En ligne depuis le 08/10/2014
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Description
Nathalie Machon, professeure du Muséum national d'Histoire naturelle, apporte dans cette vidéo des éléments sur le fonctionnement des populations animales et végétales en ville, milieux marqués par une importante fragmentation des habitats et des conditions physicochimiques contraignantes. Elle illustre son propos par une étude réalisée sur les pieds d'arbres autour de la gare de Bercy, à Paris.
Objectifs d'apprentissage :
- Appréhender le fonctionnement des populations animales et végétales en ville
- Avoir un exemple de dynamique des populations végétales
État
- Labellisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
- Paternité
Nature pédagogique
- Cours
Niveau
- Bac+2
- Bac+3
Objectifs de Développement Durable
- 11. Villes et communautés durables
- 15. Vie terrestre
Types
- Grain audiovisuel
Contributeurs
MACHON Nathalie
Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC UVED « Biodiversité ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.
Fonctionnement des populations animales et végétales en ville
Nathalie Machon
Professeur, Muséum national d’Histoire naturelle
Dans les villes, la biodiversité se trouve essentiellement dans les espaces verts autour des immeubles, dans les parcs, les jardins, les friches ou les bords de rivière. Mais on peut la trouver également dans des petits interstices comme les pieds d'arbres d'alignement, au pied des murs ou sur les voies de communication qui sont relativement riches en espèces particulièrement invasives.
1. Dynamique des populations
Le fonctionnement d’une population dépend de beaucoup de facteurs. Elle croît lorsqu'il y a beaucoup de naissances et quand il y a des individus qui proviennent d'autres populations. Elle décroît lorsque la mortalité est élevée, qu'il y a peu de reproduction locale et que des individus migrent vers d'autres populations.
La survie des populations est conditionnée par la présence d'habitats disponibles pour les espèces, par des ressources alimentaires conséquentes, par les nombreuses descendances qui peuvent être produites, et par des apports en provenance de milieux périphériques. Par exemple, sur un talus, on peut avoir des populations de moutardes qui sont arrivées avec la terre de remblais de ce talus sous forme de graines. Elles investissent la ville de cette manière-là.
Les caractéristiques génétiques des populations ont aussi une incidence sur leur fonctionnement.
Lorsque les populations sont petites et isolées, elles sont relativement pauvres génétiquement. Les individus sont conduits à se reproduire entre « apparentés », ce qui peut être relativement délétère en raison de la dépression de consanguinité. Cela peut donc les empêcher de se reproduire correctement, sauf pour des espèces qui sont très dispersantes : des plantes qui peuvent envoyer des graines dans toute la ville, ou des individus animaux qui peuvent se mouvoir malgré la présence de bâtiments ou de routes.
2. Rôle des interactions
Les interactions entre espèces ont aussi une importance très forte sur le fonctionnement des populations. Les interactions entre l'homme et les autres espèces sont très intenses en ville. Il peut y avoir des campagnes d'éradication. Il y a une compétition qui est très forte : l'humain utilise beaucoup l'espace et il est donc en compétition avec les autres espèces. Grâce à l'alimentation que les espèces trouvent en ville, cela peut aussi agir sur leur fonctionnement avec par exemple le recours aux déchets ou bien les phénomènes de nourrissage.
Il y a aussi des interactions entre les autres espèces que l'espèce humaine. Elles ne sont pas toujours très bien régulées parce qu'elles sont plus faibles en ville que dans d'autres milieux. Il y a donc des risques de pullulation. Il peut aussi y avoir des problèmes de reproduction quand les individus ne sont pas assez nombreux, ou encore des phénomènes de maladies.
3. Programme de recherche
Nous avons un programme de recherche sur la végétation des pieds d'arbres en ville. Il vise à étudier la dynamique des populations végétales aux alentours d'une source importante de graines qui est la gare de Bercy, à Paris. Les voies de communication renferment beaucoup d'espèces. Elles convergent en provenance de diverses localités de France et d'ailleurs et elles peuvent donc envoyer beaucoup de graines dans les quartiers qui sont autour d'elles.
Le quartier de Bercy est un quartier riche en arbres d'alignement. Il y a beaucoup de pieds d'arbres qui potentiellement peuvent accueillir les espèces en provenance de toute la France. L’étude porte sur 1500 pieds d'arbres dans le quartier de Bercy. Nous avons fait des inventaires de la flore qui se trouve au pied de ces arbres tous les ans depuis 2009.
Cette étude nous a montré qu'un certain nombre d'espèces poussait au pied des arbres. Elles poussent d'autant mieux que le pied des arbres est disponible pour les accueillir. On trouve donc beaucoup d'espèces dans les pieds d'arbres libres, un petit peu moins lorsque les pieds d'arbres sont ornés de grilles ajourées ou pleines, et encore moins lorsqu'un sol stabilisé fait de ciment et de sable a été placé au pied des arbres. Les espèces trouvées dans ce quartier de Bercy sont au nombre de 250. Les plus fréquentes sont le pâturin annuel, le pissenlit, la renouée des oiseaux ou encore l’orge des rats.
Nous avons voulu voir quelle était leur dynamique. Est-ce qu'elle répondait à un modèle en pas japonais, c'est-à-dire que les populations migraient d'une année sur l'autre d'un pied d'arbre à son voisin ? Ou bien ce fonctionnement était-il plutôt en île-continent avec la gare de Bercy qui serait un continent et qui enverrait des graines dans tous les pieds d'arbres aux alentours et gommerait finalement la progression qu'il pourrait y avoir d'un pied d’arbre à l'autre ? Les plantes qui ont les graines les plus lourdes, comme l'orge, répondent à un modèle en pas japonais. D'une année sur l'autre, grâce aux graines qui sont envoyées d'un pied d'arbre à l'autre, on voit les espèces progresser dans la ville, au niveau de ces pieds d'arbres. Pour d'autres espèces qui ont des graines nombreuses et très légères, c'est plutôt le modèle île-continent. La gare de Bercy envoie des graines de façon massive sur l'ensemble du quartier et tous les pieds d'arbres bénéficient de la même manière de ces pluies de graines. Enfin, certaines espèces répondent à modèle mixte. C'est-à-dire qu’autour de la gare de Bercy, il y a le phénomène île continent mais ensuite, la progression se fait de proche en proche, à l'intérieur du quartier. C'est le cas par exemple de la laitue et de la capselle.
4. Conclusion
De nombreux animaux et végétaux vivent en ville. Le fonctionnement de leur population est régi à peu près par les mêmes lois que dans les milieux naturels. Mais les contraintes sont beaucoup plus fortes dans la ville du fait de la densité humaine et des activités qu'elle déploie.