En ligne depuis le 12/01/2018
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Description
Isabelle Dajoz, professeur à l'Université Paris Diderot, discute dans cette vidéo (7'46) de la diversité des interactions entre les organismes au sein des écosystèmes, en se focalisant tout particulièrement sur les interactions non trophiques. Évoquant le mutualisme, avec l'exemple de la pollinisation, et la symbiose, avec l'exemple des mycorhizes, elle montre l'intérêt pour les sociétés humaines de favoriser ces interactions pour un bon fonctionnement des écosystèmes.
Objectifs d’apprentissage :
- Comprendre le fonctionnement de et les services rendus par la pollinisation
- Comprendre le fonctionnement de et les services rendus par les symbioses mycorhiziennes.
Contexte
Cette vidéo fait partie de la semaine de cours "Les bases écologiques de l'ingénierie écologique" du MOOC Ingénierie écologique.
Restaurer des écosystèmes dégradés, dépolluer des milieux, créer des continuités écologiques, développer une agriculture plus respectueuse de l'environnement, sont autant de défis qui se posent aujourd'hui à nous. Pour y répondre, de plus en plus de réflexions et de pratiques se tournent vers l'ingénierie écologique, solutions que l'on dit "basées sur la nature". Ce MOOC vous propose d'en découvrir les fondements, les enjeux, les outils, les acteurs ainsi que les conditions de mise en œuvre.
État
- Labellisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Partage des conditions à l'identique
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
- Paternité
Nature pédagogique
- Cours
Niveau
- Bac+2
- Bac+3
Thèmes
- Ecosystèmes et biodiversité
Types
- Grain audiovisuel
Mots-clés
Contributeurs
Dajoz Isabelle
Ce document contient la transcription textuelle d’une vidéo du MOOC UVED « Ingénierie écologique ». Ce n’est donc pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots, l'articulation des idées et l’absence de chapitrage sont propres aux interventions orales des auteurs.
Les interactions non trophiques et leur rôle dans le fonctionnement des écosystèmes
Isabelle Dajoz
Professeur, Université Paris Diderot
Je vais vous parler des interactions entre espèces autres que celles basées sur « Qui mange qui ?». Ces interactions de « Qui mange qui ? » peuvent être très complexes. Mais toutes les interactions dans un écosystème ne sont pas basées sur « qui va manger qui ». Il y a toute une diversité d'interactions qui sont différentes et leur particularité est qu'il va y avoir des coûts et des bénéfices réciproques pour chaque partenaire. L'espèce A qui interagit avec l'espèce B va avoir des coûts à cette interaction, mais aussi des bénéfices. Dans cette catégorie d'interactions non-trophiques, on distingue deux grandes catégories : les symbioses, où il y a un contact permanent entre les deux individus des deux espèces, et les mutualismes où les interactions peuvent être plus ponctuelles. Pour vous illustrer mon propos, je vais prendre l'exemple d'une prairie et on va regarder dans cette prairie, dans le compartiment aérien, un exemple d'interaction mutualiste, qui sont les plantes avec leurs pollinisateurs et un exemple d'interaction symbiotique, qui sont les racines des plantes avec les micro-organismes du sol.
1. La pollinisation : fonctionnement
On va tout d'abord se focaliser sur cette interaction au niveau épigé de la prairie, avec des plantes qui interagissent avec leurs agents pollinisateurs. C'est une interaction qui est omniprésente chez les espèces de plantes à fleurs, puisqu'on estime que plus de 90 % des plantes à fleurs sont pollinisées par des animaux. Il y a une très grande diversité d'organismes qui vont assurer cette pollinisation. Ça peut être des mammifères, comme les souris, ça peut être des papillons, des insectes principalement en Europe occidentale. On va avoir des bénéfices réciproques pour les deux partenaires : les pollinisateurs et les animaux vont chercher des ressources alimentaires et les plantes vont assurer leur reproduction avec la visite de l'animal pollinisateur.
2. La pollinisation : services
Cette pollinisation est très importante dans le fonctionnement des écosystèmes, puisqu'elle assure la reproduction des plantes, et donc le maintien de la biodiversité dans les communautés végétales naturelles, mais elle a aussi une importance très grande dans notre vie quotidienne, puisqu'elle assure la pollinisation des plantes cultivées et donc la production de nourriture via cette pollinisation de ces plantes cultivées. Pour vous donner un petit peu un ordre de grandeur de l'importance de cette interaction, cette interaction est à la base de notre sécurité alimentaire, puisque plus de trois quarts des plantes cultivées nécessitent une pollinisation pour fournir une récolte. C'est le cas bien sûr des fruits, de certains légumes, mais c'est également le cas de cultures d'intérêt économique, comme par exemple des oléagineux, comme le colza ou le tournesol, ou des cultures d'intérêt économique avec un commerce mondial comme le café ou le cacao, et puis bien sûr c'est le cas de la production de semences. Comme on est dans un monde où il est important de donner une valeur aux choses, on a estimé le coût annuel de cette pollinisation pour la production agricole, qui est de plus de 150 milliards d'euros par an. Pour vous montrer l'importance que ça a dans la vie quotidienne, vous pouvez imaginer un pique-nique avec et sans pollinisation. Quand il n'y a plus de pollinisateurs, on n'a plus grand-chose à manger d'autre que des chips et du pain ou de la farine. C'est un petit peu triste pour la vie quotidienne.
3. Menaces sur la pollinisation
Cette pollinisation est une interaction extrêmement importante dans le fonctionnement des écosystèmes et pour aller un petit peu plus loin, je voudrais vous rappeler que c'est également une interaction mutualiste qui est très en danger. Cette crise de la pollinisation est très médiatisée. On observe en effet, depuis quelques décennies, un déclin des pollinisateurs et de la flore sauvages. Les facteurs responsables de ce déclin sont multifactoriels, notamment l'utilisation de pesticides, ou la fragmentation des habitants, ou l'urbanisation des habitants.
4. La symbiose mycorhizienne : principe
Un deuxième exemple dont je voudrais vous parler pour vous illustrer l'importance de ces interactions pluri-spécifiques non-trophiques dans le fonctionnement des écosystèmes est celui qui va se passer dans le compartiment inférieur de notre prairie. Il s’agit des interactions symbiotiques qu'il y a entre les racines des plantes supérieures et la micro flore du sol, notamment les champignons mycorhiziens. On estime que plus de 99 % des plantes terrestres n'ont pas des racines mais des mycorhizes, c'est-à-dire une interaction entre leurs racines et ces champignons mycorhiziens. On estime également que la mise en place de cette symbiose a joué un rôle essentiel dans la sortie des eaux pour les végétaux il y a plusieurs centaines de millions d'années. Ces interactions vont également avoir des bénéfices réciproques pour les deux partenaires, puisque la plante va bénéficier d'une meilleure nutrition minérale via les hyphes des champignons qui entourent ces racines et le champignon va piocher au niveau des cellules de la plante et au niveau des cellules de la racine, des assimilats photosynthétiques sous forme notamment de glucides.
5. Les symbioses mycorhiziennes : services
Ces interactions ont une importance appliquée très importante en agriculture, puisque des plantes cultivées avec une mycorhization satisfaisante vont produire une récolte plus abondante et en utilisant moins d'engrais chimiques et de pesticides également. Cette symbiose mycorhizienne a un rôle en agriculture, mais elle a également un rôle, comme pour la pollinisation, dans le maintien de la biodiversité dans les écosystèmes. Les communautés végétales sont en interaction avec une micro flore de champignons plus ou moins diversifiée. Plus cette micro flore est diversifiée, plus la communauté végétale va contenir d'espèces en nombre important. Ce rôle est donc fondamental dans le maintien de la biodiversité de ces communautés végétales.
6. Menaces sur les symbioses mycorhiziennes
Pour finir sur une note appliquée et concrète, on peut se poser la question de l'impact des pratiques de l'agriculture intensive sur le maintien de cette symbiose et sur sa pérennité. On peut notamment s’interroger sur l'impact que peuvent avoir les labours répétés sur les champignons mycorhiziens, sur ces réseaux d'interaction entre les plantes et les micro-organismes mycorhiziens dans le sol et puis également l'impact des pesticides et des fongicides sur ces interactions.