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Description

Jean-Michel Severino, Président de Investisseurs & Partenaires, discute dans cette vidéo (11'59) de l'origine des Objectifs de Développement Durable (ODD). Il revient notamment sur les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) puis sur les processus d'élaboration des ODD.

Objectifs d’apprentissage :
- Connaître l'origine et les processus d'élaboration des ODD.
- Distinguer les ODD des OMD.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
  • Paternité
Mentions Licence
  • Histoire
  • Science politique
Nature pédagogique
  • Animation
  • Cours
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Objectifs de Développement Durable
  • Les 17 ODD
Thèmes
  • Écologie & Action politique
  • Les bases
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
ODDobjectifs de développement durable
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Les ODD : un agenda pour tous les pays et pour tous les secteurs
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Universalité sectorielle des ODD : tous les domaines sont couverts
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Interactions entre ODD : illustration avec l'ODD 12 sur la production et la consommation responsables
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Prendre en compte les interactions entre ODD : un gage de succès pour l'agriculture
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Trois éléments saillants distinguant les ODD dans l'histoire du développement
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Le "doughnut", entre plancher social et plafond écologique
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Contributeurs

Severino Jean-Michel

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Une introduction historique aux ODD

Jean-Michel Severino, Président de Investisseurs & Partenaires
 

Les Objectifs du Développement Durable sont le produit du processus de la globalisation. Leur naissance se produit dans la fin des années 90, bien avant la déclaration de 2000 qui lance les Objectifs du Millénaire pour le Développement qui sont, en quelque sorte, les parents des actuels ODD. Les grands-parents, il faut aller les rechercher dans l'état de la Coopération au développement dans le début des années 90. Replongeons-nous dans cette époque.

Le mur de Berlin vient de tomber. L'aide publique au développement cherche une nouvelle raison d'être. Elle avait été largement portée par le souci de "containment" antisoviétique que les gouvernements occidentaux avaient mis en place dans toute la période de la Guerre froide. Ce fameux mur de Berlin tombé, il n'y a plus besoin d'acheter des régimes amis pour les opposer à l'avancée communiste. On voit s'effondrer l'aide publique au développement. On recherche de nouveaux objectifs qui ne seraient pas seulement la solidarité internationale, une valeur qui avait toujours été là depuis le début de cette coopération de développement. Du coup, au sein de l'OCDE, l'Organisation pour la Coopération et le Développement économique, les acteurs de l'aide au développement cherchent comment mobiliser leur gouvernement et leurs opinions publiques pour démontrer que cette aide non seulement a une valeur morale, spirituelle, sociale, mais aussi rend service, et surtout qu'elle était efficace. D'où cette idée qui naît au sein de ces appareils, qui est beaucoup promue à l'époque par l'USAID de déterminer des objectifs de résultats pour cette aide publique au développement. Le travail entrepris alors donnera lieu à un rapport daté de 1996 qui se projette dans la coopération au développement pour le début du XXIe siècle, c'est son titre. Ce rapport propose toute une série d'indicateurs qu'on va retrouver repris quasiment in extenso comme les Objectifs du Millénaire pour le Développement quelques années plus tard par l'Assemblée générale des Nations-Unies.

En effet, pendant cette période, dans un travail parallèle, les Nations-Unies cherchent aussi à mobiliser la coopération internationale, l'opinion internationale au bénéfice du développement. L'idée qui a germé au sein de l'OCDE leur paraît légitime, intéressante et riche. Le secrétariat général des Nations-Unies se propose de l'universaliser, de ne plus en faire simplement les objectifs communs des pays riches de l'OCDE, mais les objectifs de la planète. C'est ainsi qu'après ce travail effectué au sein du secrétariat général des Nations-Unies, émerge à l'occasion de l'Assemblée générale de l'année 2000, cette Déclaration du Millénaire pour le développement qui met en place non seulement les six objectifs qui avaient été mis en avant par le Comité de développement de l'OCDE, mais aussi deux objectifs supplémentaires autour du partenariat notamment et de la croissance inclusive qui vont donner lieu aux fameux Objectifs du Millénaire pour le Développement.

Le démarrage de ces objectifs est au fond assez discret. Cette déclaration est un acte politique sans véritable portée contraignante. Seuls quelques appareils d'aide au développement semblent être propriétaires de ce qui est une démarche assez technocratique qui touche d'abord les agences d'aide au développement, définit des objectifs de résultats pour les pays en développement et doit être financée par des efforts des pays industrialisés au titre de cette aide publique au développement principalement. D'ailleurs, très peu de temps après, en 2003, Jeff Sachs produit un grand rapport sur le financement de l'aide au développement qui se fonde sur ces Objectifs du Millénaire pour indiquer quel doit être l'effort de la communauté internationale pour soutenir ces objectifs.

Et là, la bête commence à échapper à son dresseur. On voit l'opinion publique internationale, les ONG, trouver intéressants ces objectifs parce qu'ils expriment un certain consensus sur la direction où l'on doit se diriger pour obtenir des résultats en matière de développement, bâtir une société globale plus juste, plus équitable et plus durable. Ces mots de justice, d'équité et de durabilité, rentrent de plus en plus dans le discours politique et dans le discours moral. Les gouvernements aussi s'en emparent, en particulier les gouvernements des pays en développement qui y voient une manière d'attraper les bailleurs de fonds à leur propre piège, de le retourner et de leur montrer que cheminant vers les Objectifs du Millénaire pour le Développement, tels qu'établis en tant que standards internationaux de l'aide, ils méritent d'être financés et doivent l'être par ces gouvernements et par leurs agences. Gouvernements, société civile, appareils d'aide, progressivement tout le monde se met à parler OMD. Cela devient progressivement une sorte de langage commun, une lingua franca de l'ensemble des appareils et de l'ensemble des acteurs du développement.

Au fur et à mesure que les années passent, le mouvement se renforce. Après 2010, la question commence à se poser de savoir s'il y aura une suite aux Objectifs du Millénaire pour le Développement et laquelle. Le Secrétariat général des Nations-Unies lance alors un nouveau grand panel, le panel dit de haut niveau pour l'agenda du développement après 2015 qui est chargé, sous la présidence de trois présidents de la République, d'écrire, d'imaginer ce que pourrait être une suite à ces OMD. En mai 2013, ce panel, après de très larges consultations gouvernementales, de la société civile, de très nombreux experts du développement, bref, un travail massif, finit par produire un nouveau rapport, une recommandation qui propose une série de nouveaux objectifs pour prendre la succession des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Cela deviendra les Objectifs du Développement Durable, les fameux ODD, les SDGs en anglais, qui seront validés deux années plus tard en Assemblée générale.

Qu'est-ce que dit ce rapport ? Ce rapport dit qu'il ne s'agit plus de fixer seulement des objectifs pour les pays en développement, mais pour la planète entière. Aussi bien les pays riches que les pays pauvres ont leurs problèmes, leurs problèmes globaux, leur pauvreté locale, globale, que tous ces problèmes doivent être traités en même temps et par tous. Ce que dit ce rapport également qui exprime les voix majoritaires de la société civile et des appareils internationaux, c'est que le principal acteur du progrès social et du progrès environnemental, ce ne sont pas les transferts, l'aide publique au développement ou l'aide privée, mais la croissance économique. Ce rapport parle d'abord d'une croissance et du rôle de cette croissance dans l'élimination de la pauvreté. Il parle de l'inclusion, de la redistribution et de la durabilité de cette croissance. Le terme arrive au cœur du projet et de la rédaction du rapport. Il prend acte de ce que depuis 2000, il y a eu un sommet de Rio, il y a eu tout un cycle international de densité croissante autour du changement climatique, de la biodiversité, que les questions environnementales sont devenues au cœur de l'agenda social et économique de la planète. Ce que dit ce rapport aussi, c'est qu'on ne peut pas penser le monde sans parler de gouvernance, bonne gouvernance, institutions, libertés publiques. Ça aussi, c'est le produit d'un monde postérieur à la chute du Mur de Berlin, un monde qui peut encore, à cette époque, aborder librement la question des droits de l'homme et des libertés publiques, malgré la présence d'un certain nombre de grands régimes autoritaires sur cette planète.

Ce travail est repris par le Secrétariat général des Nations-Unies. Il donne lieu à deux ans de négociations au sein des gouvernements, et curieusement, le produit de ces deux années est extrêmement proche de ce que ce rapport avait proposé, signe qu'un assez large consensus s'était déjà construit dans la société et dans les gouvernements pour formuler une espèce d'objectif global pour la planète, une fonction unique de ce que nous voulions faire d'ici à 2030 pour rendre notre monde meilleur, et surtout éliminer la pauvreté. Un slogan qui était évoqué dans ce rapport de 2013 sur le thème Leave no one behind, ne laissons personne derrière, que ce soit dans les pays industrialisés ou dans les pays les plus pauvres. C'est ainsi qu'émergent, au terme de ces deux années de discussions et de nombreux allers et retours, ces fameux Objectifs du Développement Durable qui vont s'imposer à toute la communauté internationale, à tous les gouvernements, à tous les acteurs privés et publics.

Par rapport aux Objectifs du Millénaire pour le Développement, c'est un immense pas en avant, on pourrait dire pratiquement une transformation du paradigme. On y parle non plus redistribution, mais croissance. On y parle environnement et pas simplement croissance économique. On y parle effort de tous. On y parle contribution du secteur privé et pas simplement contribution des acteurs de la société civile et de la solidarité. En revanche, deux grandes thématiques restent en dehors de ces négociations, c'est important de les souligner. Il y a d'abord la thématique de la culture. Celle-ci reste une sorte d'ensemble vide ou d'angle mort de toute cette discussion internationale. C'est peut-être quelque chose qui fera l'objet du prochain cycle de discussion. La question des libertés publiques, parce que si on parle de qualité des institutions, on n'y parle pas de droit. On n'y parle pas des droits de l'homme. On n'y parle pas des droits des citoyens. On aurait pu imaginer que cet effort de construction des Objectifs du Développement Durable soit un objectif de construction à partir des droits, à partir des droits des hommes, mais aussi des droits de la nature. Ce langage des droits est soigneusement évité parce qu'il heurte un certain nombre de régimes, et des plus puissants, à l'intérieur de l'Assemblée générale des Nations-Unies.

Ce qui frappe au cours de ces 25 ou 30 années d'histoire de ce que sont devenus les Objectifs du Développement Durable, c'est une formidable ambition de convergence, de rassemblement, de fédération, pour transformer notre planète, une sorte de quête de l'unité et de la cohérence qui tranche beaucoup avec les disruptions de notre monde, avec la fragmentation que nous voyons s'opérer, notamment à la fin de ces années 2010, au sein de l'Union européenne, mais aussi des Nations-Unies, les difficultés à créer le consensus international sur les grandes causes politiques ou environnementales, le détricotage possible, éventuel des accords de Paris sur le climat. De cette période extraordinairement difficile émerge cette volonté constante de transformer tous ensemble, de manière partenariale, solidaire, notre planète et en faire un espace où nous ferons beaucoup mieux que survivre, où nous pourrons vivre ensemble, en paix, en liberté et en bien-être.