Aller au contenu principal
Voir la ressource
L'Agroécologie

© INRA – Christophe Maître

UVED - Université Virtuelle Environnement et Développement durable
Description

Ce parcours thématique vise à vous apporter des éléments de compréhension de ce qu'est l'agroécologie.

Il est composé de petites vidéos faisant intervenir des chercheurs, issus d'horizons différents, travaillant dans le domaine.

Plusieurs thèmes sont abordés, à commencer par l'émergence de cette approche dans un contexte marqué par une agriculture industrielle omniprésente et porteuse de risques socio-écologiques. Les bases scientifiques de l'agroécologie sont ensuite posées, puis les conditions de réussite de cette transition sont évoquées, que ce soit sous l'angle du renforcement des capabilités, ou encore sous celui de la prise en compte des relations entre une agriculture de qualité et les autres Objectifs de Développement Durable.

État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Partage des conditions à l'identique
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Paternité
Nature pédagogique
  • Parcours de formation
Niveau
  • Bac
  • Bac+1
  • Bac+2
  • Bac+3
Thèmes
  • Alimentation
  • Ecosystèmes et biodiversité
Types
  • Parcours thématique
Mots-clés
agroécologieingénierie agroécologiqueagricultureécosystèmesbiodiversité
  • Qu'est-ce qu'un système en écologie ?
  • Le recyclage dans les écosystèmes
  • La biodiversité du sol
  • Les organismes "ingénieurs de l'écosystème"
  • Biodiversité, fonctionnement et stabilité des écosystèmes
Télécharger le fichier

Le recyclage dans les écosystèmes

Luc Abbadie, Professeur à l'UPMC
 

Dans la nature rien ne se perd, il n’y a pas de déchets, tout est recyclage. Ce recyclage, il intervient à de nombreuses échelles.

Un exemple classique c’est celui du carbone, il y a un grand cycle à l’échelon planétaire. Si on regarde la partie continentale de la planète, ce carbone passe de la forme minérale - CO2 dans l’atmosphère dioxyde de carbone - à une forme organique sous forme de grandes molécules organiques dont les plantes vivantes, dans les animaux. Par mortalité, on crée de la matière morte, cette matière morte c’est ce qu’on appelle l’humus du sol qui est à la base de la fertilité du sol. Cet humus, il est consommé par les bactéries, les champignons du sol, qui vont donc tout casser, dégrader toutes les molécules, libérer des éléments minéraux en l’occurrence le CO2 qui repart dans l’atmosphère, et ainsi on boucle complètement le cycle du carbone. Quand on regarde les grands compartiments de carbone sur la planète, c’est d’abord l’océan, mais ensuite c’est le sol, il y a trois à quatre fois plus de carbone dans le sol que dans l’atmosphère. Et donc, c’est vrai qu’en ingénierie écologique, quand on restaure un écosystème, ou quand on passe à de l’agro écologie, le recyclage c’est souvent une affaire de matières organiques d’une part, et d’éléments nutritifs azote/phosphore d’autre part. Avec évidemment des échelles beaucoup plus localisées que celle que je viens de décrire sur le cycle global du carbone.

Alors voici un profil de sol : la surface est sombre, elle est noire. C’est typiquement cette couche organique, cet humus du sol, cette matière organique du sol qui provient en fait de la mortalité végétale, et qui représente une source d’énergie et d’éléments nutritifs pour tous les organismes vivants, et donc évidemment le but ça va être créer un accès, si vous voulez, à ces éléments nutritifs. Si on prend un exemple, il n’y en a pas beaucoup comme ça, de bilan nutritif d’une forêt, d'une forêt expérimentale à Hardwood. Cette forêt expérimentale, si on regarde la ligne du bas, on s’aperçoit que pour l’azote comme pour les autres éléments, entre 70 % et quasiment 90 % des besoins annuels en azote, phosphore, etc. , sont couverts par le recyclage de la matière organique, par la dégradation de la matière organique. Et puis, évidemment tout n’est pas recyclé à 100 %, donc d’autres éléments peuvent venir de l’atmosphère, c’est le cas de l’azote qui va rentrer un petit peu tous les ans dans le système, mais aussi le phosphore qui va, lui, être produit par la dégradation des roches du sous-sol. Les roches du sous-sol elles sont à 1 mètre, 2 mètres, 3 mètres, 4 mètres de profondeur parfois, dans les systèmes tropicaux. Autrement dit elles sont en dehors des capacités d’extraction par les racines, elles sont en dehors de la zone racinaire de la plupart des plantes et notamment des plantes cultivées annuelles, comme les céréales.

 

Alors, aujourd’hui pour assurer finalement ce cycle, et compenser les pertes qu’on a tous les ans en phosphore, ou en n’importe quoi d’ailleurs, tous les éléments sont un petit peu perdus, encore une fois le recyclage n’est jamais à 100 %, aujourd’hui, on conseil de copier ce qu’il se fait dans la nature et de mettre en place des arbres, qui eux ont des racines profondes, sont capables d’aller chercher le phosphore profond, et également le potassium, de le remonter en surface, et les arbres aujourd’hui sont associés aux cultures annuelles comme des ascenseurs à éléments nutritifs.

 

Donc ça, ça permet de rétablir si vous voulez les pertes et donc de corriger les imperfections d’un recyclage qui, encore une fois, n’est jamais à 100 %. Évidemment, pour avoir accès aux éléments nutritifs azote/phosphore qui sont dans ces résidus organiques, dans cette matière organique, il faut donc casser les chaînes carbonées qui emprisonnent en quelque sorte ces éléments nutritifs. Et ça, c’est un phénomène qui demande beaucoup d’énergie, les bactéries du sol en général elles sont au repos parce que la matière organique du sol est trop complexe à dégrader, donc le rendement énergétique est mauvais.

Alors la solution a été trouvée par les plantes il y a longtemps et ça, ça ouvre des perspectives nouvelles en ingénierie écologique. La solution des plantes, c’est tout simplement de consacrer en moyenne un tiers de la production nette de molécules organiques issues de la photosynthèse, donc un tiers qui va être sécrété activement par les racines sous forme de petites molécules, donc un bon rendement énergétique lors de la dégradation. Ces molécules vont être consommées par les bactéries et les champignons qui vont donc pouvoir être active à ce moment-là, se réveiller et attaquer la matière organique du sol et rendre du coup accessible l’azote et le phosphore. Autrement dit la plante dépense beaucoup d’énergie, encore une fois un tiers en gros de son bilan énergétique total, pour débloquer les bactéries, ce qui va lui amener une amélioration de son statut nutritif. Il y a des stratégies qui ont été mises au point, stratégies évolutives qui ont été mises au point par le vivant, pour régler cette question de l’accès à l’azote et au phosphore.

Alors, on s’aperçoit qu’en fait le vivant il a développé de multiples astuces pour régler cette question du recyclage des éléments. Vous avez des exemples fameux en savane par exemple, dans les savanes d’Afrique de l’Ouest où vous avez une végétation dominée par de l’herbe, des grosses touffes d’herbe, sous ces grosses d’herbe on a une concentration des racines, et comme ces plantes vivent presque 100 ans, vous avez à tout moment coexistence dans de tout petits volumes de sol, de racines mortes qui se décomposent et qui libèrent des éléments nutritifs, et de racines vivantes qui pompent ces éléments nutritifs. Et comme les racines mortes sont proches des racines vivantes, eh bien le passage, le recyclage, là pour le coup il est quasiment à 100 %. Ça veut dire que lorsqu’on est capable de rapprocher dans l’espace les sources de nutriments, racines qui se décomposent ou humus qui se décompose, ou feuilles mortes qui se décomposent, quand on est capable de rapprocher ça des racines vivantes, des puits donc de nutriments, on assure une meilleure fermeture du cycle de l’azote.

 

C’est un point clé sur la durabilité des écosystèmes, et notamment des écosystèmes cultivés. Comment fermer le cycle des éléments ? Eh bien une solution, c’est la dimension spatiale de cette question, source-puits, puis rapprocher les sources et les puits de nutriments.

Enfin un dernier exemple, alors dans les forêts tropicales la même chose, les racines sont très superficielles, elles ne sont pas dans le sol, elles sont dans la litière de feuilles mortes et c’est absolument la même mécanique. Et donc dernier point aussi, des stratégies ont été mises au point de façon très astucieuse, on pourrait dire ça comme ça, entre les plantes et les bactéries du sol. Ici on a un exemple, toujours dans ces savanes où les plantes inhibent les bactéries qui fabriquent les nitrates. Vous n’avez quasiment pas de nitrate et la droite qui est représentée ici vous montre que plus la touffe d’herbe est grosse, plus l’inhibition est forte, on n'a quasiment plus de nitrates dans ces sols. La plante qu’est-ce qu’elle gagne ? Elle gagne une meilleure nutrition azotée, parce que le nitrate comme chacun sait c’est un polluant, si c’est un polluant ça veut dire qu’il quitte l’écosystème. Si vous n’avez pas de nitrate, vous avez de l’ammonium, l’ammonium il reste dans le système et donc la nutrition azotée de la plante est améliorée. Donc les plantes sont capables, ont développé des stratégies d’amélioration du recyclage des éléments nutritifs. Et donc en ingénierie écologique aujourd’hui, il y a toute un pan de la recherche qui essaye de comprendre les mécanismes naturels qui ont été mis en place dans la durée de temps de l’évolution, et d'essayer de mimer ces processus naturels, notamment encore une fois dans les systèmes agricoles, ou dans tous les systèmes qu’on va restaurer.

 
Contributeurs

HAINZELIN Etienne

CIRAD - Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement

Bourg Dominique

philosophe et professeur , Université de Lausanne

COUVET Denis

Abbadie Luc

professeur émérite , Sorbonne Université

Thébault Élisa

Léger François

AgroParisTech

Lescourret Françoise

Parrot Laurent