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Description

Dans cette vidéo, Augustin Colette met en évidence les relations entre la qualité de l'air, très préoccupante en termes de santé publique, et le changement climatique. Il discute des trajectoires sociétales qui permettraient d'une part d'améliorer la qualité de l'air, et d'autre part de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Objectifs d’apprentissage :
- Appréhender les relations entre qualité de l'air et changement climatique
- Comprendre les trajectoires sociétales qui permettraient une amélioration de la qualité de l'air et une réduction des émissions de gaz à effet de serre.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
Mentions Licence
  • Sciences sanitaires et sociales
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Thèmes
  • Environnement - Santé
Types
  • Grain audiovisuel
Changement climatique : à la croisée des disciplines et des enjeux globaux
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Interdisciplinarité et études du climat
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Impacts du changement climatique sur les écosystèmes et la biodiversité
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Changement climatique et développement
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Sécurité alimentaire et adaptation de l'agriculture et des pêches aux impacts des changements climatiques
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Changement climatique et maladies infectieuses
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Interface entre expertise scientifique et le monde de décision
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L'adaptation au changement climatique
L'adaptation au changement climatique
Contributeurs

Colette Augustin

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Changement climatique et qualité de l’air : à la recherche de stratégies de gestion communes

Augustin COLETTE, Ingénieur-Chercheur – INERIS
Le changement climatique et la qualité de l'air sont deux enjeux environnementaux majeurs que l'on considère parfois comme distincts parce que le changement climatique s’intéresse principalement aux gaz à effet de serre, et la qualité de l'air aux polluants. On ne regarde donc pas forcément les mêmes substances. Mais il y a quand même des synergies.

1. Qualité de l'air
Concernant la qualité de l'air, voici des chiffres de l’Organisation Mondiale de la Santé qui comparent les différentes causes de mortalité sur l'ensemble du XXe siècle (figure ci-dessous). Le petit rond souligné en bleu au milieu concerne la mortalité attribuée à la pollution encore une fois sur l'ensemble du siècle. On se rend compte que cette mortalité est très significative, plus de 100 millions de morts sur un siècle, qui correspond à peu près en ordre de grandeur à la mortalité de maladies infectieuses telles que la tuberculose ou à d'autres facteurs comme les deux guerres mondiales réunies.

Un peu plus de 100 millions de morts sur un siècle. Si on prend des chiffres sur des années plus récentes, l’OMS nous dit que l’on a à peu près 3,5 millions de morts tous les ans dans le monde à cause de ce facteur de pollution de l'air extérieur. Sur l'Europe ça ferait à peu près 400 000 et sur la France 40 000 décès anticipés. Pour mettre en perspective, il faut se souvenir que la mortalité imputable aux accidents de la route est de l’ordre de 3000 ou 4000 décès par an. On est donc en face d’un enjeu sanitaire qui est vraiment très important.

2. Pollution de l'air et changement climatique
Pourquoi est-ce que l'on considère ce facteur en lien avec le changement climatique ? Il y a deux sources d'interactions qui sont aussi bien sur l'adaptation au changement climatique que sur l'atténuation. Concernant l'adaptation, on va prendre en compte le fait que finalement le climat est la somme des éléments météorologiques successifs et que certains de ces éléments météorologiques peuvent conduire à la formation d'épisodes de pollution intense. On va donc devoir s'adapter au changement climatique si on gère la question de qualité de l'air. Il y a aussi un facteur qui est sur l'atténuation parce que même si je vous ai dit tout à l'heure que les gaz à effet de serre principaux ne sont pas forcément des polluants (on pense au CO2), il existe des polluants qui sont aussi des gaz à effet de serre et qui ont ces propriétés de forçage radiatif donc qui peuvent avoir un impact sur le climat. On peut penser à l'ozone ou au carbone suie.

3. Modélisation
A partir du moment où on a noté le fait qu'il y a cette boucle de rétroaction, on va être préoccupé d'avoir des politiques de gestion qui sont cohérentes et synergiques entre les deux facteurs. On veut être sûr que si on promeut une politique pour l'atténuation du climat elle soit bénéfique pour la qualité de l'air, et vice versa. Pour étudier un petit peu l'impact de ces politiques et voir leur efficacité, on va mettre en œuvre des modèles numériques. Des modèles numériques de chimie - transport ou des modèles de qualité de l'air qui représentent l'ensemble des équations de la physique et de la chimie et de l'atmosphère à partir de différentes données d'émission ou une météorologie que l'on peut avoir. Par exemple, sur un épisode de pollution intense début 2009 qu’on avait reproduit à très haute résolution, on voyait bien les zones sources, les grandes villes, les grandes zones industrielles et on voyait bien aussi que les panaches de pollution pouvaient atteindre des dimensions qui très importantes. C'est exactement le même type de modèle que l'on utilise pour la prévision de la qualité de l’air tous les jours, par exemple sur la plate-forme www.prevert.org où l'on fait des prévisions à l'échelle nationale ou peut encore proposer des intégrations à beaucoup plus long terme de ces modèles à l'échelle du siècle pour regarder quels sont les liens entre le climat et la qualité de l'air. Pour faire ces intégrations, on va devoir prendre des hypothèses sur l'évolution de la société. On montre l'exemple de la consommation énergétique primaire de l'Europe telle qu'elle avait été proposée par le Global Energy Assesment il y a quelques années et nous proposent quelques scénarios différents, qui nous proposent de voir quels sont les futurs possibles. D'un côté, on va avoir une consommation énergétique en l'absence de toute politique climatique. On a donc une augmentation de la consommation et puis il y a un recours aux énergies fossiles qui reste important. De l'autre côté, on a un scénario qui tente d'atténuer le changement climatique de telle sorte que le réchauffement soit limité à 2°C d'ici la fin du siècle. On voit que la consommation énergétique devient plus efficace, la consommation énergétique baisse et le recours aux énergies fossiles est bien moindre, on a une part des énergies renouvelables qui est beaucoup plus importante. Ces scénarios peuvent être déclinés en termes d'émissions de polluants et fournissent à nos modèles de chimie – transport nos modèles de qualité de l'air.
 
On va être capables de faire des cartographies de la pollution à l'horizon du milieu du siècle. Ci-dessus, on montre des cartes de particules fines pour 2050 dans le scénario de référence, le scénario sans politique climatique, et le scénario plus ambitieux ou on a une atténuation. On se rend compte qu'effectivement, le scénario d'atténuation qui était à l'origine uniquement conçu pour le changement climatique a un effet collatéral bénéfique pour la qualité de l'air.

4. Analyses coûts-bénéfices
On peut traduire cette exposition en termes de concentration de particules en impact sanitaire et en chiffre de mortalité et c'est là que l'on va pouvoir faire des analyses coûts - bénéfices qui vont nous permettre de voir si nos politiques vont coûter cher à la société. Pour faire ces analyses coûts - bénéfices, on commence par regarder quel est le coût de la technologie. On avait deux stratégies : une où on ne faisait rien de spécifique et l'autre où on essayait d'atténuer le changement climatique. L'atténuation a un coût et l'investissement qui doit être fait dans le système énergétique est supérieur pour le scénario d'atténuation. Mais on va voir que l'on peut compenser ce coût avec, au premier ordre, des économies que l'on va faire sur les mesures de gestion de la qualité de l'air. Les mesures de gestion de la qualité de l'air correspondent en fait au coût des mesures technologiques de dépollution. Si l'on prend l’exemple d'un véhicule électrique, il a été mis sur la route principalement parce que l'on voulait éviter les émissions de dioxyde de carbone. Mais une fois qu'il est sur la route, on n'a pas besoin de lui ajouter un filtre à particules donc on économise sur les mesures de technologie qui permettent de dépolluer nos activités. On va voir une première compensation des coûts de l'atténuation. La deuxième compensation va être liée aux coûts sanitaires. Les cartes d'exposition aux particules peuvent être utilisées pour calculer des chiffres de mortalité à l'horizon du milieu du siècle. A partir de cette mortalité, on va voir quel est le coût que l'on va pouvoir faire économiser à la société. Quand on va combiner tout ça, on va se rendre compte que finalement nos deux scénarios arrivent à un coût qui est à peu près équivalent, ce qui est très intéressant pour soutenir ces politiques. Parce qu'il faut rappeler que l'on s'intéressait à l'origine à d’autres scénarios qui étaient uniquement conçus pour le changement climatique. La qualité de l'air et l'amélioration des conditions sanitaires constituaient uniquement une externalité, un effet collatéral bénéfique mais pas forcément attendu. Mais cela peut constituer un levier important pour convaincre les politiques à mettre en place des mesures d'atténuation du climat sachant qu'ils vont avoir d'autres effets bénéfiques.

5. Projections
Tout ça peut sembler un petit peu optimiste. Si on se projette d’ici à 2050, la situation pour y arriver n'est pas forcément aussi simple. Si on regarde le diagramme ci-dessous, où on va positionner les politiques bénéfiques ou négatives pour le climat sur l'axe horizontal et bénéfiques ou négatives pour la qualité de l'air sur l'axe vertical, on commence du cadran qui est en bas à gauche où on n'a pas spécifiquement de politique de contrôle et on va vouloir arriver dans le cadran en haut à droite où on a efficacité énergétique, recours au renouvelable. La route pour y arriver n'est pas forcément aussi simple et on s'en est rendu compte depuis déjà une dizaine d'années, on a commencé plutôt d'abord à promouvoir des stratégies telles que la fabrication et l'utilisation du diesel, l'utilisation de la biomasse pour le chauffage résidentiel qui sont plutôt des bonnes mesures pour le climat mais, on l’a vu, sont plutôt mauvaises pour la qualité de l'air.

Donc on va corriger ça en mettant par exemple des filtres à particules ce qui va réaugmenter la consommation des véhicules et on espère revenir sur la route avec encore un dernier grand coup de volant pour arriver enfin à ces mesures, à cette société qui sera plus efficace. On a vu que cette société plus efficace elle est possible, elle est rentable mais par contre elle n'est pas forcément simple à atteindre et c'est tout le défi de la transition.