En ligne depuis le 12/01/2018
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Description
Frédéric Gosselin, ingénieur chercheur à IRSTEA, explore dans cette vidéo (8'12) les différentes interfaces susceptibles d'exister entre l'écologie scientifique ou académique, et l'ingénierie écologique. Interface automatique, interface de transfert et de traduction, interface de recherche action, il montre ce que ces deux sphères peuvent s'apporter mutuellement et qu'elles peuvent participer au déploiement de l'ingénierie écologique.
Objectifs d’apprentissage :
- Comprendre l’articulation entre écologie scientifique, génie écologique et ingénierie écologique
- Appréhender la diversité des relations que peuvent entretenir les sphères académiques et opérationnelles.
Contexte
Cette vidéo fait partie de la semaine de cours "Émergence de l'ingénierie écologique" du MOOC Ingénierie écologique.
Restaurer des écosystèmes dégradés, dépolluer des milieux, créer des continuités écologiques, développer une agriculture plus respectueuse de l'environnement, sont autant de défis qui se posent aujourd'hui à nous. Pour y répondre, de plus en plus de réflexions et de pratiques se tournent vers l'ingénierie écologique, solutions que l'on dit "basées sur la nature". Ce MOOC vous propose d'en découvrir les fondements, les enjeux, les outils, les acteurs ainsi que les conditions de mise en œuvre.
État
- Labellisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Partage des conditions à l'identique
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
- Paternité
Nature pédagogique
- Cours
Niveau
- Bac+4
- Bac+5
Objectifs de Développement Durable
- 9. Industrie, innovation et infrastructure
Thèmes
- Ecosystèmes et biodiversité
Types
- Grain audiovisuel
Mots-clés
Contributeurs
Gosselin Frédéric
Écologie académique et ingénierie écologique : nous avons besoin de différents types d'interfaces !
Frédéric Gosselin, Ingénieur chercheur à l'IRSTEA
L'ingénierie écologique peut se définir rapidement comme étant l'action par et/ou pour le vivant. C'est un des résultats d'une réflexion menée sur le long terme par IRSTEA et qui a débouché notamment sur un livre sur l'ingénierie écologique en 2014, auquel différents auteurs de différents instituts ont contribué. Plus exactement, l'ingénierie écologique peut se définir comme un travail de conception qui trouve sa place naturelle au milieu d'un travail plutôt de construction fait par le génie écologique et d'un travail de production de connaissances fait par l'écologie ingénieuriale. Dans cette présentation, nous allons réunir ensemble l'ingénierie écologique et le génie écologique comme faisant partie de la sphère de l'action avec ses différentes étapes, et nous allons réfléchir aux liens entre cette sphère de l'action et la sphère de la connaissance, dont fait partie l'écologie ingénieuriale. Et ce qui va nous intéresser plus précisément, c'est quel type d'interface peut-on envisager entre la sphère de l'action et la sphère de la connaissance ? Et aussi, quels apports l'écologie académique peut proposer à l'ingénierie écologique dans le cadre de ces interfaces ?
Quand on réfléchit aux interfaces entre la sphère de la connaissance et la sphère de l'action, la première conception intuitive qui vient à l'esprit est celle d'une interface automatique. Dans cette interface, il suffit de produire de la connaissance et de la publier dans des journaux scientifiques pour que l'action et la société de manière plus générale s'en emparent et les appliquent. Donc c'est ce qu'on va appeler une interface automatique dans laquelle il n'y a pas vraiment de travail à faire à l'interface entre la sphère de la connaissance et la sphère de l'action, et c'est une interface qui a été historiquement dominante, notamment aux États-Unis après la Deuxième Guerre mondiale. C'est une interface qui est souvent associée à la primauté accordée aux théories et aux concepts dans le cadre académique. Pourtant, nous voudrions ici insister sur le fait que l'écologie académique a plus à proposer à l'ingénierie écologique que simplement des théories et des concepts dans le cadre d'autres interfaces que cette interface automatique.
La première chose que l'écologie académique peut proposer à l'ingénierie écologique, ce sont des théories qui sont testées dans les conditions de la gestion. Cela revient à définir plus précisément le domaine de validité des théories écologiques dans des termes que l'ingénieur écologue peut s'approprier facilement. Par exemple, cela revient à mettre en place des expérimentations multisites où les expériences, où les traitements des expériences, par exemple, sont des types de gestions pratiquées par l'ingénieur écologue.
Un deuxième type d'apport de l'écologie académique à l'ingénierie écologique, ce sont des synthèses, des résultats de la recherche ou des connaissances académiques à destination des ingénieurs écologues. C'est assez proche du point précédent, mais cette fois-ci, on va faire des résumés de plusieurs études sur le même sujet pour transférer à l'ingénieur écologue finalement le résumé des connaissances à un instant donné.
Et le troisième apport de l'écologie académique à l'ingénierie écologique, ce sont les chercheurs eux-mêmes, qui peuvent être mobilisés dans le cadre de l'ingénierie écologique comme interprètes et comme conseillers de l'ingénieur écologue pour trier, parmi les connaissances disponibles, celles qui sont utiles pour le projet d'ingénierie écologique dont il est question.
Ces 3 apports de l'écologie académique à l'ingénierie écologique trouvent leur place naturelle dans l'interface qu'on va appeler l'interface de transfert et traduction, qui est aussi une interface unidirectionnelle qui va de la sphère des connaissances vers la sphère de l'action, mais qui cette fois-ci, contrairement à l'interface automatique, nécessite un gros travail de tri et d'adaptation à l'interface.
Ceci étant, l'écologie académique a plus à proposer à l'ingénierie écologique, et notamment elle peut être mobilisée en tant que processus de recherche dans le cadre du processus de gestion lui-même. Du côté de l'ingénieur écologue, cela revient à concevoir sa gestion non pas comme une solution qui va forcément fonctionner, mais comme une hypothèse à tester, une solution potentielle qu'on va tester dans le cadre du processus de gestion. Et du côté de la recherche, ça veut dire que la recherche est appelée par l'ingénieur écologue pour évaluer les résultats de cette gestion, mais aussi pour étudier les mécanismes sous-jacents au processus de gestion lui-même.
Un dernier apport de l'écologie académique à l'ingénierie écologique, ce sont les outils de suivi et d'interprétation des données qui sont développés par l'écologie académique et qui peuvent être extrêmement utiles pour l'ingénieur écologue, notamment pour évaluer le résultat de sa gestion.
Ces 2 apports de l'écologie académique à l'ingénierie écologique trouvent leur place dans un autre type d'interface, que nous allons baptiser l'interface recherche-action, qui est une interface bidirectionnelle entre la sphère de l'action et la sphère de la connaissance, qui va à la fois de l'action vers la connaissance et de la connaissance vers l'action, avec notamment une production de connaissance dans le cadre de l'action elle-même.
En synthèse, j'ai voulu insister à travers cette présentation sur le fait que l'écologie académique a une variété d'apports à proposer à l'ingénierie écologique, et pas uniquement la fourniture de concepts et de théories à l'ingénierie écologique. Nous avons distingué dans cette présentation 6 grands types d'apports, bien entendu il y en a d'autres que ces 6 grands types, et ces 6 grands types d'apports peuvent être ventilés suivant qu'ils sont produits hors du processus de gestion d'ingénierie écologique ou dans le processus de gestion lui-même. En lien avec ces différents apports de l'écologie académique, nous avons différents types d'interfaces, dans lesquels ces différents apports trouvent assez naturellement leur place. Nous avons ici listé donc 3 grands types d'interfaces et en sous-jacent à mon propos, l'idée était que l'interface automatique entre la sphère de la connaissance et la sphère de l'action ne soit pas du tout automatique, qu'on a besoin très souvent d'un travail à cette interface, que ce soit dans l'interface de transfert et traduction ou dans l'interface de recherche-action.
En plus de ces 3 grands types d'interfaces, on peut en concevoir d'autres. Par exemple, un quatrième type d'interface est une interface qu'on va qualifier d'interface sur commande, dans laquelle la sphère de l'action va demander à la sphère de la connaissance de produire de nouvelles connaissances dans des cas d'ingénierie écologique où on a besoin de ces nouvelles connaissances.
Un autre point sur lequel je voudrais insister en conclusion, c'est que dans ces différentes interfaces, on a aussi très souvent besoin de considérer des connaissances d'un autre type que les connaissances académiques, notamment des connaissances que je qualifierais d'expérientielles, qui sont des connaissances d'experts, des connaissances empiriques non passées par la sphère de l'académie, qui peuvent être extrêmement utiles, notamment pour proposer de nouvelles gestions d'ingénierie écologique.
Et puis en conclusion, finalement on peut concevoir la gestion dans un cadre qui s'appelle le cadre de la gestion adaptative, qui est une forme de vision de la gestion qui permet d'intégrer assez naturellement les différents types d'interfaces entre la sphère de la connaissance et la sphère de l'action. Donc cette gestion adaptative peut être qualifiée d'une espèce de méta interface qui va permettre à l'ingénieur écologue de mobiliser, suivant ses besoins, les différents types d'interfaces dans le cadre de sa gestion.