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Description

Dans cette vidéo, Dominique Bourg examine sept des neuf limites planétaires identifiées par Rockström et ses collègues en 2009 : la consommation d'eau douce, l'occupation du sol, les cycles de l'azote et du phosphore, l'ozone stratosphérique, les aérosols, les substances étrangères, l'acidification des océans.

Domaines
  • Nature & Biodiversité
État
  • Labellisé
Langues
  • Français
Licence Creative Commons
  • Pas d'utilisation commerciale
  • Pas de modification
  • Paternité
Mentions Licence
  • Sciences de la Terre
  • Sciences de la vie et de la Terre
Nature pédagogique
  • Cours
Niveau
  • Bac+1
  • Bac+2
Thèmes
  • Ecosystèmes et biodiversité
  • Les problématiques environnementales
Types
  • Grain audiovisuel
Mots-clés
limites planétairesoceansdéforestationazoteeau
La finitude des ressources
La finitude des ressources
Les limites du système terre (1) : changement climatique et biodiversité
Les limites du système terre (1) : changement climatique et biodiversité
L'enjeu des enjeux : les capacités de production alimentaire
L'enjeu des enjeux : les capacités de production alimentaire
Contributeurs

Bourg Dominique

philosophe et professeur , Université de Lausanne

Institutions secondaires

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Ce document est la transcription révisée, chapitrée et illustrée d’une vidéo du MOOC UVED « Économie circulaire et innovation ». Ce n’est pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots et l'articulation des idées sont propres aux interventions orales des auteurs.

Les limites du système Terre - Partie 2 : Autres changements globaux

Dominique BOURG, Professeur – Université de Lausanne

1. Les cycles de l’azote et du phosphore

Après la biodiversité et le changement, nous allons aborder une troisième limite planétaire que nous avons outrepassée. C'est celle qui concerne deux grands cycles biogéochimiques : celui du phosphore et celui de l'azote, les deux étant très directement liés à nos activités agricoles, en d'autres termes aux activités qui nous permettent de nous nourrir. Avec ces cycles, on touche plutôt le vivant. Les conséquences sont déjà importantes. Ces perturbations du cycle de l'azote et du phosphore multiplient sur Terre les milieux anoxiques, asphyxiants, et si ça changeait d'échelle, ça deviendrait relativement inquiétant.

2. L’occupation des sols

Nous allons aborder désormais une autre limite que nous avons là aussi outrepassée, ce qui n'était pas le cas en 2009 avec la publication du premier papier de Johan Rockström. Mais c'est le cas depuis janvier 2015 avec la publication du papier de Will Steffen. Celle-ci concerne le changement d'occupation des sols et évidemment, au premier chef, celui de la déforestation. La déforestation de la forêt amazonienne, par exemple, qui était un régulateur dans le système du régime mondial des pluies, a une influence non négligeable sur ce régime mondial des pluies et le modifie. On est là, encore une fois, dans une limite, un franchissement de limite, qui a une portée systémique même si elle est moins importante que, comme nous l'avons vu, celle de la biodiversité ou celle du climat.

3. L’eau douce

Concernant les limites qui suivent, on va voir que soit nous ne les avons pas encore franchies, soit qu'on ne sait pas déterminer le seuil de franchissement. Alors concernant la consommation d'eau douce, il y a quinze mille kilomètres cubes qui sont disponibles d'eau douce, pour tout le vivant, et sur ces quinze mille il faudrait que les activités humaines ne dépassent pas les quatre mille kilomètres cubes. Pour le moment on en est à deux mille six cents, tout simplement parce qu'il faut que le reste du vivant, et la végétation, puissent vivre. Or, si l'on regarde certaines tendances, si l'on regarde certains calculs, cette limite pourrait être prochainement franchie pour deux raisons : d'une part l'augmentation de la démographie mondiale, l'augmentation de nos activités, mais aussi effectivement l'augmentation de la végétation, qui par certains côtés est due à l'enrichissement de l'atmosphère en dioxyde de carbone. Cela pourrait nous amener peut-être vers le milieu du siècle à dépasser cette limite fixée aux occupations humaines, et aller peut-être jusqu'à quatre mille six cents kilomètres cubes d'eau consommés par l'Humanité.

4. L’introduction de matériaux étrangers

Une autre limite que l’on n'avait pas la possibilité de quantifier en 2015 était celle de la pollution chimique. On parle plutôt d'introduction de matériaux étrangers parce qu'il n'y a pas que les pollutions chimiques. On peut avoir des métaux lourds, on peut avoir aussi d'autres choses, par exemple la radioactivité, par exemple les nanoparticules, et cetera. On introduit dans le système Biosphère des éléments étrangers dont on sait qu'ils peuvent perturber, mais on n'arrive pas, comme je vous le disais, à fixer le seuil à partir duquel ces perturbations commenceraient à avoir un effet global dangereux, faisant basculer à leur tour aussi le système Terre.

5. L’ozone stratosphérique

Une autre limite est la destruction de l'ozone stratosphérique. Là c'est un des premiers soucis de dégradation globale que nous ayons eus à connaître, dès les années quatre-vingt. Il y a eu le protocole de Montréal, à la suite duquel on a réduit vraiment nos émissions. Là, c'est le seul domaine par rapport auquel nous n'avons aussi pas dépassé la limite, mais on a même régressé dans nos dégradations, dans nos destructions. C'est sur les neuf limites c'est la seule qu'on puisse considérer avec un petit peu plus d'optimisme.

6. Les aérosols

Les émissions d'aérosols dans l'atmosphère peuvent être d'origine industrielle ou agricole. Du coup, on forme des petits aérosols qui vont en fait renvoyer une partie de l'énergie solaire dans l'espace, réduire la photosynthèse, de façon très modérée, mais quand même la réduire. Aujourd'hui c'est plutôt ce qu'on appelle encore, même si ce n'est plus très approprié, le Sud, qui est à l'origine de l'essentiel des émissions d'aérosols dans l'atmosphère. Et comme ces aérosols ont un effet nuisible sur la santé humaine, il n’est pas absurde de penser qu'on va réussir à les réduire dans les décennies qui viennent. Mais du coup on induira aussi une petite augmentation de l'effet de serre et du réchauffement de la planète.

7. L’acidification de l’océan

Une dernière limite, que nous n'avons pas encore franchie, est celle qui concerne l'acidification des océans. L'acidification des océans c'est tout simplement une conséquence directe du changement climatique et de la cause du changement climatique, le changement de la composition chimique de l'atmosphère. Le dioxyde de carbone était appelé autrefois l'acide carbonique. Donc c'est acide et ça change très légèrement le pH des océans. Si on continuait sur cette lancée, on finirait par intensifier ce qu'on a commencé à faire, c'est-à-dire fragiliser certains fondements de la chaîne trophique marine, puisqu’on vient empêcher les organismes qui se structurent de pouvoir le faire.

8. Pour résumer

C'est le tableau général sur les fameuses neuf limites : la zone en vert est la zone qu'il ne faudrait pas dépasser, compte tenu des différentes incertitudes.

Puis on rentre dans la zone de danger, tout d'abord dans une zone intermédiaire, celle où on a un certain nombre d'incertitudes. C'est la zone jaune, et vous voyez qu’elle a été franchie pour quatre domaines. Puis même pour certains de ces domaines, par exemple là les perturbations du cycle de l'azote et du phosphore, par exemple pour l'azote, le cycle de l'azote est aujourd'hui deux fois et demie ce qu'il serait sans les activités humaines, alors que par exemple en revanche si l'on regarde le dioxyde de carbone on a fait entre guillemets qu'ajouter 40 % de dioxyde de carbone de plus dans l'atmosphère. Donc on n'est pas dans les mêmes ordres de grandeur. Mais comme je l'ai dit tout à l'heure, là on est avec les perturbations de cycles biogéochimiques sur une durée plus courte parce que ça touche quand même essentiellement le vivant, alors que le cycle du carbone est un cycle au très long cours.

Au-delà de ces zones d'incertitude, il y a un moment donné où on sait qu'alors vraiment le basculement est gigantesque et là on rentre dans la zone rouge. On l'a fait pour la diversité génétique, on l'a fait pour ces deux grands cycles biogéochimiques, ceux de l'azote et ceux du phosphore. Ce schéma-là est plus approprié, plus nuancé, que le schéma de 2009 pour lequel il n'y avait eu que trois franchissements. Là si on compte le jaune, l'entrée dans la zone de danger, on a quatre franchissements. Nous avons franchi quatre des neuf limites. Pour trois, je vous le rappelle, on ne s'est pas fixé le seuil. Donc nous avons, si on se fie à cette batterie d'indicateurs, nous avons vraiment basculé dans un système différent, nous avons vraiment basculé dans l'Anthropocène.