En ligne depuis le 08/09/2014
0/5 (0)
Description
Sabine Barles décrit le métabolisme de la France en 2010, et notamment les flux entrants, les flux sortants, ainsi que les additions au stock.
Domaines
- Aménagement du territoire & Urbanisme
- Economie circulaire
- Nature & Biodiversité
État
- Labellisé
Langues
- Français
Licence Creative Commons
- Pas d'utilisation commerciale
- Pas de modification
- Paternité
Nature pédagogique
- Cours
Niveau
- Bac+2
- Bac+3
Thèmes
- Économie circulaire
- Finitude des ressources
Types
- Grain audiovisuel
Contributeurs
Barles Sabine
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Ce document est la transcription révisée, chapitrée et illustrée d’une vidéo du MOOC UVED « Économie circulaire et innovation ». Ce n’est pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix des mots et l'articulation des idées sont propres aux interventions orales des auteurs.
L'analyse des flux de matières à l'échelle de la France
Sabine BARLES,Professeure d’urbanisme-aménagement,Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
L'analyse des flux de matière constitue l'un des outils principaux de compréhension et de description du métabolisme territorial. Elle repose sur la loi de Lavoisier ou loi de conservation de la masse : rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Elle consiste à peser au sens strict du terme le fonctionnement d'un système, d'un territoire quel qu'il soit.
1. Présentation générale
La figure qui vous est présentée ci-dessous représente le bilan de matière, ou l'analyse des flux de matière, réalisé pour la France au cours de l'année 2010. Elle est donc exprimée en milliers de tonnes et entre parenthèses en tonnes par habitant. Lorsque l'on procède à ce bilan de matière, on doit d'abord définir le système étudié. Ici, c’est la France qui est limitée par ses frontières. Mais le système étudié comporte uniquement la population, ses activités, ses artefacts et ne comprend pas les ressources qui sont fournies par le territoire lui-même qui sont considérées comme des entrées dans le système. Nous avons donc défini un système et ce que nous allons faire est relativement simple. Nous allons regarder tous ce qui rentre, puis nous regarderons tout ce qui sort. Tout ce qui rentre est indiqué sur la gauche, tout ce qui sort est indiqué sur la droite.
2. Les flux entrants
Dans un premier temps nous allons laisser de côté les deux premiers flux, les flux qui apparaissent en bleu sur la figure que l'on appelle flux d'équilibrage et regarder les flux entrants. L'extraction intérieure utilisée désigne l'ensemble des ressources prélevées au sein du territoire national : ce sont des récoltes, du blé par exemple, c’est du bois qui va être extrait des forêts, ce sont des matériaux de construction, ce sont des minerais, éventuellement des combustibles fossiles en petites quantités dans le cas d'un pays comme la France. Ceci nous donne cette extraction intérieure utilisée que vous voyez donc à gauche sur le graphique.
Mais nous voyons immédiatement une autre flèche qui apparaît en noir ici, l'extraction intérieure inutilisée. En effet, il existe des prélèvements de matières qui sont opérés au sein du territoire national mais ces matières ne rentrent pas dans le système économique et sont presque immédiatement restituées à la biosphère non sans dommages environnementaux d'où l'intérêt de les comptabiliser. Ces matières ce sont par exemple les boues de dragage, ce sont les terres excavées lors des travaux publics et donc ces matières représentent des flux importants puisque nous voyons que l'ordre de grandeurs est identique à celui des prélèvements de ressources utilisées.
A ces matières qui sont donc fournies par le territoire d'étude sont ajoutées des importations de matières premières, de produits finis ou semi-finis qui apparaissent ici en rose et qui sont quantitativement un petit peu moins importantes pour la France que les matières prélevées et utilisées localement.
3. Les flux sortants
Nous allons maintenant nous reporter sur la droite du graphique afin d'observer les sorties du système. En bas se trouvent les exportations qui sont un petit peu moins importantes que les importations. Nous retrouvons l'extraction intérieure inutilisée dont nous avons vu qu’elle, finalement, été restituée quasiment immédiatement au milieu. Mais ce que nous devons surtout observer ce sont ces deux flèches grises qui correspondent à ce que nous appelons les rejets vers la nature. Ces rejets vers la nature sont essentiellement constitués de rejets vers l'atmosphère et parmi eux il s'agit essentiellement de gaz à effet de serre et de dioxyde de carbone quantitativement mais ce sont aussi des rejets vers l’eau, des rejets vers les sols, c'est-à-dire tout ce qui est mis en décharge par notre société. Nous voyons que ces flux vers la nature sont plus importants que les exportations, sont plus importants que les importations et sont à peu près identiques à l'extraction intérieure utilisée. Cela nous montre l'importance de cette comptabilité matérielle en lieu et place d'une comptabilité monétaire qui fait peu cas de ce type de flux comme elle fait peu cas de l'extraction intérieure inutilisée.
4. Equilibrage du bilan
Nous allons maintenant équilibrer le bilan. Si nous voulons appliquer la loi de Lavoisier, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, nous devons prendre en compte des flux de matières qui n'ont pas été comptabilisés pour l'instant. En effet, la respiration des hommes et des animaux consomme de l'oxygène mais va aussi entraîner le rejet de dioxyde de carbone et d'eau, ceci doit être comptabilisé afin d'équilibrer le bilan. La combustion va consommer de l'oxygène, produire du dioxyde de carbone qui, lui, est compris dans les rejets vers l'atmosphère. Mais elle produit aussi de l’eau qui doit être introduite dans le bilan. La production d'engrais consomme de l'azote prélevé dans l’air. Ces différents flux sont contenus dans les flux d'équilibrage entrants et les flux d'équilibrage sortants. Ceci permet d'équilibrer le bilan et, par soustraction, de définir l’addition aux stocks que vous voyez en marron au sein du système. Cette addition au stock est très importante d'autant plus que j'attire votre attention sur l'effet cumulatif de l'addition. Cette addition représente l'accumulation de matière dans la société c'est-à-dire des bâtiments, des infrastructures et des biens de consommation qui vont encore une fois s'accumuler et augmenter le stock mais qui seront aussi les déchets de demain.
5. Autres observations
Deux autres choses peuvent être dites sur ce bilan. La première concerne le recyclage que vous voyez apparaître en bas et en vert au sein du système. Nous sommes au sein du système parce que nous considérons que le recyclage ne prélève ni ne rejette, en tout cas en première approche. Mais nous observons que ce recyclage représente très peu de chose par rapport à l'ensemble des flux de matières qui sont mises en jeu par le fonctionnement d'un pays comme la France. Enfin, un dernier élément extrêmement important concerne les flux indirects associés aux importations et aux exportations. Lorsque nous importons un produit fini ou semi-fini dans un pays ou dans un territoire donné, nous importons une quantité de matière ou un objet qui a nécessité une consommation matérielle plus importante que les matières qu'il contient dans un autre pays ou au sein d'un autre territoire. C'est ce que l'on appelle les flux indirects associés aux importations et c'est ce qui montre que finalement le territoire que nous étudions a aussi des répercussions au sein d'autres territoires auxquels il est finalement lié par ces flux indirects.