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Description

Hubert Géraux, expert "Conservation & Plaidoyer Nouvelle-Calédonie" au sein du WWF France, discute dans cette vidéo du rôle des associations pour un développement durable dans les Outre-mer. Il montre que ces associations, très variées, apportent de multiples contributions possibles aux projets territoriaux de développement durable. Thibaud Bizien, cofondateur de Caledoclean, en apporte une illustration.

Objectifs d'apprentissage :
- Appréhender la diversité du tissu associatif en matière de préservation de l'environnement.
- Identifier les contributions possibles des associations environnementales aux projets territoriaux de développement durable.
 

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
Nature pédagogique
  • Entretiens et témoignages
Niveau
  • Bac
Objectifs de Développement Durable
  • 14. Vie aquatique
  • 15. Vie terrestre
  • 17. Partenariats pour la réalisation des objectifs
Thèmes
  • Ecosystèmes et biodiversité
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
associationsdéveloppement durableOutre-merprotection de l'environnementécologie
La science de la durabilité : une approche émergente pour répondre aux défis sociaux et environnementaux
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Vers un développement durable dans les Outre-mer : le rôle des collectivités locales
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Innovation en outre-mer : freins et opportunités
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La mise en politique du développement durable dans les Outre-mer
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Contributeurs

Géraux Hubert

expert "Conservation & Plaidoyer Nouvelle-Calédonie" , WWF France

Bizien Thibaud

cofondateur de Caledoclean

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Vers un développement durable dans les Outre-mer : le rôle des associations
par Hubert Géraux (WWF France) et Thibaud Bizien, cofondateur de l’association Caledoclean

[ H. Géraux parle]

1. Pourquoi des associations environnementales ?
Tout d'abord, pourquoi les associations s'investissent sur le sujet du développement durable ? La création même des associations environnementalistes, qu'elles soient orientées vers la réduction de l'empreinte écologique ou la préservation de la biodiversité, ou les deux, traduit : un besoin d'agir pour combler une lacune d'engagement des pouvoirs publics par rapport au niveau d'exigence de la société civile. 

Un besoin d'exister, de prendre sa part aux côtés de l'autorité publique dans le débat de société avec une voix officialisée. C'est particulièrement important dans l'Outre-mer français, avec les peuples autochtones et leur besoin de positionnement sur ce sujet.  Enfin, un besoin de mettre sur la table du débat de la société des sujets dont les pouvoirs publics ne s'emparent pas encore.

2. Les associations environnementales en Nouvelle-Calédonie
En Nouvelle-Calédonie, la mobilisation environnementaliste s'est développée sur 50 ans et a ancré le sujet du développement durable dans le débat de société actuel. Un des indicateurs indiscutables de cette évolution, c'est la croissance très forte, sur les 20 dernières années, du traitement médiatique du sujet. En 20 ans, multiplié par 5 dans le quotidien des Nouvelles calédoniennes, par exemple. Du fait de la petite taille des populations des collectivités d'Outre-mer, cet engagement associatif pour le développement durable se fait dans une grande proximité avec les détenteurs du pouvoir, que ce soient les élus ou les chefs de grandes entreprises. Alors, ça a un côté positif, parce que ça permet une accessibilité aux décideurs et donc un plaidoyer en direct avec les détenteurs du pouvoir. Mais ça peut avoir également un impact négatif, avec une possible pression pouvant être exercée par les porteurs du pouvoir sur la voix associative quand celle-ci s'exprime de manière discordante avec des élus ou des entreprises impactant l'environnement. Le paysage environnementaliste calédonien est très divers et polymorphe. Nous avons des associations qui ont 50 ans d'âge. Nous avons certaines associations qui ont été créées il y a une semaine. Donc c'est un contexte très dynamique. Nous avons des ONG internationales, nous avons des ONG qui fonctionnent seulement avec des bénévoles, d'autres avec des bénévoles et des salariés. 

3. Positionnements de ces associations
Cette diversité d'acteurs s'accompagne également d'une diversité de postures et de stratégies d'action qui sont complémentaires dans leurs impacts. On peut les regrouper en deux grandes familles.
La famille collaborative, donc des accompagnements de pouvoirs publics dans le déploiement d'actions. Ça peut être pour des inventaires naturalistes ou de la sensibilisation. C'est le cas de la Société calédonienne d'ornithologie ou le Centre d'initiation à l'environnement. Du soutien à la cogestion d'aires protégées, comme Dayu Biik à Hienghène, dans le nord-est du territoire. Ou encore la mobilisation physique des Calédoniens, telle que sur les chantiers de Caledoclean.

La deuxième famille, c'est la famille davantage d'opposition, de posture déclarative par voie médiatique et juridique, par voie de pétition, ainsi qu'en siégeant dans des instances où la société civile a sa place à côté du pouvoir public et des entreprises. Donc c'est le cas de comités, de commissions. Nous pouvons citer Ensemble pour la planète, Action Biosphère, UFC-Que Choisir. 
Parfois, ça peut être les deux, selon les sujets. Et là, on peut citer Sea Shepherd, l'Association de sauvegarde de la nature néo-calédonienne, SOS Mangroves, etc.

4. Contribution des associations
Elles sont diverses, et j'en citerai un petit portfolio de manière non exhaustive. Tout d'abord, assurer une continuité dans l'engagement sociétal sur un sujet, alors que celui-ci peut décroître, voire disparaître, selon la ligne politique des exécutifs. On peut citer le cas des sacs plastiques jetables, dont la disparition n'est plus une ambition politique affichée, alors qu'elle reste le combat d'associations sur le terrain, telle que Zéro Déchet NC. Mobiliser des ressources humaines sur l'enjeu du développement durable au-delà de ce que peut mobiliser une collectivité. C'est le cas de la mobilisation citoyenne au bénéfice de l'aire protégée dans laquelle nous nous trouvons, du Ouen Toro, que porte le WWF depuis 12 ans. Où, quasiment tous les jours, il y a une action de bénévole ou de parrain. Action, bien sûr, gratuite pour la collectivité. C'est également mobiliser des moyens financiers additionnels à ceux des collectivités locales via des outils de levée de fonds qui sont spécifiques au monde associatif. Que ce soit la générosité publique, des événementiels, des mécénats, l'accès à des fondations. On peut citer par exemple le cas de Conservation International, avec un soutien historique et financier pour la gestion du mont Panié, dans le nord-est de la Calédonie. Expérimenter de nouvelles solutions pour offrir aux pouvoirs publics et à la population des démonstrations inspirantes qui vont inviter au changement. C'est l'exemple de Male'va, dans sa démarche pour faire la promotion de la permaculture et des agricultures naturelles, qui est rejoint par des programmes institutionnels, tel que le programme européen PROTEGE. Permettre, grâce à la souplesse et à la capacité adaptative des associations et ONG, le développement de projets qu'il serait difficile de développer pour une collectivité. C'est le cas, par exemple, dans le contexte tribal, où le temps administratif n'est pas forcément en adéquation avec le temps coutumier. Initier, convaincre et accompagner les pouvoirs publics dans la mise en place de projets de reconnaissance et de protection des éléments cruciaux de la biodiversité de notre territoire. C'est le cas par exemple du parc provincial de la Dumbéa, projet initié par l'association locale de riverains Dumbéa rivière vivante, soutenu par le WWF. Démarche qui a démarré en 2001 et qui s'est achevée en 2013 ; donc 12 ans pour obtenir la création du parc provincial de la Dumbéa. C'était également le cas de l'inscription des lagons calédoniens au patrimoine mondial de l'Unesco, initiée par deux associations : Action Biosphère et Corail Vivant, et repris ensuite par les collectivités. Permettre une mobilisation bénévole et critique de compétences pour gérer une problématique environnementale spécifique que seule, la collectivité ne pourrait pas gérer. C'est le cas par exemple du groupe RLA, l'autorité Liste rouge de l'UICN, de l'association locale Endemia, qui regroupent des dizaines d'experts bénévoles assurant l'évaluation mondiale du statut d'espèce menacée animale et végétale de Nouvelle-Calédonie. Enfin, être le garde-fou de valeurs fondamentales du développement durable. En effet, le sujet du développement durable est un sujet très porteur politiquement et qui est approprié par tous les acteurs de la société, et qui est traité à la lumière de leur compréhension du sujet et aussi de leurs intérêts. Les ONG jouent donc un rôle crucial pour s'assurer et challenger la cohérence des discours et des actes. On peut citer, en ce moment, sur l’écomobilité, l'association Droit au vélo, qui challenge les collectivités sur la place de ce mode doux dans la transition énergétique du territoire, et particulièrement sur le Grand Nouméa.

Les contributions au développement durable du monde associatif sont donc extrêmement nombreuses et diverses, et la Calédonie conforte ce constat. Du triptyque d'acteurs collectivités, entreprises, associations, le monde associatif est probablement celui qui a la plus grande souplesse pour évoluer et se réinventer en apprenant de ces premiers enseignements. Je vous partage le témoignage de Thibaut Bizien, cofondateur de l'association locale Caledoclean.

5. Témoignage
[Témoignage de Thibaud Bizien]
Fondée en 2012, Caledoclean a pour objectif d'organiser et de soutenir toute action liée à l'écologie en Nouvelle-Calédonie, avec deux missions : dépolluer l'environnement au travers d'actions de nettoiement et reboiser les sites naturels dégradés afin de converser la biodiversité. Comme la plupart des initiatives associatives locales, nous avons débuté avec un petit groupe de bénévoles motivés avec lequel nous avons mené pendant des années des actions de plus en plus nombreuses et conséquentes. Avec de plus en plus de partenaires, de sollicitations, et une véritable montée en puissance de notre action, nous avons fait face aux limites du bénévolat et nous avons dû faire le choix de la professionnalisation et faire évoluer notre organisation. Par l'intermédiaire du salariat, nous avons pu rééquilibrer les implications de chacun, mais aussi monter en compétences, être plus disponibles et efficients dans la réalisation de nos missions grâce au soutien des institutions. Cela nous a amenés à établir un lien de partenariat avec les collectivités, avec lesquelles nous travaillons étroitement pour soutenir la mise en place de la politique publique, à partir du moment où nous nous y reconnaissons. Les associations comme la nôtre sont un véritable outil pour les institutions, qui disposent ainsi d'un réseau de proximité avec les administrés qui œuvrent au développement de la communauté en entraînant au passage des économies d'échelle remarquables par le biais du travail bénévole. Mais nous devons faire attention à ne pas sombrer dans une dynamique de délégation de service public et ne pas nous substituer aux collectivités sous prétexte de versements de subventions. Il faut agir en tant que partenaires et non en tant que prestataires. Et nous devons challenger les institutions et porter la voix de la société civile, qui est désireuse de s'engager aux côtés des acteurs privés, eux aussi impliqués dans la construction du nouveau modèle de société.