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Description

Nyls de Pracontal, président du groupe Outre-mer du comité français de l'UICN, discute dans cette vidéo de l'enjeu de préservation de la biodiversité dans les Outre-mer. Il montre tout d'abord la richesse de cette biodiversité ultramarine avant de mettre en lumière les multiples pressions anthropiques qui pèsent sur elle. Il présente enfin une série d'outils qui permettent de mieux préserver cette biodiversité.

Objectifs d'apprentissage :
- Comprendre ce qui fait la richesse de la biodiversité ultramarine.
- Appréhender l'ensemble des pressions qui pèsent aujourd'hui sur les espèces et les espaces ultramarins.
- Identifier les principaux programmes qui existent aujourd'hui pour conserver la biodiversité ultramarine.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
Mentions Licence
  • Sciences de la vie et de la Terre
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+3
Objectifs de Développement Durable
  • 15. Vie terrestre
Thèmes
  • Ecosystèmes et biodiversité
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
biodiversitéOutre-merchangement climatiqueinvasions biologiquesprotection des espèces
Les récifs coralliens : des enjeux majeurs pour l'Outre-mer
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Biodiversité en Outre-mer : des pressions en tropiques
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Inégalités et pauvreté dans les outre-mer : un état des lieux
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Les inégalités de genre dans les Outre-mer
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Alimentation et nutrition dans les départements et régions d’Outre-mer
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La transition énergétique dans les Outre-mer
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Le stockage du carbone dans le sol pour lutter contre le changement climatique
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La transition vers une économie circulaire dans les Outre-mer
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Échouages des sargasses et pollutions par les pesticides : transformer une contrainte en opportunité
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Contributeurs

de Pracontal Nyls

président du groupe Outre-mer du comité français de l'UICN

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La biodiversité en Outre-mer
par Nyls de Pracontal, président du groupe Outre-mer du comité français de l'UICN

C'est un exercice complexe de présenter l'Outre-mer français car, en réalité, derrière cette appellation, il se distingue 12 pays, 12 territoires très singuliers. Avant de présenter les grands enjeux de conservation de la biodiversité de ces territoires, nous allons faire un rapide tour de ces terres et ces mers.

1. Caractéristiques générales des Outre-mer
Le premier constat que l'on peut faire est que ces territoires sont présents sur tous les continents et même en Antarctique, avec la terre Adélie. En termes de surface, contrairement à une idée souvent véhiculée, ils représentent un quart de la surface terrestre de la métropole. Au niveau marin, c'est très spectaculaire, puisque grâce aux Outre-mer, la France possède le deuxième domaine maritime mondial et accueille ainsi 20 % des atolls du monde. Voilà pour le contexte géographique, qui, nous allons le voir, a une grande influence sur le sujet qui nous intéresse aujourd'hui.

2. Une biodiversité extraordinaire
Un des marqueurs forts de ces territoires, c'est qu'ils accueillent une biodiversité extraordinairement riche, notamment en raison du positionnement géographique de ces territoires situés dans les trois grands océans de la planète et sous différentes latitudes, de l'Antarctique au Subarctique, en passant par la ceinture tropicale.

Dans la mesure où ces territoires sont principalement des îles, leur évolution séparée des continents est à l'origine d'un fort taux d'endémisme, c'est-à-dire la présence d'espèces de faune et de flore que l'on ne rencontre que dans ces territoires. Ainsi, la France, grâce aux Outre-mer, est l'un des pays les plus riches au monde en matière de biodiversité, tant marine que terrestre. Pour illustrer ce propos, deux exemples remarquables.

1) La Nouvelle-Calédonie, représentée ici à la même échelle que l'Europe, accueille un nombre exceptionnel d'espèces endémiques, largement supérieur à la France hexagonale. En totalité, l'Outre-mer français présente le même nombre d'espèces endémiques que toute l'Europe, environ 4 000.

2) Un autre exemple porté à son paroxysme : l'île de Rapa, en Polynésie, qui fait la taille de quelques arrondissements de la ville de Paris et qui accueille plus de 300 espèces que l'on ne retrouve nulle part ailleurs sur la planète.

Toutefois, cette biodiversité extraordinaire est très menacée et la France, en raison de situation d'extrême sensibilité dans ces Outre-mer, figure au 5e rang des pays hébergeant le plus grand nombre d'espèces menacées au monde. En 2013, sur ce diagramme, la France est passée de 1 039 espèces mondialement menacées à 1 606 espèces, perdant un rang de plus en moins de dix ans. Il y a par exemple plus d'espèces en danger d'extinction aux petites Antilles, dont font partie la Guadeloupe, la Martinique, Saint-Barthélemy et Saint-Martin, que dans toute l'Amérique du Nord et Centrale réunies. Mais ces situations ne sont pas exactement les mêmes dans tous les Outre-mer.

3. Destruction des habitats
A La Réunion ou en Nouvelle-Calédonie, une part très importante de leurs espaces naturels a été perdue suite à la colonisation, au développement de l'agriculture, de l'industrie, de l'urbanisation. Un cas très symbolique se trouve (toujours) en Nouvelle-Calédonie : la disparition de 99 % de la surface originelle des forêts sèches, ayant abrité de nombreuses espèces endémiques aujourd'hui disparues. Mais cette destruction des habitats a été plus faible dans d'autres territoires. Ainsi, en Guyane, qui abrite la seule forêt amazonienne d'Europe, pour des raisons historiques, mais aussi parce qu'il s'agit d'un vaste territoire continental, ou l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon en face des côtes de Terre-Neuve, qui abrite des tourbières remarquables ainsi que l'unique forêt boréale de France. Alors, quelle est la situation aujourd'hui ?

4. Autres pressions
Diverses pressions sur les écosystèmes sont en cours : l'exploitation ou la surexploitation des ressources minières, notamment en Nouvelle-Calédonie avec le nickel, en Guyane avec l'orpaillage, le développement de l'urbanisation et de la destruction des forêts... Mayotte, par exemple, avec près de 500 habitants au km², vit actuellement de grandes dégradations de ses écosystèmes.

Il y a aussi les incendies qui se déclarent de plus en plus suite aux modifications des régimes pluviométriques. Cela entraîne des épisodes de sécheresse propices au développement de ces incendies et qui sont difficilement maîtrisables en raison des terrains très accidentés en Nouvelle-Calédonie, à Mayotte, en Martinique ou encore à La Réunion. Ces grandes pressions ont un impact également direct sur les écosystèmes côtiers et marins. L'action répétée des fortes pluies entraîne une érosion des sols qui permet la mobilisation de grandes quantités de sédiments qui a pour conséquence directe une forte dégradation des lagons et des baies par un apport de boue qui empêche la vie marine de s'y maintenir.

Il y a également les invasions biologiques, notamment et singulièrement sur les îles océaniques qui présentent une grande sensibilité à cette menace-là. C'est l'un des drames auxquels font face les écosystèmes insulaires qui luttent à grand renfort d'énergie et de moyens financiers contre ces espèces exotiques envahissantes, sur terre comme en mer, pour sauvegarder les espèces locales.

Enfin, les modifications climatiques en cours affectent, elles aussi, de plein fouet les territoires d'Outre-mer par la multiplication attendue des fréquences des cyclones et de leur intensité, par une diminution déjà observée de 20 % de la richesse floristique en dix ans, sur un inselberg des Nouragues, en Guyane. Dans les terres Australes, l'élévation de la température permet la production de graines fertiles de graminées introduites. Leur dissémination par les vents va permettre une invasion rapide de ces îlets. Les milieux marins des régions tropicales sont autant menacés par le changement climatique, surtout les récifs coralliens, sans parler des grands projets d'infrastructures ou industriels pouvant encore affecter durablement les écosystèmes. On pense évidemment à la piste longue de Mayotte, au projet de nouvelles routes du littoral ainsi qu'au projet d'exploitation du phosphate en Polynésie, à Makatea. 

5. Quel avenir pour la biodiversité ?
Quel avenir durable pour les Outre-mer ? Ces territoires d'Outre-mer sont exceptionnels. Quatre d'entre eux bénéficient d'une reconnaissance internationale au titre des patrimoines naturels et culturels par leur classement au Patrimoine mondial de l'humanité. La Martinique vient de déposer son dossier et il se dit même que le projet des Marquises pourrait être relancé.

Deux documents-cadres structurent également les initiatives dans ces territoires : la Stratégie nationale pour la biodiversité, en cours de réflexion et dont il faut pleinement se saisir pour faire valoir les spécificités des Outre-mer en termes de reconnaissance des enjeux et de sécurisation des moyens pour atteindre les objectifs ambitieux de reconquête de biodiversité, ainsi que la nouvelle Stratégie aires protégés, juste validée, qui viendra compléter le réseau déjà bien fourni dans les territoires d'Outre-mer.

L'ambition aujourd'hui est clairement d'embarquer encore plus les usagers, les riverains, les élus et les communautés d'habitants dans la reconnaissance et la prise en main de la gestion de ces espaces naturels précieux.

D'un point de vue plus technique, des mécanismes financiers se déploient et se pérennisent, comme les dispositifs européens Best ou Kiwa dans le Pacifique, ou encore le programme Life+ qui accompagne les projets de conservation dans les territoires, et des initiatives d'accompagnement technique telles que l'Ifrecor pour la protection des récifs coralliens apportée par la France, le Pôle-relais zones humides tropicales, le suivi des espèces exotiques envahissantes... Toutes ces initiatives, souvent portées, d'ailleurs, par des associations locales de protection de la nature. Et puis, une donne qui a changé récemment, les régions et collectivités d'Outre-mer, aujourd'hui, sont cheffes de file biodiversité. Elles se saisissent de cette compétence et impulsent des dynamiques en faveur de la biodiversité, notamment à travers la création des Agences régionales pour la biodiversité, en lien avec l'Office français de la biodiversité, et qui vise à mettre de la transversalité et de la cohérence dans les politiques publiques.

6. Conclusion
En conclusion, l'espoir, c'est que la biodiversité, le vivant, sa connaissance et sa protection ne soient plus une affaire de spécialistes, et que les ultramarins se réapproprient ces trésors de vie en appréhendant la nature comme un allié et en investissant à court et long terme sur la nature pour que perdure, au milieu des espèces remarquables, une espèce tout aussi singulière qu'est l'homme et la femme d'Outre-mer.