En ligne depuis le 28/09/2015
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Description
Dans cette vidéo, Sylvain Rode se focalise sur l'enjeu et le développement des énergies renouvelables dans les villes. A l'aide de nombreux exemples, il présente différentes stratégies (smart grids, réseaux de chaleur, écoquartier, etc.) visant à accroître l'autonomie énergétique des villes.
État
- Labellisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
- Paternité
Mentions Licence
- Génie civil
- Géographie et aménagement
Nature pédagogique
- Cours
Niveau
- Bac+1
- Bac+2
Objectifs de Développement Durable
- 7. Energie propre et d'un coût abordable
Thèmes
- Numérique responsable
Types
- Grain audiovisuel
Contributeurs
RODE Sylvain
Sylvain RODE, Maître de conférences – Université de Perpignan Via Domitia
Les villes concentrent aujourd'hui plus de la moitié de la population mondiale et produisent environ 80 % de la richesse mondiale. Environ 70 % de l'énergie consommée et plus de 70 % des émissions de dioxyde de carbone est également le fait des territoires urbains.
En France, les territoires urbains au sens large, couronne périurbaine comprise, abritent plus de 80 % de la population et consomment ou représentent l'essentiel de la consommation énergétique nationale.
Les enjeux énergétiques sont donc particulièrement aigus en ville et les politiques d'aménagement urbain ont donc un rôle essentiel à jouer en matière de transition énergétique.
Notion qu'on peut définir comme le passage d'un système reposant essentiellement sur l'utilisation d'énergies fossiles et fortement émettrices de gaz à effet de serre que sont le pétrole, gaz et le charbon, à un mix énergétique valorisant davantage les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique.
Quelles sont donc les solutions envisagées et les projets mis en œuvre pour intégrer les énergies renouvelables aux espaces urbains et participer ainsi à un développement urbain plus durable ?
La première piste qui est explorée en la matière, dans le cadre de la ville intelligente, c'est le développement de réseaux électriques intelligents.
Alors, la notion de « smart city » désigne l'intégration des technologies de l’information et de la communication à l'urbanisme, en bref une ville connectée.
Les réseaux électriques intelligents qui sont développés dans ce cadre vont se donner pour objectif de connecter ou d’interconnecter l'ensemble des utilisateurs qui sont aussi parfois producteurs d'électricité afin de mieux gérer la consommation, la livraison et la production d'électricité.
L'ensemble des sites de production décentralisés et multipliés sont donc mis en réseau, l'énergie ainsi produite est mise en partage sur le réseau et est distribuée en fonction des besoins en temps réel des utilisateurs.
C'est ce qui fait dire à l’essayiste américain Jérémy Rifkin que les « smart grid » seraient en quelque sorte l'Internet de l'énergie.
Alors, le réseau électrique intelligent permet donc de produire de l'électricité et de la redistribuer en fonction des besoins et d'ajuster en temps réel l’offre et la demande tout en intégrant la production d'énergie renouvelable.
Plusieurs configurations peuvent permettre le développement de réseaux électriques intelligents.
• Tout d'abord ça peut se faire dans le cadre de quartiers urbains préexistants.
C'est ce qui se fait à Nice par exemple avec le projet Nice Grid qui est un démonstrateur de quartier solaire intelligent dans lequel donc sur la commune de Carros, en périphérie ouest de Nice, 200 foyers volontaires se font producteurs d'électricité grâce aux panneaux photovoltaïques qui sont installés sur les toits de leurs maisons et dans ce quartier de Carros, des systèmes de stockage d’énergie sont développés à la fois via des grosses batteries dans le quartier et puis via des batteries de plus petites dimensions au sein de chaque maison, les équipements électriques intelligents sont développés au sein de chaque maison ce qui permet l'interconnexion de l'ensemble de ces foyers dans un grand réseau électrique intelligent, connecté via des moyens informatiques.
• Une autre situation où un réseau électrique intelligent peut être mis en œuvre, c’est à l'occasion de la création de quartiers nouveaux.
C'est notamment le cas au Japon avec le projet Fugisawa – Sustainable Smart Town ou ville durable intelligente où là aussi l'accent est mis sur la production d'énergie solaire et d’énergie renouvelable à travers l'énergie solaire et également sur le stockage individuel de cette électricité. Également, on retrouve ce réseau électrique et ce réseau informatique qui vont permettre d'optimiser la gestion de la production et de la distribution d'électricité.
Un deuxième moyen très sollicité pour développer les énergies renouvelables au sein des territoires urbains, ce sont les réseaux de chaleur urbains, également appelés réseaux de chauffage urbains.
A l'échelle nationale française par exemple, dans la foulée du Grenelle de l'environnement, des objectifs ambitieux ont été fixés à l'horizon 2020 pour notamment augmenter la part des logements raccordés au réseau de chaleur mais également surtout augmenter la proportion d'énergies renouvelables dans l'alimentation de ces réseaux de chaleur.
Alors, un réseau de chaleur, c'est un système de distribution de la chaleur qui se situe à l'échelle intermédiaire du quartier ou d'une portion de la ville. C'est un système qui n'est ni totalement centralisé comme peut l'être le système électrique nucléaire, ni totalement décentralisé comme peuvent l'être les systèmes de production solaires individuels mais du coup qui va, grâce à une unité de production de chaleur, distribuer la chaleur nécessaire à un ensemble de bâtiments via un réseau primaire, des sous-stations et un réseau ou des réseaux secondaires à des bâtiments aussi bien logements que bureaux, que bâtiments publics, etc.
Les réseaux de chaleur depuis les années 2000 vont privilégier une alimentation via des énergies renouvelables. Les réseaux de chaleur se sont développés au cours du XXe siècle en fonction des grandes étapes de l’urbanisation mais la nouveauté c'est ce recours croissant aux sources d'énergie renouvelable dans leur alimentation.
Un tiers à peu près des 450 réseaux de chaleur existants en France sont alimentés par des énergies renouvelables mais un certain nombre de collectivités font le choix de convertir leurs réseaux de chaleur pour les alimenter grâces à des sources d'énergie renouvelables.
C'est ce qui s'est passé par exemple à l'occasion d'un nouveau quartier, l’éco quartier Ginko à Bordeaux, dans lequel précisément le choix a été fait de créer un réseau de chaleur alimenté par une chaudière bois, elle-même alimentée par une production locale de bois des forêts d'Aquitaine et l'objectif ambitieux c’est de couvrir l'intégralité des besoins de chaleur des logements et des équipements publics de ce quartier grâce à des énergies renouvelables et notamment grâce à cette chaufferie bois.
Une autre configuration où les réseaux de chaleur peuvent être développés et intégrer les énergies renouvelables, c'est au sein des tissus déjà existants.
En effet, la ville se renouvelle extrêmement lentement, 1 % par an seulement du tissu urbain est renouvelé grâce à des constructions neuves donc agir dans les quartiers neufs ce n'est pas suffisant pour atteindre les objectifs de transition énergétique, il faut également agir au sein des tissus urbains existants.
C'est le choix qu'a fait Orléans en reconvertissant ses deux réseaux de chaleur existants -qui fonctionnaient jusqu'à présent au gaz et au fioul -, aux énergies renouvelables notamment ces deux réseaux de chaleur sont désormais alimentés par des chaufferies bois. Là aussi, bois qui est collecté dans un rayon de 150 km autour de la ville avec donc, pas loin du quart de la population de la ville d'Orléans qui est aujourd'hui alimentée grâce à ces chaufferies bois.
D'autres villes ou d'autres projets peuvent être beaucoup plus ambitieux, notamment en se donnant pour objectif de couvrir l'intégralité de leurs besoins énergétiques grâce à des énergies renouvelables.
C'est par exemple ce qui se fait à travers le projet de Masdar City dans l'émirat d'Abu-Dhabi. Le plan de cette ville nouvelle qui a été conçue par le cabinet d'architectes britanniques Norman Foster se donne pour ambition justement d'être une ville zéro rejets et zéro déchets et de là aussi couvrir l'intégralité de ses consommations énergétiques grâce aux énergies renouvelables notamment en développant la production électrique grâce à des panneaux photovoltaïques, en produisant l'eau chaude sanitaire grâce à des panneaux solaires thermiques, l'alimentation en eau serait, elle, assurée par une usine de désalinisation elle aussi alimentée par l'énergie solaire et puis enfin, les transports favoriseraient aussi des modes de transports électriques alimentés par une électricité d'origine renouvelable, photovoltaïque, pour remplacer les voitures à moteur thermique par des voitures et des bus électriques ou des systèmes automatisés de transports électrifiés.
Un certain nombre de villes existantes, au-delà de ces projets très ambitieux et un peu prométhéens de ville nouvelle et bien un certain nombre de villes existantes se donnent pour objectif d'accroître fortement la part des énergies renouvelables dans la couverture de leurs besoins.
C'est par exemple le cas de Thisted au Danemark qui est une structure intercommunale qui regroupe 11 villes et qui a développé à partir des années 1980 une ambitieuse politique de développement des énergies renouvelables, qui a donné des résultats assez spectaculaires puisqu'aujourd'hui l'intégralité de la consommation électrique de cette structure intercommunale est couverte par les ENR, notamment grâce à l'énergie éolienne et puis 85 % de l'énergie nécessaire au chauffage des 46 000 habitants de cette structure intercommunale est couverte là aussi grâce aux énergies renouvelables et en particulier grâce à l’incinération des déchets.
Et puis le deuxième exemple qu'on peut donner de ces collectivités qui développent des politiques ambitieuses en matière de développement des énergies renouvelables, c'est la communauté d'agglomération de Perpignan, puisque celle-ci a signé en 2008 une convention cadre avec l'État visant à faire de Perpignan, à l'horizon 2015, la première ville à énergie positive 100% renouvelable d'Europe.
Ces objectifs ambitieux sont passés par le développement d'énergies renouvelables de différents types sur le territoire de cette intercommunalité, à la fois le développement de parcs éoliens mais aussi de parcs photovoltaïques aussi bien au sol que sur les toits des bâtiments notamment sur les toits du marché d'intérêt national Saint-Charles ou sur les toits de la nouvelle gare TGV de la ville ou du nouvel hôtel d'agglomération et puis également ça passe par la valorisation d'énergie, la valorisation disons de l'énergie tirée d'une usine d'incinération des ordures ménagères.
Donc on le voit à travers ces différents éléments qui ont été évoqués, les liens sont extrêmement étroits entre les enjeux urbanistiques et les enjeux énergétiques et cela implique la nécessité d'une réflexion qui soit coordonnée entre la transition énergétique et l'aménagement urbain.