Aller au contenu principal
Description

Frédéric Vey et Anne-Sophie Hesse, du Ministère de la transition écologique et solidaire, discutent dans cette vidéo (12'40) des indicateurs de suivi des Objectifs de développement durable (ODD). Après une approche théorique visant à définir et à montrer les limites des indicateurs, ils montrent comment les indicateurs "ODD" se déclinent de l'échelle internationale à l'échelle nationale.

Objectifs d’apprentissage :
- Connaître les limites des indicateurs de suivi des ODD.
- Comprendre la déclinaison des indicateurs "ODD" de l'échelle internationale à l'échelle nationale.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
  • Paternité
Nature pédagogique
  • Animation
  • Cours
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Objectifs de Développement Durable
  • Les 17 ODD
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
ODDobjectifs de développement durable
Les ODD : un agenda pour tous les pays et pour tous les secteurs
Les ODD : un agenda pour tous les pays et pour tous les secteurs
Universalité géographique des ODD : un agenda pour tous les pays
Universalité géographique des ODD : un agenda pour tous les pays
Universalité sectorielle des ODD : tous les domaines sont couverts
Universalité sectorielle des ODD : tous les domaines sont couverts
Dans un monde complexe, des interactions, des synergies, des antagonismes
Dans un monde complexe, des interactions, des synergies, des antagonismes
Interactions entre ODD : illustration avec l'ODD 12 sur la production et la consommation responsables
Interactions entre ODD : illustration avec l'ODD 12 sur la production et la consommation…
Interactions entre ODD : illustration avec les Maladies Tropicales Négligées
Interactions entre ODD : illustration avec les Maladies Tropicales Négligées
Prendre en compte les interactions entre ODD : un gage de succès pour l'agriculture
Prendre en compte les interactions entre ODD : un gage de succès pour l'agriculture
Des choix de politiques publiques pour atteindre les ODD
Des choix de politiques publiques pour atteindre les ODD
Contributeurs

Vey Frédéric

Hesse Anne-Sophie

Télécharger le fichier

Frédéric Vey et Anne-Sophie Hesse, Ministère de la transition écologique et solidaire (France)

Qu'est-ce qu'un indicateur, et pourquoi avons-nous besoin d'indicateurs ? 

Un indicateur permet tout d'abord de suivre un phénomène, à l'aide de données quantitatives ou de données qualitatives. Une donnée quantitative ce sera, par exemple, l'évolution des surfaces en agriculture biologique. Une donnée qualitative, c’est ce qu’on appelle un signal, ce sera par exemple l’état des coraux, l’état des récifs coralliens. 

Ces indicateurs sont utilisés principalement par les évaluateurs et par les lecteurs des rapports d’évaluation. Ils sont importants parce qu’ils permettent d’objectiver le débat public, et ils permettent de comparer les choses, à la fois dans l’espace et dans le temps. Et c’est pour ça que l’on constate que ces indicateurs, ils ont toujours été utilisés, ou très régulièrement utilisés dans le débat public, et qu’ils prennent une place de plus en plus importante dans notre société  ; à travers l’information qu’on reçoit, ou à travers des débats politiques qui utilisent de plus en plus régulièrement des éléments chiffrés. 

On peut illustrer ce qu’est un indicateur à travers un exemple, qui est celui de l’indice Big Mac. L’indice Big Mac c’est un indicateur qui a été mis en place par une revue britannique qui s’appelle The Economist en 1986. C’est un indicateur qui est produit depuis plus de 30 ans, tous les six mois par cette revue, et c’est un indicateur qui se base sur le principe de la parité du pouvoir d’achat. Le Big Mac étant un sandwich qui est vendu aujourd’hui dans quasiment tous les pays du monde, le principe de la parité du pouvoir d’achat voudrait que ce sandwich soit vendu au même prix dans tous les pays, ce qui n’est bien sûr pas le cas. Et les différences de prix qu’on observe dans la vente de ce sandwich permettent d’appréhender si une monnaie est sous-évaluée ou surévaluée par rapport à une autre, et donc c’est aujourd’hui un indicateur qui fait référence dans ce domaine. 

Les indicateurs doivent être manipulés avec beaucoup de précautions. 

Tout d’abord un indicateur ne dit pas tout sur tout. Dans certains cas, l’indicateur peut coller parfaitement au phénomène que l’on veut suivre  ; par exemple si je veux suivre la mortalité routière, je peux aujourd’hui calculer, chaque année, le nombre de tués sur les routes, et ça illustre l’indicateur que je veux suivre. Dans d’autres cas, l’indicateur ne peut illustrer que partiellement la politique, par exemple, la politique de réduction de la biodiversité, elle ne peut pas être suivie dans sa globalité. Donc on va la suivre avec différents indicateurs, qu’on appelle des indicateurs sectoriels. Par exemple, les populations d’oiseaux communs qui permettent d’appréhender l’état de la biodiversité au niveau national. 

De la même façon, un indicateur doit être interprété avec précaution suivant l’échelle géographique à laquelle on le regarde, parce que chaque indicateur peut être désagrégé à une échelle géographique infra, un indicateur international peut être désagrégé en indicateurs nationaux, un indicateur national peut être désagrégé en indicateurs départementaux ou communaux. Et pour illustrer ça, on peut prendre un exemple à travers les émissions de gaz à effet de serre, avec ici quelques chiffres non exhaustifs, mais simplement pour illustrer le phénomène ou les précautions à prendre. 

Si on suit les émissions de gaz à effet de serre au niveau de l’Union européenne, on peut le faire d’abord sur deux pas de temps. Un pas de temps long : on suit les évolutions de 1990 jusqu’à 2015 en moyenne, et là on constate une baisse de 20 % des émissions de gaz à effet de serre, donc une situation plutôt favorable. Maintenant, si on regarde ce même indicateur, toujours à l’échelle de l’Union européenne, mais sur un pas de temps court, c’est-à-dire l’évolution 2014-2015, on voit que les émissions de gaz à effet de serre augmentent de plus de 1 %. Donc on voit que c’est le même indicateur, deux pas de temps différents ça raconte deux histoires différentes. De la même façon, cet indicateur calculé au niveau européen, si on le désagrège par pays, on va voir certains pays qui collent à peu près à la tendance européenne, comme en Allemagne ou en France, avec globalement une tendance à la baisse entre 1990 et 2015 et une légère augmentation entre 2014 et 2015. Mais on peut avoir d’autres pays comme l’Espagne sur lesquels l’évolution est totalement inversée, puisqu’en Espagne on constate une augmentation de 14 % des émissions de gaz à effet de serre sur les 25 dernières années. 

Alors, venons-en maintenant au sujet qui nous intéresse plus particulièrement, qui est celui des indicateurs utilisés pour le suivi des Objectifs de développement durable, les ODD, qui ont été définis par l’ONU. 

L’ONU a défini 17 objectifs thématiques. Ces objectifs sont chacun eux-mêmes déclinés en cibles, cibles opérationnelles, 169 cibles au total, donc en moyenne 10 cibles par objectif de développement durable. Chacune de ces cibles est elle-même déclinée en au moins un indicateur, parfois deux. Ce qui a emmené la Commission statistique de l’ONU à définir en 2017 un jeu de 232 indicateurs mondiaux, pour le suivi des ODD au niveau international et pour permettre la comparaison internationale entre pays. Or ces indicateurs, ces 232 indicateurs, on les classe en trois catégories, suivant qu’une méthode de calcul existe et fasse consensus ou pas, et suivant que les données soient ou pas disponibles dans l’ensemble des pays. 

•    Donc on a une première catégorie d’indicateurs, c’est une centaine, à peu près 100 indicateurs sur les 232, pour lesquels on a une méthode de calcul qui fait consensus entre tous les pays et pour lesquels des données sont disponibles. Et donc ces indicateurs-là de catégorie I, les pays doivent les rapporter chaque année à l’ONU. 

•    On a ensuite les indicateurs de catégorie II pour lesquels on a toujours une méthode qui est disponible et qui fait consensus au niveau international, mais par contre les données ne sont pas régulièrement produites par tous les pays, et donc il n’y a pas de comparaison exhaustive internationale qui est possible. On a à peu près une centaine d’indicateurs de catégorie II parmi les 232 indicateurs mondiaux. 

•    Et enfin on a une troisième catégorie d’indicateurs, les indicateurs de catégorie III, pour lesquels les pays n’ont pas pu se mettre d’accord pour définir une méthode de calcul qui fasse consensus. Donc pour l’instant ces indicateurs sont impossibles à rapporter au niveau international. 

Alors au-delà de ce contexte international pour le suivi des ODD, la Commission statistique de l’ONU a reconnu que dans certaines régions du monde, dans certains pays, dans certaines zones géographiques, il y avait des enjeux et des contextes spécifiques qui nécessitaient une adaptation du jeu d’indicateurs qui avait été défini au niveau international. Et donc la Commission statistique a incité les régions du monde ou les pays à définir des jeux d’indicateurs adaptés à leur situation, à leur contexte, à leurs enjeux locaux. 

C’est un travail qui a été engagé assez tôt par la Commission européenne, à travers son institut statistique qui est Eurostat, et la Commission européenne a donc défini en 2017 un jeu d’indicateurs, alors assez restreint, ils avaient fixé un seuil, ils ne voulaient pas plus de 100 indicateurs dans leur jeu d’indicateurs pour le suivi des ODD au niveau européen, et ils voulaient également un nombre fixe d’indicateurs par ODD, donc ils avaient fixé un seuil à six indicateurs par ODD. Ils ont défini comme ça un jeu d’indicateurs qui est régulièrement suivi depuis 2017 par l’Union européenne. Certains étant des indicateurs onusiens, stricts, et certains étant des indicateurs approchant des indicateurs onusiens parce qu’ils ont été contextualisés. 

La France a engagé ce travail un peu plus récemment, en 2018, toujours un travail de sélection d’un jeu d’indicateurs adapté à ces contextes, à son contexte ou à ses enjeux nationaux. La France l’a fait dans le cadre d’une instance qui s’appelle le CNIS, le Conseil national de l’information statistique, qui est une instance qui réunit des producteurs et des utilisateurs de statistiques. C’est un travail qui a été co-animé par l’institut statistique national, l’Insee, et par le service statistique du ministère de l’Écologie, avec comme pour Eurostat un certain nombre de critères de sélection : on voulait que les indicateurs soient disponibles, on voulait qu’ils soient produits régulièrement, on voulait être sûr qu’ils soient encore produits dans les années qui viennent, on voulait au moins trois points de mesures d’ici à 2030. On a été un peu moins strict sur le nombre d’indicateurs par ODD, donc Eurostat avait défini un seuil strict de six indicateurs par ODD, nous on se retrouve avec quatre ou huit indicateurs par ODD suivant les objectifs. Mais voilà, on a défini comme ça un jeu de 98 indicateurs qui nous sert aujourd’hui au suivi de l’engagement de la France dans les ODD. Alors on en est aujourd’hui en France au stade de la publication des chiffres pour ces 98 indicateurs ODD. 

L’enjeu maintenant sera pour nous, pour l’Insee et pour les services statistiques ministériels, de faire parler ces chiffres. C’est-à-dire de représenter ces chiffres sous forme graphique ou cartographique. C’est un travail qu’on engage au niveau national qui n’est pas encore finalisé, mais pour essayer de caractériser l’objectif qu’on poursuit, on peut s’inspirer de ce que Eurostat a fait au niveau européen, avec un outil qui a été mis en place et qui est disponible sur internet, qui s’appelle SDGs and me ; qui est un outil qui permet de sélectionner un objectif, une cible, un ou plusieurs indicateurs, une zone géographique, la plupart du temps un pays, et de représenter sous forme graphique l’évolution ou la situation de cet indicateur. Donc on a fait figurer ici un exemple, qui est celui de l’un des 100 indicateurs retenus par Eurostat, qui est l’artificialisation des sols, et ce qui nous intéressait ici de représenter, c’était la situation de la France parmi tous les pays de l’Union européenne. 
 
Donc on voit ici la France en rouge, qui est classée en 11e position en ce qui concerne l’artificialisation des sols, avec une artificialisation un peu plus importante que l’artificialisation moyenne de l’Union européenne qui est représentée ici en bleu foncé. Ce graphique me permet de revenir sur un point important que j’ai évoqué en préambule sur les précautions à prendre dans l’analyse et dans l’interprétation des indicateurs. Si on regarde ce graphique, on voit que l’artificialisation des sols est exprimée en mètre carré de sol artificialisé par habitant, et donc je le disais, la France est classée 11e sur 29 pays, légèrement au-dessus de la moyenne européenne. Si, pour calculer cette artificialisation des sols ou pour suivre cette artificialisation des sols, on avait choisi une autre unité, par exemple la surface nette artificialisée en France, on aurait une autre position de la France au sein des pays de l’Union européenne, et une autre position de la France par rapport à la moyenne de l’Union européenne. Et exactement la même chose si on avait utilisé une troisième unité, qui est le taux d’artificialisation, qu’on calcule par la surface artificialisée sur la surface globale du pays, on aurait également probablement un autre classement et une autre position par rapport à l’ensemble de l’Union européenne.