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Description

Dans cette vidéo, Michael Ghil s'appuie sur les différents scénarios d'évolution du climat pour discuter de la notion de certitude et d'incertitude. Il souligne le rôle de la complexité du système climatique et de sa non linéarité dans les difficultés rencontrées pour en prévoir les évolutions futures.

Objectifs d’apprentissage :
- Appréhender les notions de prévisibilité, de certitude et d'incertitude
- Comprendre le rôle et la complexité du système climatique.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Niveau
  • Bac+2
  • Bac+3
Types
  • Grain audiovisuel
Le système climatique : échelles d'espace et échelles de temps
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Le rôle de l'effet de serre sur le climat, de Joseph Fourier à aujourd'hui
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Changement climatique : la naissance d'une problématique
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La sécheresse au Sahel : première interrogation scientifique sur le rôle de l’homme sur le climat
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La détection et l'attribution des changements climatiques, le rôle des facteurs naturels
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La détection et l'attribution des changements climatiques, le rôle des activités humaines
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Contributeurs

Ghil Michael

Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC « Causes et enjeux du changement climatique ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.

Prévisibilité du climat : l’état de nos certitudes et de nos questionnements

Michaël GHIL
Distinguished Research Professor – Université de Californie à Los Angeles

Le graphique ci-dessous montre l'évolution des températures globales pendant le siècle précédent, le XXe, donc à partir de 1900 jusqu'à la fin de celui-ci, jusqu'en 2100. Les différentes courbes de différentes couleurs correspondent à des scénarios d'augmentation des gaz à effet de serre aussi bien que des aérosols. Ce qui est remarquable, c'est que les températures seront plus basses si l'on se comporte raisonnablement, et qu’elles augmenteront d'une manière très importante et délétère si on continue de se comporter comme on le fait aujourd'hui.

1. Incertitudes

Pour chacune de ces courbes, vous voyez à droite du graphique des barres verticales qui correspondent aux résultats des différents modèles climatiques qui ont été utilisés pour ce quatrième rapport du GIEC, donc celui qui a été publié en 2007. Ces barres d’erreur correspondent à plusieurs degrés de température globale, ce qui affecte beaucoup les comportements que nous aurons par la suite pour nous adapter ou mitiger ces changements. Nous parlerons des raisons pour lesquelles ces différences entre les résultats sont si difficiles à réduire pendant les dernières décennies. Nous devrons parler de sensibilité des modèles à différents paramètres ainsi que de variabilité naturelle, dite variabilité interne de climat.

Le graphique ci-dessous correspond au dernier rapport du GIEC, publié en septembre 2013. Nous voyons essentiellement qu’il y a toujours des différences entre les différents modes de comportement de l'humanité. Ces différents comportements ont trouvé une expression un peu différente dans ce rapport : au lieu de scénario, on parle de profil représentatif, d’évolution de concentration des gaz à effet de serre. Mais vous voyez principalement qu'à droite il y a toujours des barres d'erreur très importantes. Ce rapport renforce la certitude sur la croissance des températures de surface globale, mais les questionnements sur les valeurs exactes de ces températures vers la fin du siècle persistent. Par ailleurs, ces incertitudes augmentent toujours avec la longueur du temps de prévision : le plus loin on va, le moins sûr on en est. Ce rapport a aussi examiné des quantités plus régionales comme par exemple l'étendue de la banquise arctique que vous voyez sur le graphique d'en bas. Celles-ci sont également affectées ou bien directement par les gaz à effet de serre ou alors indirectement par le biais des températures dans le graphique supérieur.

2. Sources des incertitudes

Le système climatique est complexe. Il est composé de beaucoup de sous-systèmes avec des interactions entre eux. Il est non linéaire, c'est-à-dire que si vous frappez deux fois plus fort, l'effet n'est pas nécessairement juste deux fois plus fort. La première fois, peut-être que votre adversaire a chancelé. La deuxième fois, il peut tomber. C'est pareil pour le système climatique. Le système est hétérogène. Ses sous-systèmes ne sont pas des molécules identiques d'un gaz. Chacun a ses propriétés : l'atmosphère, l'océan, la végétation à la surface de la Terre, le plancton dans l'océan. Vous avez de surcroît des échelles multiples qui vont de celle d'une tornade d'une dizaine ou d’une centaines de mètres à des centaines de kilomètres et des systèmes de temps qui correspondent aux différentes ondées qui passent au-dessus d'un continent.

3. Variabilité naturelle du climat

Le graphique ci-dessous est une version un peu idéalisée des deux premiers graphiques. Vous avez toujours sur l'axe horizontal le temps qui cette fois-ci n'évolue que de 1900 à 2000. La ligne rouge correspond à un effet hypothétique des gaz à effet de serre, en particulier le dioxyde de carbone pour lequel il est connu que pour une augmentation exponentielle de cette concentration, vous avez simplement une montée linéaire des températures globales.

La ligne noire, elle, n’est pas linéaire. Elle n'est pas monotone c'est-à-dire qu’elle ne monte pas d’un pas soutenu. Elle a des hauts et des bas qui peuvent durer des années et même des décennies. Vous voyez ici l'effet qui est indépendant du forçage, celui de la variabilité naturelle du système climatique. Cette variabilité naturelle ne disparaît pas simplement en raison de l’effet du forçage. La vie serait bien plus simple si le système climatique suivait simplement aveuglément ce que les forçages lui imposaient. Malheureusement cela n'est pas le cas.

4. Forçage

On va se pencher sur la différence entre les comportements par rapport au forçage d'un système en équilibre à gauche et d'un système hors équilibre comme le système climatique à droite (figure ci-dessous).

Si le système climatique était en équilibre et qu’on faisait augmenter le CO2 d’un saut, la température dans un système en équilibre et linéaire suivrait simplement la courbe qui est continue (donc c'est le CO2 en pointillé et la température en continu). Elle passerait d'un palier à un autre palier. Ce que vous voyez à droite concerne le système hors équilibre. C’est un peu comme si le système climatique fonctionnait comme une pendule, ce qui est une simplification peut-être de la façon dont fonctionne El Nino en oscillations stables. Si c'était le cas, un changement, un saut dans le CO2 ne causerait pas seulement le passage d'un palier de température moyenne à un autre mais aussi à une augmentation ou une diminution de l'amplitude des oscillations aussi bien qu'une modification éventuellement de la fréquence aussi bien que de la phase de l'oscillation.

5. Conclusion

Que savons-nous après tout ça ? Ca se réchauffe et on y contribue par le biais des gaz à effet de serre et des aérosols. Il faut évidemment agir selon les meilleures informations à notre disposition. Mais que savons-nous un peu moins bien ? De combien augmenteront les températures d'ici la fin du siècle et dans quelle mesure on y contribue par rapport à d'autres effets climatiques. Finalement, comment marchent vraiment l'atmosphère et les océans ? Nous avons une compréhension parmi les meilleurs de tout système physique parce que simplement on a plus de données sur l'atmosphère et les océans que sur tout autre fluide. Et comment la variabilité naturelle interagit-elle avec le forçage anthropique ? Le mieux on comprendra le système climatique et ses forçages, le mieux on pourra prévoir l'évolution du climat, s'adapter à cette évolution et essayer d'atténuer ce changement.