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Description

Claire Chignoli, ingénieure "économie circulaire et déchets" au sein de l'Agence de la transition écologique (Ademe) Martinique, discute dans cette vidéo de la question des déchets dans les Outre-mer. Après une analyse de la problématique actuelle, elle met en lumière les objectifs et les leviers pour tendre vers une économie plus circulaire dans ces territoires.

Objectifs d'apprentissage :
- Comprendre la problématique des déchets dans les Outre-mer.
- Identifier les leviers pour tendre vers une économie circulaire dans les Outre-mer.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
Mentions Licence
  • Economie
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+3
Thèmes
  • Économie circulaire
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
économie circulaireOutre-mergestion des déchetsrecyclage
Les récifs coralliens : des enjeux majeurs pour l'Outre-mer
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La biodiversité en Outre-mer
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Biodiversité en Outre-mer : des pressions en tropiques
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Inégalités et pauvreté dans les outre-mer : un état des lieux
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Les inégalités de genre dans les Outre-mer
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Alimentation et nutrition dans les départements et régions d’Outre-mer
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La transition énergétique dans les Outre-mer
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Le stockage du carbone dans le sol pour lutter contre le changement climatique
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Échouages des sargasses et pollutions par les pesticides : transformer une contrainte en opportunité
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Contributeurs

Chignoli Claire

ingénieure "économie circulaire et déchets" , ADEME

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La transition vers une économie circulaire dans les Outre-mer
par Claire Chignoli, ingénieure "économie circulaire et déchets" à l'ADEME

Lorsqu'on parle des déchets en Outre-mer, on parle de choses très contrastées. Comparer la Martinique avec son centre de valorisation organique alimenté par une collecte de biodéchets des ménages en porte-à-porte et son incinérateur de déchets, et Mayotte, ou les sites isolés sur le fleuve en Guyane, n'a pas vraiment de sens. Néanmoins, on peut dégager des similitudes entre ces territoires.

1. Similitudes entres les territoires ultramarins concernant les déchets
Ce sont des territoires qui sont limités en termes d'espace, ce qui ne permet pas l'implantation facile de structures de stockage des déchets, qu'elles soient grandes, comme un centre d'enfouissement, ou plus modestes comme une déchèterie. Ensuite, ce sont des territoires qui sont contraints économiquement. L'étroitesse des marchés ou des gisements ne permet pas le déploiement de filières de recyclage classique de manière pérenne. Enfin, ce sont des territoires qui sont isolés et éloignés, donc fortement dépendants à l'export pour certaines catégories de déchets, avec des contraintes réglementaires fortes à cet export, des coûts importants pour un intérêt environnemental limité. On comprend bien que ces territoires ont intérêt à déployer des solutions en autonomie pour une grande partie de leurs déchets et sur la totalité des typologies de déchets produits, aussi bien publics que privés.

Les typologies de déchets qui sont produites sur ces territoires ne sont pas foncièrement différentes de celles produites ailleurs. Mais il y a des caractéristiques principales.

D'abord, il y a une quantité de déchets verts importante produite, notamment due au climat tropical dans les DOM. Ensuite, on a des quantités d'encombrants qui sont très importantes avec un enjeu sanitaire autour de ces déchets fort du fait que ce sont des gîtes larvaires pour le moustique vecteur de la dingue, du Zika et du chikungunya. Enfin, on a des ordures ménagères résiduelles, c'est ce qui reste en mélange dans la poubelle, dont les tonnages sont plus importants que sur le territoire national.

2. Le service de gestion des déchets dans les Outre-mer
Le service de gestion des déchets dans les DOM se caractérise principalement par un haut niveau de service à l'habitant, avec beaucoup de collectes en porte-à-porte, des fréquences importantes dans l'objectif de limiter les dépôts sauvages et les incivilités. Ça se caractérise aussi par des taux de collecte séparés comme les emballages, qui sont en progression mais qui restent modestes. Enfin, ce sont de grosses quantités de déchets qui sont collectées pour être finalement et majoritairement mises à l'enfouissement et à la décharge.

L'ensemble de ces paramètres impacte fortement les coûts de gestion. Ces coûts sont 1,7 fois plus importants que sur le territoire national, et parfois jusqu'à 2 fois plus chers sur la collecte. Ce sont des systèmes qui sont aussi en déséquilibre puisque la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui est le modèle principal de financement du service public, ne le couvre pas.

3. Les risques
Dans un système insulaire, lorsqu'un site d'enfouissement est à saturation, trouver un nouveau site pour enfouir les déchets devient problématique. Du fait qu'il y ait peu de structures de traitement sur les territoires, un incident dans la chaîne de traitement, comme un incendie sur une décharge ou un centre de tri, rend très complexe le report des déchets vers d'autres installations ou territoires. Enfin, cette problématique peut être accentuée par les déchets de crise, notamment liés aux aléas climatiques type cyclone ou tempête tropicale.

La recherche d'un modèle résilient et sécurisé nous montre bien qu'il faut sortir de cet aspect linéaire de traitement/élimination des produits en fin de vie pour aller vers une approche en boucle qui ferait de ces produits des ressources sur les territoires.

4. Vers une économie circulaire dans les Outre-mer
Les thématiques de l'économie circulaire matchent bien avec la problématique des déchets d'Outre-mer. C'est par exemple des enjeux de diminution importante des flux, à travers la sobriété mais aussi le réemploi, la réutilisation, la réparation, la gestion de proximité des biodéchets, donc le compostage et les jardins partagés avec des aspects résilience alimentaire qui sont très intéressants. Les territoires ultramarins sont encore fortement marqués par des économies de la débrouille, de l'entraide, avec des savoir-faire à mettre en œuvre, et sont également marqués par la présence d'une économie informelle qui parfois, même si elle peut avoir des effets positifs comme par exemple la consigne informelle sur la bière de l'île de La Réunion, peut souvent avoir des effets négatifs. L'accumulation des véhicules hors d'usage après avoir récupéré les pièces automobiles aux Antilles en est un exemple. On a des tissus associatifs, notamment dans le domaine de l'économie sociale et solidaire, qui sont très dynamiques sur les territoires. Enfin, il y a aussi l'aspect de possibilités de mécanismes fiscaux ou réglementaires qui pourraient permettre de limiter l'entrée de certains flux. La Nouvelle-Calédonie, et sa province Sud, souhaiterait limiter l'entrée des bouteilles plastiques par voie réglementaire sur son territoire.

5. Tri et recyclage
Le tri permettra de créer la ressource autour de laquelle on pourra réfléchir et inventer des filières de valorisation qui seront peut-être différentes de celles classiquement appliquées. Le broyage du verre bouteille, par exemple, dans les DOM, donne principalement un matériau qui est utilisé en sous-couche routière, notamment en Guyane, ce qui permet d'éviter l'extraction de ressources naturelles plutôt que de retourner dans l'industrie du verre. L'accélération de ce modèle nécessite d'avoir une approche intégrée, et une convergence des politiques énergétiques et de déchets. C'est l'enjeu autour du combustible solide de récupération, ou des matières qui pourraient être valorisées énergétiquement en local plutôt qu'exportées pour qu'une partie soit recyclée. C'est aussi à travers l'innovation sur les territoires ; innovation pas forcément high-tech, mais plutôt de modèle social ou logistique, qui permettrait d'avoir des choses vraiment adaptées. Pour cela, il faut un espace réglementaire suffisant pour pouvoir expérimenter ces modèles. On peut imaginer, on peut penser au site d'enfouissement simplifié sur les sites isolés de Guyane, ou encore à l'expérimentation de la consigne de tri pour recyclage en Guadeloupe. Enfin, il faut impulser un changement de comportement important et rapide, notamment à travers l'éducation et la prise en main politique importante des questions de communication sur ces questions.

Conclusion
L'Outre-mer, bien qu'elle ait un retard structurel réel, a des atouts pour être un véritable laboratoire sur l'économie circulaire. Notamment, la petite échelle permet de déployer des solutions dont le retour d'expérience peut être rapide et profitable à tous.