êtres humains ou entre les êtres humains et la nature.

Mais si on prend le schéma des trois sphères : économique, sociale et écologique, il est évident qu'il existe aujourd'hui et qu'il existera encore demain des conflits entre ces trois sphères.

Les gens de droite par exemple, ont tendance à défendre et valoriser la sphère économique et ses valeurs constitutives que sont l'emploi, la croissance et ainsi de suite.

En revanche, les gens de gauche ont tendance à défendre la sphère sociale - c'est pour cela d'ailleurs qu'ils appellent souvent les socialistes -, et ces valeurs constitutives que sont la justice sociale, l'éducation, la santé, la lutte contre la pauvreté ou bien l'égalité entre les hommes et les femmes.

Enfin, les écologistes quant à eux, défendent bien évidemment la sphère écologique et ses valeurs constitutives que sont la valorisation de la biodiversité, la promotion de modes de transports doux et ainsi de suite.

Mais ce qu’il importe de reconnaître ici n'est pas seulement l'existence des trois sphères mais aussi que le développement durable constitue une sorte d'échiquier politique où telle ou telle personne peut se positionner. 

Il importe donc de reconnaître l'existence et le droit d'expression de toutes ces personnes.

Pour bien comprendre l'importance de la reconnaissance, on peut considérer un cas où elle était absente.

En 1987, Margareth Thatcher, le premier ministre de mon pays, l’Angleterre, a dit et je cite : « la société n'existe pas ». Pour elle, il n’y a que des individus et des familles. Or, même si on peut s'attendre à ce qu'une femme politique de droite défende le marché libre, l'individu et la famille, aller jusqu'à nier l'existence de la société - c'est-à-dire pour ce qui nous concerne la sphère sociale -, constitue une absence grave de reconnaissance envers tous ceux qui défendent la société ou qui en ont vraiment besoin car ils n'arrivent pas à se débrouiller tout seuls  ou à être la seule aide de leurs familles.

Nier, comme l'a fait Thatcher, l'exigence de la société est donc complètement opposé au principe du développement durable.

•    La deuxième valeur dont je voudrais vous parler est la réflexivité, c'est-à-dire pour ce qui nous concerne, le fait de pouvoir questionner le développement durable.

Comment articuler ensemble développement et durabilité ?

o    Le développement durable est-il un concept universel qui peut être approprié par tous les pays et par toutes les cultures de la planète ou est-il plutôt une notion occidentale qui risque de s'imposer aux cultures non occidentales de manière violente, injuste, voire tout simplement inappropriée ? 

o    Comment peut-on tenir compte des générations futures compte-tenu du fait qu'elles n'existent pas encore et ne peuvent pas s'exprimer ? 

o    Est-ce que, pour réaliser le développement durable, nous avons besoin d'un renforcement de la sphère écologique, celle-ci étant considérée par le Grenelle de l'environnement comme la plus faible du développement durable ? Et s'il faut renforcer la sphère écologique, comment peut-on le faire ? A travers une transition écologique ou bien faut-il une représentation pour l'éthique accrue de la sphère écologique peut-être par des partis verts qui restent en Europe aujourd'hui relativement faibles ?

o    Et que penser des opposants au développement durable ? Y compris l'économiste français Serge Latouche et tous ceux qui le soutiennent, qui lui prône plutôt la décroissance.

Pouvoir se poser ce type de question est à mon avis essentiel pour la vitalité, la vigueur et l'adaptabilité du développement durable. 

Sans réflexivité, le développement durable risque de se figer en dogme, en application et en la répétition naïve de quelques principes simples tenus comme allant de soi. 

Cela peut également nous amener dans une logique technocratique qui serait peut-être simple et efficace mais qui risque de perdre tout contact avec les vraies sources de la sagesse.

Cela dit, il ne faut pas non plus oublier que poser des questions sur le développement durable pourrait en principe nous amener ailleurs, c'est-à-dire, on pourrait peut-être un jour passer à d'autres concepts qui vont nous guider dans le futur.

•    La troisième valeur importante du développement durable dont je voudrais vous parler ici est la participation.

A mon avis - et je ne suis pas le seul à le penser -, la participation des citoyens est essentielle au développement durable. 

On peut prendre l'exemple bien connu de la vie quotidienne et plus précisément des écogestes. Consommer de manière responsable, trier ses déchets ou utiliser un vélo sont autant de gestes que l'on peut faire et qui permettent aux citoyens de participer au développement durable.

Mais il y a d’autres sphères moins connues qui sont peut-être encore plus importantes. 

Prenons l'exemple de l'adoption de technologies vertes décentralisées. A la différence des centrales nucléaires ou à énergies fossiles les énergies renouvelables peuvent être installées localement par exemple dans le cas des panneaux solaires, sur le toit des bâtiments, comme par exemple des maisons individuelles, des copropriétés ou bien des bâtiments à usage commercial.

Mais si on veut faire cela, il faut bien évidemment l'accord et les participations des propriétaires, des locataires, des associations de résidents, des régies et même d'autres parties prenantes.

Le même principe s'applique à d’autres technologies vertes et décentralisées comme par exemple les systèmes de récupération d'eau de pluie, les toitures végétalisées, les isolations thermiques ou encore des formes émergentes d'agriculture.

Toutes ces nouvelles formes de participation citoyenne exigent à leur tour une participation politique. 

Si les citoyens seront les acteurs du changement, alors ce serait logique pour les hommes et les femmes politiques de parler et de délibérer avec eux au lieu de prendre des décisions tout seuls, voire même seulement en concertation avec des grandes entreprises, ce qui risque de réduire les citoyens à de simples usagers et consommateurs de services fournis soit par l'État, soit par le secteur privé.

Il y a sans doute d'autres valeurs dont j'aurais pu vous parler ici. Mais au lieu de continuer cette liste de valeurs, je vais plutôt conclure sur une question : qu'en est-il de la démocratie ? Est-ce que la démocratie est une valeur constitutive du développement durable ou est-ce qu’elle est seulement associée au développement durable et qui fait cette association ? Est-ce que c'est seulement nous, les habitants de pays démocratiques occidentaux, qui associons à la démocratie au développement durable ?