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Description

Bernard Riéra, attaché honoraire au Muséum national d’Histoire naturelle, explique dans cette vidéo (10'21) ce que sont les dynamiques des formations arborées. Il analyse notamment le phénomène de régénération qui se met en place avec l’apparition de chablis, ainsi que celui de surcimage.

Objectifs d'apprentissage :
- Appréhender la forêt dans une perspective dynamique
- Comprendre les étapes de la régénération forestière suite à une perturbation.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
Mentions Licence
  • Sciences de la vie
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+3
  • Bac+4
Objectifs de Développement Durable
  • 15. Vie terrestre
Thèmes
  • Ecosystèmes et biodiversité
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
forêtsarbresécosystèmes forestiers
L'arbre dans le registre fossile
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Les rythmes saisonniers des arbres
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La journée d’un arbre
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Trajectoires évolutives récentes des arbres
Trajectoires évolutives récentes des arbres
Changement climatique, arbres et épigénétique
Changement climatique, arbres et épigénétique
Contributeurs

Riéra Bernard

attaché honoraire , MNHN - Muséum national d'Histoire naturelle

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La dynamique des formations végétales arborées
Bernard Riera, Attaché honoraire au Muséum national d’Histoire naturelle

La forêt est un ensemble complexe qui peut être originaire d'une formation, d’une régénération sur un sol nu, ou être issu d'une forêt qui existe depuis très longtemps. On va avoir des fonctionnements différents dans la dynamique forestière suivant cet aspect-là. Ça va entraîner des mécanismes différents qui vont permettre à la forêt de se régénérer, de fonctionner. 

1. Mortalités et libération d’espace
Nous avons un élément important qui est celui de la mortalité. Il n'y aura de régénération que s'il y a la libération d'un espace. On a, en forêt, deux situations qui sont assez importantes.

La première situation est liée à la chute d'un arbre. On parle alors d'un chablis (pour la chute d'une branche ou d'une partie de l'arbre, on parle de volis). Cette chute d'un arbre va créer une ouverture. Si on a des chablis multiples, où on va avoir plusieurs arbres qui vont tomber en même temps, ces ouvertures seront plus importantes. C'est aussi le cas lorsqu'on a des chablis complexes : un chablis a été créé, il a déstabilisé peu ou prou l'environnement, et au bout d'un certain temps on va avoir de nouveau des chutes d'arbres.

Chablis Complexe :

La deuxième situation de mortalité est liée au phénomène de surcimage. Lorsque les arbres se développent, suite par exemple à un chablis, ils vont créer une voûte relativement continue. Il va y avoir de la compétition entre eux et certains arbres vont mourir. Dans cette situation liée à un surcimage, on va parler pour les arbres de mort précoce. Cette mort précoce est associée à un mécanisme de substitution puisque ce sera un arbre qui va être à côté ou au-dessous qui va prendre la place de l'arbre tombé.
 
3. Dynamique forestière
Vous avez ici un chablis d'un an. Ce chablis d'un an est composé d'un arbre qui est tombé. On a le tronc qui a créé des dégâts. Au niveau de la partie où il y a le tronc, qu'on voit sur la gauche, il y a très peu d'individus. Sur la partie droite, on a beaucoup plus d'individus qui n'ont pas été atteints par cette perturbation. Quand on a un chablis plus ancien, au bout de 5 ans, par exemple, la zone qui a été fortement perturbée va à nouveau présenter de jeunes individus qui se sont développés et qui vont reconstituer progressivement cette voûte forestière.
 
Au bout d'un certain temps, on estime que c'est entre 20 et 30 ans, une voûte qui apparaît continue avec un arbre émergent. Cette voûte donne l'impression que l'on est de nouveau en forêt relativement homogène. Mais en fait, cette forêt est composée d'individus, comme ici cet individu en vert, des individus pionniers qui se sont développés après cette perturbation.
 
4. Les mosaïques forestières
Sur ce schéma, on voit qu'on peut arriver à montrer l'âge des forêts, ou l'âge dans les forêts. Pour cela, on a utilisé un système qui est basé sur le diamètre des arbres. On va mettre des niveaux qui correspondent à des parcelles où on a des individus entre 5 et 20 cm (en vert), d'autres où on a des individus entre 20 et 40 cm (en bleu), et en vert foncé nous avons des individus qui ont plus de 40 cm. 
Oldeman considère qu'en fonction du diamètre et de la hauteur, on a une relation écologique qui indique que des arbres sont autour d'une relation H = 100 x D. Ça permet d'estimer les hauteurs de la forêt entre 25 et 40 m. Ici, on a donc des forêts qui peuvent atteindre 25 à 40 m quand on a les 3 couches. 

Sur ces 3 couches, on va avoir des endroits où il va y avoir des parcelles sans individus, des parcelles avec des individus entre 5 et 20 cm. Cet ensemble de parcelles, qui représente à peu près 55 % de la forêt, va avoir un âge estimé entre 0 et 70 ans. Sur la situation où on a des individus qui représentent les 3 niveaux, on va avoir environ 15 % de la forêt. Ces 15 % de la forêt correspondent à des individus qui vont avoir entre au moins 170 ans, et souvent plus. On voit donc ici qu'en fait la forêt est un ensemble en équilibre avec des individus jeunes, entre 0 et 70 ans, des individus d'âge mature, autour de 70 ans et 170 ans, et des individus relativement âgés qui ont plus de 170 ans. La forêt est un ensemble d'étapes qu'Aubréville a appelé une mosaïque forestière, un ensemble de stades avec des âges différents suivant les endroits qu'on va observer.

5. Suite à une perturbation
Vous avez ici un arbre qui a un port étalé, avec des branches maîtresses importantes. Ce type d'arbre va créer, quand il va tomber et mourir, des perturbations importantes qui sont les chablis. On a deux mécaniques importantes dans la mortalité qui sont liées à des situations, notamment pour les facteurs abiotiques, c'est-à-dire les arbres qui vont tomber sous forme de chablis, et qui sont dues à des mécanismes qui sont à la fois la pédologie, ou le vent, ou la pluie. Ça créé un déséquilibre, et l'arbre qui va tomber va créer une perturbation relativement grande, de l'ordre de 170 m².
 
Cette perturbation va être favorable pour les espèces qui aiment la lumière, mais aussi l'ombre, et donc vont passer plutôt dans ce mécanisme de succession où on va avoir, quand il y a des héliophiles, un remplacement des héliophiles progressivement dans le temps par des sciaphiles. De l'autre côté, on a une situation où se sont les facteurs biotiques qui vont être les facteurs importants pour la mortalité. Là, c'est essentiellement le peuplement environnant, la compétition, la concurrence, qui est liée au type d'espèce, et qui est aussi liée à l'âge des individus. Cette mortalité sur pied va créer des petites perturbations et on va rentrer dans ce qu'on appelle des mécanismes de substitution.
 
Quand on a un chablis, on va avoir différentes parties dans le chablis qui sont liées, justement, à cette chute d'arbre. À l'endroit où l'arbre était présent, il va y avoir très souvent un déracinement, avec une butte de déracinement. Cet endroit est situé au-dessous de l'ouverture qui a été créée par la chute de l'arbre. Cette ouverture va entraîner beaucoup de lumière, on va donc avoir des espèces qui aiment la lumière, donc des espèces héliophiles, qui vont se développer. À l'opposé, sur la partie distale, on a une situation où on a beaucoup de matière organique qui tombe, donc beaucoup de dégâts. Les graines qui pourront germer, ce sont que les graines qui vont arriver celles de dessous n'ayant pas de lumière. Ces graines germent généralement pendant la saison des pluies. Mais arrivé à la saison sèche, on se retrouve avec une situation où les racines n'ont pas eu le temps d'arriver jusqu'au sol et donc la réserve en eau du sol n'est pas utilisée par ces plantes, donc on a une mortalité importante. Enfin, dans la partie médiane, on a une situation où les individus qui sont en place, plus des individus qui arrivent sous forme de graine, plus des graines qui sont dans le sol, vont se développer pour refermer cette ouverture et reconstituer ce qu'on appelle "la voûte forestière".

6. Les stades de la régénération
Pour Richards en 1952, il est intéressant de présenter le système qui va permettre cette régénération. Il a décrit 3 stades. 

Dans le premier stade, on a les espèces qui sont présentes sous forme de méristème qui vont se mettre à se développer. On a les graines qui arrivent, qui vont aussi se mettre à développer. On est dans ce que Richards appelle "la phase d'installation et de réactivation". On réactive les potentiels et les graines se mettent à germer.

On a ensuite une phase qui est la phase de la croissance et de la cicatrisation. Les individus ont démarré, dans la phase précédente, et se développent. Les individus les plus grands qui étaient en bordure de l'ouverture vont bénéficier de cette lumière. Tous les méristèmes présents vont en profiter pour se développer. Progressivement, on a une fermeture de cette trouée.
 
Sur la dernière phase, on arrive à une situation où on va avoir une stabilisation, une structuration. La voûte va se reformer. On va avoir de la croissance, on va avoir une structuration dans l'espace des individus, ça va créer un surcimage, puisqu'il va y avoir de l'ombre qui va être portée sur certains individus qui n'ont plus assez de lumière, et donc vont mourir et rentrer dans le système qu'on appelle déjà la substitution. Cette substitution va faire que certaines espèces vont disparaître. On a bouclé le système, on est revenus à une situation de départ où on a une voûte forestière qui est reconstituée. Cette voûte forestière va permettre de redémarrer un système avec, éventuellement, des chablis, des morts sur pied, qui vont créer des ouvertures, qui vont créer des conditions favorables aux espèces qui aiment la lumière, mais aussi aux espèces d'ombre. On rentre donc dans un système où on boucle pour revenir à une dynamique où on va avoir de nombreuses espèces qui vont pouvoir se maintenir par ce jeu de mortalité et de régénération.